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Christian Devos nous raconte le BCM Gravelines: « 60, 70 personnes masquées ont tourné autour du terrain pendant tout le match »

Coach à Grand-Fort puis à Gravelines, aujourd’hui président tout en étant adjoint aux sports, Christian Devos, 67 ans, est le fil rouge du BCM. L’homme idéal pour nous faire revivre son histoire et tout autant regarder vers l’avenir. L’interview est en deux parties. Retrouvez également les salaires

Coach à Grand-Fort puis à Gravelines, aujourd’hui président tout en étant adjoint aux sports, Christian Devos, 67 ans, est le fil rouge du BCM. L’homme idéal pour nous faire revivre son histoire et tout autant regarder vers l’avenir.

L’interview est en deux parties. Retrouvez également les salaires des joueurs du BCM.

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Après les 40 points pris au Mans, les 4 défaites d’affilée, avez-vous pensé que vous couriez à la catastrophe, que vous n’aviez pas fait le bon choix du coach, que le recrutement n’était pas bon, etc ?

Pour être honnête, je dirai non. Dans ma position je ne veux pas aller trop vite dans les prises de décision. C’est une situation que l’on a analysé à la fois avec le staff et le conseil d’administration pour décider d’une nouvelle orientation. On s’est tout de suite rendu compte que le bât blessait à l’intérieur (NDLR : le BCM a engagé Chris Otule le 26 octobre). Ensuite est arrivé le départ un peu prématuré de DJ Cooper dont l’intégration ne s’est pas aussi bien déroulée qu’on pouvait l’espérer alors qu’il n’y avait aucun problème particulier. D.J. a changé d’agent et puis il a colporté des propos à son premier agent qui lui les a divulgués et qui ont été négatifs par rapport aux uns et aux autres alors que je le rencontrais chaque semaine une heure et demie et on a toujours eu de très bonnes relations. Quand Paul Masson (NDLR : le vice-président) m’a téléphoné de Monaco en me disant qu’il risquait de le prendre aucun différent existait entre nous. Bouna (Ndiaye), qui était devenu son nouvel agent, a traité ça en consensus pour que tout se passe bien.

Ce n’est pas un problème d’acclimatation au club ou à la ville ?

Non, non ! Le problème d’acclimatation c’est à l’équipe car Cooper ce n’est pas un meneur organisateur, un meneur d’hommes qui met en place, c’est un meneur créateur qui a besoin autour de lui de jumpeurs, des joueurs un peu fous qui sont capables de réagir à ses transmissions et nous n’avions pas ces joueurs-là. Il s’est lassé rapidement de la conception de l’équipe. Ensuite ça s’est passé naturellement.

Gravelines est une petite ville (11 500 habitants) mais la plupart des Américains aiment bien y vivre car ce n’est pas loin de la Belgique, de Londres, et même de Paris ?

On a eu des soucis avec les Américains quand ils venaient avec leurs épouses qui elles étaient habitués à vivre dans un contexte plus large, plus intéressant avec des magasins. Sinon c’est vrai que c’est une ville très agréable. Là, son gamin était à l’école de mini-basket chez nous, son épouse l’accompagnait régulièrement. Je ne pouvais pas penser que ça allait arriver.

A l’inverse, pourquoi sans lui l’équipe a-t-elle retrouvé subitement son mordant ?

Il y avait autour de lui des joueurs de talent, Terry Allen, Benjamin Sene, qui n’avaient pas pu s’exprimer au début comme on l’espérait, car quand une équipe boîte tout le monde boîte. Ce départ les a libérés et ils ont apporté beaucoup plus. On avait aussi un joueur qui était en progression constante depuis sa blessure, Quentin Serron, et qui a commencé à s’exprimer à 100%. En ce que le concerne, c’est une coïncidence.

« Dainius Adomaitis faisait partie des six, sept coaches de la short list »

Christian Monschau avait fait un très long bail comme coach (2008 à 2017). Comment avez-vous envisagé son remplacement dans un premier temps ? Avez-vous vraiment espéré que Vincent Collet vienne au BCM ?

Quand avec Christian on a décidé de ne pas reconduire le contrat, ça a libéré nos esprits, l’ensemble des opportunités extérieures. On a listé les entraîneurs qui seraient intéressés. On a eu vingt-et-un contacts d’entraîneurs qui nous ont sollicités. Ce n’est pas Vincent qui nous a sollicités mais c’est nous qui l’avons fait. On l’a rencontré, on a passé une soirée ensemble, on a discuté longuement avec lui, les échanges étaient constants. On lui a fait des propositions, on espérait car un moment il n’était pas repris par Strasbourg.

Que devient Christian Monschau depuis son départ du BCM ?

Il avait acheté une maison en Bretagne, je pense qu’il l’occupe. Il avait annoncé qu’il prendrait un recul de quelques mois car les derniers mois il a souffert particulièrement. Je pense qu’il a retrouvé une santé. Je ne sais pas s’il se remettra sur le marché.

Cibler le coach de l’équipe de France, le plus prestigieux, le mieux payé pour finalement faire de son adjoint, Julien Mahé, son coach principal, c’est curieux comme démarche ?

Pour prendre le moins cher… (sourire) On a donc établi une liste par rapport aux vingt-et-une candidatures, on a eu des contacts par téléphone, on a rencontré six coaches. Pour la short list, il y avait Vincent, Neno Asceric (NDLR : coach alors à Lille), et Julien Mahé nous a fait également une demande. Je le connaissais bien, j’ai assisté à toutes les rencontres des espoirs, les finales. Je commençais à cerner un peu l’individu sans que ce soit péjoratif. Je voyais qu’il était ambitieux, positif, volontaire, qu’il travaillait énormément et pour moi c’est un critère de réussite surtout quand on est jeune. Ça me rappelait les possibilités que j’avais eu à une époque.

Vous avez envisagé de faire revenir comme coach Dainius Adomaitis, qui a passé quatre saisons au BCM et qui est coach aujourd’hui de la Lituanie ?

Dainius faisait partie des six, sept coaches de la short list. On a hésité car il était aussi entraîneur d’une équipe nationale avec toutes les fenêtres que ça allait impliquer et qui allaient certainement perturber l’organisation. C’est la raison pour laquelle on n’a pas continué d’ouvrir vers lui. C’est un basketteur, un garçon très intelligent dans la vie. Il adorait Gravelines. Ses enfants ont appris le français chez nous. Lui se cultivait à la manière de notre façon de vivre. Il était à la fois intéressé et intéressant.

« Le vendredi soir on aménageait des parpaings et des grands morceaux de bois pour pouvoir surélever le public. Tout le monde était debout sinon une rangée assis pour les VIP »

Venons-en à vous. Vous êtes un pur nordiste ?

Je suis né à Dunkerque et j’ai fait quasiment toute ma carrière ici. Dunkerque, Grande-Synthe, Grand-Fort, Gravelines. Je me suis éloigné pour le service militaire prolongé. J’ai été adjoint à Grand-Fort en 1980 et j’ai pris l’équipe de 82 à 85. On a créé alors le BCM. C’était l’entente Basket Club Maritime. Ce jusqu’en 1990 quand Jean Galle m’a remplacé.

Vous avez été donc coach à Grand-Fort qui est juste séparé de Gravelines par le Chenal. Il y avait là-bas une ambiance infernale. Vous avez déclaré un jour que les jours de défaites vous n’aviez qu’une chose à faire, remonter dans votre voiture et partir au plus vite ?

Tout d’abord Grand-Fort c’était une ville de 3 500 habitants. On avait une salle de 800 places mais on mettait 1 800 personnes lors de certaines rencontres. A l’époque, il y avait moins de règles qu’aujourd’hui. Le vendredi soir on aménageait des parpaings et des grands morceaux de bois pour pouvoir surélever le public. Tout le monde était debout sinon une rangée assis pour les VIP. Notre directeur sportif Maurice Landrin avait récupéré des sièges en bois de cinéma. C’était extraordinaire. Il était très difficile de nous battre. Je n’ai connu qu’une seule défaite lors des quatre ans que j’ai vécu là-bas, c’était en coupe de France contre Chatou. On a même réalisé quelques exploits contre le Stade Français de (Dave) Bustion, (Laurent) Dorigo. On avait pris une raclée là-bas et on a été capable de gagner chez nous avec tous les gamins du village car c’était des joueurs du cru plus un Américain car on n’avait pas toujours les moyens d’en avoir deux.

Le plus célèbre des joueurs de Grand-Fort c’est Yves-Marie Vérove ?

Il est né et il a joué à Grand-Fort en Fédérale mais il est parti très jeune à Berck, je ne l’ai pas connu. On a fait Nationale 3, 2, 1B et 1A avec neuf joueurs du cru sur douze. Et même dix avec moi car j’étais entraîneur-joueur. On avait un entraîneur au départ qui était Michel Courmont et qui était fan de basket américain. On vivait à l’américaine dans un quartier de maisons difficile. En 80, Michel et moi sommes partis aux Etats-Unis vivre en université car on voulait voir comment ça se passait là-bas à Marshall. Villeurbanne avait déjà gagné onze titres de champion mais il n’arrivait pas à la cheville de Marshall et nous on n’arrivait pas en-dessous de la semelle des chaussures des joueurs de Marshall. C’était déjà un basket très développé avec un staff considérable. On a vu des entraînements, des matches, discuté avec le head coach. A cette époque très peu d’entraîneurs allaient là-bas, on faisait partie des pionniers qui allaient aux Etats-Unis.

Au moment de la fusion entre Gravelines et Grand-Fort, combien de joueurs de Grand-Fort sont passés au BCM ?

On a quitté Grand-Fort avec huit joueurs, il y avait (Michel) Herlem, (Jean-Charles) Hannequin, (Marcel) Briche, tous les gamins du village qui avaient été formés par Michel Courmont plus un joueur de Gravelines, Stéphane Sauvage. On a gravi les échelons et on est arrivé à 9 joueurs du pays sur 12 en Pro A.

Les premières années à Sportica, le public criait « Grand-Fort ! » comme à Pau au début du palais des sorts il criait « Orthez ! » ?

Il y a toujours du public de Grand-Fort mais beaucoup moins. Les anciens sont décédés. Mais nous avons une équipe réserve du BCM qui joue à Grand-Fort. Le club en association c’est Gravelines-Grand-Fort et Gravelines-Dunkerque en SEM pour les pros.

Les plus gros derbies du BCM, c’était contre Saint-Quentin. Vous pouviez déplacer une quinzaine de bus là-bas et réciproquement. C’était à quelle époque ?

On a joué contre eux en Nationale 2 puis en Pro B et Pro A. On a joué contre eux les qualifications pour les playoffs notre première année en Pro A. On gagne de dix points à l’aller mais je perds sur blessure Sam Williams, qui était l’un des meilleurs joueurs chez nous et on est battu en deux manches. Les joutes contre Saint-Quentin c’était extraordinaire par l’ambiance, les Mimiles de Saint-Quentin, les irréductibles de Grand-Fort et Gravelines. On retrouve un peu avec Le Portel et Gravelines le phénomène qui existait il y a une trentaine d’années. Lors du premier derby l’année dernière, j’avais dit qu’il fallait vivre ça pleinement et que j’espérais que l’on se retrouve tous ensemble à la fin du match sur le parquet. On a gagné, ça aurait pu être l’inverse, et les deux kops se sont retrouvés ensemble pour chanter une demi-heure après le match, ce que l’on vivait à Grand-Fort et à Gravelines au début contre Saint-Quentin.

« A l’époque de Grand-Fort, c’était très difficile pour l’équipe adverse de venir dans la salle une heure avant pour s’échauffer »

A part à Limoges, c’est bien gentillet aujourd’hui en France, y compris à Sportica ou dans le Chaudron du Portel si on compare aux années 70 ou 80 ? Il n’y a plus la même dureté…

A l’époque de Grand-Fort, c’était très difficile pour l’équipe adverse de venir dans la salle une heure avant pour s’échauffer. C’était une petite salle et les joueurs étaient pressurisés par l’ambiance de notre public, par sa proximité. Les équipes adverses devaient s’échauffer dehors en courant dans la nature. Sans être présomptueux, on avait presque gagné le match avant l’heure. Les spectateurs étaient si proches du terrain qu’ils pouvaient arracher les poils des jambes des joueurs adverses quand ils faisaient une remis en jeu !

Depuis quand ont été créé les Loups de Mer, l’orchestre du BCM ?

Depuis l’époque de la Nationale 2. C’est l’harmonie municipale qui a mis à disposition quelques instrumentistes qui ont créé les Loups de Mer qui ont toujours été présents depuis. Ensuite sont venus s’ajouter les Irréductibles, le club des supporters. Au début ils étaient séparés de chaque côté de la salle et on les a rapprochés pour que ça fasse un kop un peu plus conséquent. Et par moments, je me demande s’il ne faut pas les séparer de nouveau pour que ça fasse de l’ambiance de chaque côté.

Depuis quand date le fait de jouer l’hymne co-Pinard les jours de victoire ?

J’ai toujours connu ça particulièrement en période de Carnaval. Avant c’était sur un laps de trois mois, de fin janvier à fin mars. On jouait toutes les chansons du Carnaval pendant le match et en cas de victoire l’hymne co-Pinard.

Que représente pour le BCM les matches du Carnaval en termes de recettes, de visibilité ?

Ils sont moins efficaces qu’ils ne l’étaient auparavant quand 80% des tribunes étaient déguisées, grimées, masquées. Avant les problèmes de Vigipirate, on pouvait se masquer, on n’a plus le droit. Les gens venaient avec leurs parapluies. Je me souviens d’un match où l’on jouait en Nationale 2 avec Ernie Signars et Larry Lawrence. Il y avait 60, 70 personnes masquées qui ont tourné autour du terrain pendant tout le match. C’est vrai qu’on avait un matelas, on n’avait perdu qu’une seule rencontre sur vingt-quatre et on était sûr de monter en Pro B. Les règles ont changé, on n’a plus le droit de faire ça. On avait une équipe très forte mentalement. Pour la présentation d’un match, je m’étais déguisé en Larry Lawrence et Larry Lawrence s’était déguisé avec ma veste rouge, c’est lui qui coachait. Ce n’était pas pour minimiser l’adversaire, c’était parce qu’on avait un enthousiasme débordant.

Aujourd’hui, vous faites des maillots spéciaux pour le Carnaval ?

Oui, c’est notre sponsor qui a voulu créer un maillot spécial Carnaval, un maillot chamarré avec des couleurs vives, dynamiques. C’était Kipsta et maintenant c’est Tarmak qui est toujours une filiale de Décathlon, qui est venu spécifique basket alors que Kipsta est passé au football. Ça a donné un nouvel engouement, les télévisions sont souvent présentes pour cette rencontre-là même si l’ambiance est moins performante qu’elle était auparavant du fait que le Carnaval s’étale tellement que les gens sont usés par la fête.

D’où vient le public du Sportica ?

La zone de chalandise s’est beaucoup agrandie : l’Audomarois est un bon filon pour recruter, le Calaisis, le Dunkerquois, et la Flandres intérieure c’est-à-dire Hazebrouck, Armentières. Un peu moins du côté de Boulogne et Le Portel puisque les deux villes ont évolué au plus haut niveau. Ce n’est plus aussi concentré Grand-Fort-Philippois-Gravelinois. On a aussi de gros sponsors qui viennent de Lille et c’est la raison pour laquelle on tente de jouer à 20h30 le vendredi soir pour permettre à nos sponsors et leurs fidèles clients de nous rejoindre. Lille c’est à 80km alors avec les embouteillages, on décale les matches.

Suite et fin de l’interview demain.

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Après les 40 points pris au Mans, les 4 défaites d’affilée, avez-vous pensé que vous couriez à la catastrophe, que vous n’aviez pas fait le bon choix du coach, que le recrutement n’était pas bon, etc ?

Pour être honnête, je dirai non. Dans ma position je ne veux pas aller trop vite dans les prises de décision. C’est une situation que l’on a analysé à la fois avec le staff et le conseil d’administration pour décider d’une nouvelle orientation. On s’est tout de suite rendu compte que le bât blessait à l’intérieur (NDLR : le BCM a engagé Chris Otule le 26 octobre). Ensuite est arrivé le départ un peu prématuré de DJ Cooper dont l’intégration ne s’est pas aussi bien déroulée qu’on pouvait l’espérer alors qu’il n’y avait aucun problème particulier. D.J. a changé d’agent et puis il a colporté des propos à son premier agent qui lui les a divulgués et qui ont été négatifs par rapport aux uns et aux autres alors que je le rencontrais chaque semaine une heure et demie et on a toujours eu de très bonnes relations. Quand Paul Masson (NDLR : le vice-président) m’a téléphoné de Monaco en me disant qu’il risquait de le prendre aucun différent existait entre nous. Bouna (Ndiaye), qui était devenu son nouvel agent, a traité ça en consensus pour que tout se passe bien.

Ce n’est pas un problème d’acclimatation au club ou à la ville ?

Non, non ! Le problème d’acclimatation c’est à l’équipe car Cooper ce n’est pas un meneur organisateur, un meneur d’hommes qui met en place, c’est un meneur créateur qui a besoin autour de lui de jumpeurs, des joueurs un peu fous qui sont capables de réagir à ses transmissions et nous n’avions pas ces joueurs-là. Il s’est lassé rapidement de la conception de l’équipe. Ensuite ça s’est passé naturellement.

Gravelines est une petite ville (11 500 habitants) mais la plupart des Américains aiment bien y vivre car ce n’est pas loin de la Belgique, de Londres, et même de Paris ?

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