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Interview Will Solomon (Antibes): « La NBA ne me satisfaisait pas »

Cent quinze apparitions en NBA, 82 en Euroleague dont une finale terminée avec 20 points au compteur, deux titres continentaux, un surnom « King Solomon » sans équivoque, d’innombrables orgies offensives entre 2002 et 2008, des dizaines de finale à travers l’Europe… et une Leaders Cup de Pro B. Depu

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Cent quinze apparitions en NBA, 82 en Euroleague dont une finale terminée avec 20 points au compteur, deux titres continentaux, un surnom « King Solomon » sans équivoque, d’innombrables orgies offensives entre 2002 et 2008, des dizaines de finale à travers l’Europe… et une Leaders Cup de Pro B.

Depuis le temps qu’il est arrivé à Antibes, voir Will Solomon dans le paysage de la Ligue Nationale de Basket est devenu une habitude. Mais que l’on ne s’y trompe pas, celui qui a démarré sa carrière NBA à Memphis en même temps que Pau Gasol est bien une incongruité en France. Rencontre avec un homme tombé amoureux de la Côte d’Azur, meneur titulaire de la sélection étrangère du dernier All-Star Game, preuve qu’il en a encore sous la semelle d’un point de vue sportif…

Will, à 38 ans, tu entames ta seizième saison professionnelle. Est-ce que tu arrives à conserver le même enthousiasme que lors de tes débuts ?

Oui, bien sûr ! Je suis toujours excité quand une saison commence. Je suis toujours aussi heureux de jouer au basket, c’est quelque chose que j’adore. Je vais continuer à le faire jusqu’à ce que je ne sois plus en mesure de jouer. Mais c’est sûr que je me sens différent par rapport à mes débuts. J’ai beaucoup plus d’intelligence de jeu, je comprends beaucoup plus de choses maintenant, que ce soit purement basket ou simplement comment gérer mon énergie et mon corps.

Qu’est-ce qui t’a motivé à rester une quatrième saison d’affilée à Antibes ?

C’est un super club qui met tout en œuvre pour que l’on se sente bien, comme en aidant ma famille. C’est un tout : l’ambiance, le climat, tous les avantages du sud de la France. Tout ne tourne plus autour de moi maintenant, l’important est que ma famille soit à l’aise.

Que penses-tu de l’équipe antiboise de cette saison ?

On a un groupe de jeunes et un groupe de vétérans. Je pense que la saison va bien se passer. Les jeunes sont motivés, enthousiastes, ils ont des tas de choses à prouver à l’Europe du basket. Ils ont des rêves de NBA et ils donnent tout pour y arriver. Ça me rappelle ma première saison en Europe, lorsque je donnais tout pour pouvoir retourner en NBA. Nous avons des gars qui sont prêts à travailler, mais aussi à se sacrifier pour l’équipe. Pour eux, sky is the limit !

« On va tenter de viser les playoffs et qui sait ce qui peut se passer après ? »

Qu’est ce que tu penses d’Isaia Cordinier ?

C’est un jeune athlétique qui peut faire beaucoup de choses sur un terrain de basket. Et surtout, il travaille ! Sa draft l’a motivé, son objectif est d’aller en NBA. Je m’attends à ce qu’il fasse de grandes choses cette saison.

Ton entraîneur, Julien Espinosa, a six ans de moins que toi. Ce n’est pas une situation un peu bizarre ?

Il est jeune, oui, mais il connait le basket et je respecte les choses qu’il met en place. Ce n’est pas difficile de travailler avec quelqu’un qui s’y connait et qui est prêt à s’investir énormément. Lui aussi est enthousiaste. Quand tu baignes dans une atmosphère où tout le monde est motivé, cela facilite les choses.

Quel est votre objectif cette saison ? Un maintien tranquille, les playoffs ?

On ne peut pas simplement se contenter du maintien. On l’a fait l’année dernière sans difficulté, malgré une équipe avec des gars qui ne jouaient pas ou qui n’étaient pas vraiment au niveau. On va tenter de viser les playoffs et qui sait ce qui peut se passer après ? Vous le savez, on ne peut jamais prédire qui remportera le championnat de France…

A ton âge, est-ce difficile de continuer à rester performant dans un championnat aussi physique que la Pro A ?

Je comprends le basket et ça facilite les choses. Aussi, cela fait trois ans que je suis à Antibes, cette stabilité compte. Je me sens bien, aussi incroyable que cela puisse paraître. Physiquement, je n’ai pas de problèmes, je n’ai jamais eu de blessures extrêmement graves, Dieu merci, donc j’espère que ça va continuer.

« L’impression que personne ne pouvait me stopper »

Revenons un peu sur ta longue carrière. Il y a quinze ans, tu as été drafté en 33e position par les Vancouver Grizzlies. C’était un rêve qui se réalisait ?

Bien évidemment, mais tout est arrivé si vite. Dès ma deuxième saison en NCAA à Clemson, je me suis retrouvé meilleur marqueur de la conférence ACC et avec une place dans le cinq idéal. En fait, je n’étais pas du tout préparé à jouer en NBA. J’avais les atouts physiques pour exister en NBA mais pas le bon état d’esprit. Cela m’a amené en Europe. Une fois arrivé ici, je suis tombé amoureux de l’Europe simplement parce que j’avais le temps de jeu que je voulais. Je jouais à nouveau 35 minutes par match comme à l’université, pas 15 comme en NBA. J’aime tellement jouer que je suis resté.

De 2002 à 2008, cela ont été les années les plus fastes de ta carrière ?

Oui, j’ai commencé par remporter deux coupes européennes : la coupe FIBA (C3) en 2003 avec l’Aris Salonique puis la Coupe ULEB (C2) en 2004 avec l’Hapoel Jérusalem. Cela m’a permis après de découvrir l’Euroleague avec l’Efes Pilsen, on a perdu en playoffs contre le Panathinaikos mais c’était une bonne saison. J’avais tellement envie de remporter l’Euroleague que je suis ensuite parti pour le Maccabi Tel-Aviv. J’étais prêt à sacrifier beaucoup de choses pour gagner l’Euroleague, le seul titre européen des trois qui me manquait. Mais on a perdu en finale contre le CSKA Moscou (69-73 à Prague, 20 points à 8/14 pour Solomon). Si l’on parle d’années fastes, mes deux saisons au Fenerbahçe ont vraiment été les plus belles de ma carrière avec beaucoup de trophées en Turquie. Les supporters m’ont surnommé « King Solomon » et c’était juste incroyable.

Est-ce que tu as réalisé que c’était incroyable d’empiler les titres de cette manière-là ou est-ce que cela te paraissait banal ?

J’étais impressionné après le premier titre. Mais en fait, j’ai appris le jeu européen si vite que ma confiance était infinie par la suite, notamment lors de ma deuxième saison. J’avais l’impression que personne ne pouvait me stopper (Ndlr : pour la demi-finale retour de la Coupe ULEB, Solomon est monté jusqu’à 45 d’évaluation). En finale, j’avais tellement de détermination que l’on a pu terrasser le puissant Real Madrid (83-72). Ensuite, pour le reste de mes titres, l’expérience est la clé, elle facilite grandement les choses.

« Je ne tenais pas spécialement à retourner en NBA »

Tu as joué dans certaines des salles les plus chaudes d’Europe que ce soit à Salonique, à Tel-Aviv ou à Istanbul. C’était quelque chose que tu recherchais ?

Exactement, en plus d’évoluer dans de belles villes, j’ai joué devant les publics les plus impressionnants d’Europe. J’ai appris lors de ma première saison à Salonique à quel point les supporters sont importants ici. Alors ensuite oui, je ne voulais aller que dans des équipes qui avaient de vrais fans. La seule exception à la règle, c’était Efes Pilsen. Il y avait du monde dans la salle mais ce n’était pas des supporters comme à Salonique, Jérusalem ou au Fenerbahçe.

En 2008, tu es retourné en NBA à l’âge de 30 ans. C’est rare de pouvoir décrocher un contrat à cet âge-là. Comment est-ce que tu as su convaincre les Raptors ?

Honnêtement, après les deux saisons que je venais de réaliser avec le Fenerbahçe, je n’avais pas à convaincre la NBA de me reprendre. Je ne tenais pas spécialement à y retourner : je me sentais bien en Europe, j’y étais à l’aise aussi bien sur le parquet qu’en dehors. J’ai pris cette décision pour ma famille restée aux Etats-Unis. Ils voulaient vraiment que je signe pour qu’ils puissent me voir jouer, ce qu’ils n’avaient pas pu faire pendant très longtemps. Ils ont insisté donc je suis revenu en NBA mais au fond de moi, j’aurais préféré rester en Europe.

Tu n’as donc pas tellement apprécié tes deux saisons en NBA ?

Si, si ! J’ai vraiment profité de ma première année à Memphis, tout était nouveau pour moi. Mais j’aime tellement la balle orange que ce n’était plus possible d’être dans l’Association pour s’asseoir sur le banc et jouer 14/15 minutes par match. La NBA ne me satisfaisait pas. Ma carrière était en Europe. A la fin de ma deuxième saison à Sacramento, le Fenerbahçe n’arrêtait pas de m’appeler en me disant que les Kings ne savaient pas m’utiliser et qu’il fallait que je revienne. J’ai réussi à convaincre Sacramento de me libérer et je suis revenu au Fener.

« Une maison à Antibes, c’est un must ! »

Avant de venir à Antibes, tu as eu des moments difficiles en Ukraine et en Turquie non ?

Je me suis blessé en Ukraine, j’avais un problème à la jambe et je n’ai pas pu jouer pendant huit mois. Et avant cela, je n’avais pas joué depuis mon départ du Fenerbahçe, soit un an. Cela fait pratiquement deux années sans jouer. Quand je suis arrivé à Mersin, j’étais encore blessé alors mon passage là-bas s’est, en gros, résumé à de la rééducation.

J’imagine que tu es fier de ce que tu as accompli au cours de ta carrière ?

Je dirais que je suis content. J’ai réussi à évoluer dans les deux meilleurs championnats du monde, l’Euroleague et la NBA. J’aime vraiment jouer et j’espère que je pourrais continuer. Je veux essayer d’atteindre les 20 saisons professionnelles, comme Kobe (il rit).

Cela t’emmènerait jusqu’en 2020/21…

Eh oui mais je ne sais pas. Je prends saison après saison. Tant que je me sens bien, je continuerai. Mais évidemment, il faut avoir une équipe qui t’aime bien et veut te compter dans ses rangs. J’arrêterai quand on ne voudra plus de moi.

Tu as déjà des idées pour ta reconversion ?

J’en ai plusieurs, pourquoi pas devenir coach ou agent.

En gardant une maison à Antibes ?

Oui, bien sûr. C’est un must ! C’est ma quatrième saison ici alors Antibes est vraiment ancré dans l’identité de notre famille maintenant. Mais plus que ça, j’aime tout le sud de la France, pas seulement Antibes. Tu peux aller à la mer, tu peux bien manger, tu peux vraiment sortir et profiter de la vie.

Sa fiche d’identité

Américain – Poste 1 – 1,87 m – Né le 20 juillet 1978 à Hartford (Connecticut).

Son parcours : Clemson University (NCAA, 1998/01), Memphis Grizzlies (NBA, 2001/02), Aris Salonique (Grèce, 2002/03), Hapoel Jerusalem (Israël, 2003/04), Efes Pilsen Istanbul (Turquie, 2004/05), Maccabi Tel-Aviv (Israël, 2005/06), Fenerbahçe Istanbul (Turquie, 2006/08), Toronto Raptors (NBA, 2008/09), Sacramento Kings (NBA, 2009), Fenerbahçe Istanbul (Turquie, 2009), Hapoel Jerusalem (Israël, 2010/11), Cherkasky Mavpy (Ukraine, 2011/12), Mersin (Turquie, 2012/13), Antibes (Pro A et Pro B, 2013/16)

Son palmarès : Vainqueur de la FIBA Eurocup en 2003, vainqueur de la Coupe ULEB en 2004, triple champion de Turquie (2005, 2007 et 2008), vainqueur de la Coupe d’Israël en 2006, champion d’Israël en 2006, All-Star du championnat turc en 2007, vainqueur de la Coupe du Président en Turquie en 2008, vainqueur de la Leaders Cup Pro B en 2015, All-Star de Pro A en 2015.

Photo : LNB

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