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Interview : François Gomez (Tarbes) : « On n’a jamais annoncé que l’on sera champion de France mais on défendra chèrement notre peau »

Le Tarbes Gespe Bigorre est en finale des playoffs face au Tango Bourges Basket. Ce soir les Violettes tenteront de gagner un match au Quai de l’Adour pour éviter un coup de balai, 0-3. Quoiqu’il en soit, leur saison est admirable. Personne ne les imaginait aller si loin dans la compétition en infli

Le Tarbes Gespe Bigorre est en finale des playoffs face au Tango Bourges Basket. Ce soir les Violettes tenteront de gagner un match au Quai de l’Adour pour éviter un coup de balai, 0-3. Quoiqu’il en soit, leur saison est admirable. Personne ne les imaginait aller si loin dans la compétition en infligeant à Villeneuve d’Ascq et Charleville deux manches sèches à zéro.

A l’origine de cette success story, le coach François Gomez, 58 ans, qui a été élu Entraîneur de l’Année neuf ans après son premier trophée.

Aujourd’hui, il nous parle de la finale et de l’avenir de son équipe. Demain, il évoquera sa carrière avec une premier chapitre au TGB et aussi son expérience en tant que sélectionneur de l’équipe de Suède.

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Sur les deux premiers matchs, Bourges a donné l’impression d’un bloc indestructible, fort en défense et avec plein de solutions en attaque. C’est aussi l’impression vue du banc ?

J’essaye d’être pragmatique. On doit jouer cette finale avec l’espoir de gagner. Ceci étant, force est de constater que l’adversaire est d’un niveau supérieur. Le niveau de jeu global de Bourges offensif et défensif est celui d’une équipe d’Euroleague. Toutes les joueuses qui la composent ont fait ou font du très haut niveau. Elles sont dans des équipes nationales et généralement sur les podiums. Bourges a repris le leadership du basket féminin et puis il y a les autres. Je constate que lors de la demi-finale à Lyon, elles ont aussi gagné de vingt points. Elles ont beaucoup de ressources offensives, des joueuses cadres qui sont à leur meilleur niveau. Je pense à Marine Johannès et Valériane Ayayi mais aussi à Diandra Tchatchouang qui dans toute sa discrétion est magnifique dans ce qu’elle fait. Elles sont au sommet de leur art, c’est tant mieux pour le basket français et c’est de bon augure pour le mois de septembre (NDLR : Coupe du Monde en Espagne). Je pense aussi à la maitrise en marchant de Laia Palau et je rappelle que c’est encore une des meneuses de l’équipe espagnole qui est sur tous les podiums mondiaux, même si elle a décidé de passer la main. Même si le secteur intérieur paraît moins bien, on connaît le palmarès d’Elodie Godin, la qualité de l’internationale Katherine Plouffe, Alexia Chartereau est un futur poste 4 de très haut niveau. Au basket contrairement au foot, on ne peut pas défendre à onze derrière, attendre qu’il y ait une opportunité pour jouer une contre-attaque et marquer le seul but de la partie. Au basket, généralement c’est le meilleur qui gagne. On n’a jamais annoncé que l’on sera champion de France mais on défendra chèrement notre peau. Bourges n’a jamais été aussi près d’un nouveau titre de champion de France. Mais là on joue à la maison pour peut-être pas la gagner mais réussir cette finale. On ne l’a pas trop fait sur les deux premiers matchs à Bourges. On a réussi des parties de match comme notre entame lors du deuxième match mais où on a craqué malheureusement à une minute de la pause. Ça peut rassurer des gens qui se demandent ce qu’on fait là. Cette fois, on joue à la maison, on a fait une superbe saison et on a toujours envie de créer des problèmes. Mais à côté de ça, on est loin de ce que propose aujourd’hui une équipe comme Bourges.

Vous espérez que le fait de jouer à domicile va galvaniser votre équipe, lui faire oublier la fatigue, le fait qu’il y a des rotations moins fortes ?

Quelqu’un m’a dit, toi tu joues avec une équipe et elles, elles ont en deux. Peut-être, c’est comme ça. Elles ont la possibilité d’avoir dix ou onze joueuses d’un niveau équivalent. Et ce ne sont pas que les rotations, on peut aussi comparer les Cinq Majeurs. Nous on a de très bonnes joueuses sur le territoire, on a fait une bonne saison, mais Bourges a une très bonne équipe d’Euroleague.

Et elles sont toutes en bonne santé, il n’y a pas de blessées, au point qu’elles ont deux meneuses espagnoles au lieu d’une en début de saison ?

Oui, la pigiste c’est Laia Palau et on la garde ! Et derrière il y a KB Sharp, moi je la prends tout de suite, KB Sharp ! Je ne veux pas comparer ce qui n’est pas comparable. On ne compare pas l’effectif des Herbiers ou même celle de Lille avec celui du PSG. On verra demain soir (NDLR : ce soir) mais on doit pouvoir réussir ce troisième match et si on le réussit vraiment bien, pourquoi ne pas envisager de faire une deuxième partie chez nous, ce qui serait magnifique ? Il y a le public mais je ne crois pas que ça va galvaniser les filles. A quel moment peut-on reprocher aux Tarbaises de ne pas avoir tout donné lors des deux premiers matchs ? C’est pour ça qu’il y a de la frustration, de la déception, que l’on est un peu groggy, c’est que l’on est dans une situation sans solution. Ce qui s’est passé n’est quand même pas bon pour le moral (sourire). Mais je pense que l’on peut faire mieux demain. Des filles sont passées beaucoup à côté lors des deux premiers matchs, certaines découvrent le truc et se disent qu’il faut qu’elles en fassent un peu plus. La prise de conscience est faite. Je suis convaincu que demain mes joueuses vont montrer un autre visage.

« Aby Gaye est au centre du projet tarbais »

Prenons un cas particulier, celui de l’Américaine Angie Bjorklund, qui est passée à travers les deux premiers matchs puisqu’elle en est à 3,5 points à 3/11 en deux matchs, mais surtout l’aviez eu à Perpignan, elle était entrée ensuite dans le staff de l’université de Gonzaga, et elle a accepté trois ans plus tard de rejouer pour vous à Tarbes ?

En fait, elle sortait d’université avec un titre NCAA avec Tennessee, elle est venue jouer en Israël, et à 23 ans, elle était à Perpignan. Elle fait une saison et en fait son projet post-basket c’est l’accompagnement psychologique, le coaching auprès de jeunes basketteuses et basketteurs et elle a commencé ce boulot-là. Elle n’a pas joué au basket pendant trois saisons. Et puis, la saison dernière, quand j’ai fait venir Aby Bishop qui avait joué avec elle à Perpignan -elles étaient très copines-, c’est elle qui m’a recontacté en me disant : « je vois bien que tu es en difficulté, si tu veux, je reviens, ce n’est pas un problème d’argent ». Quand j’ai entendu ça, j’ai tout de suite sauté dessus, l’année dernière on en n’avait pas. Je lui ai proposé de faire une année en plus et elle a relancé sa carrière puisqu’on sait aujourd’hui qu’elle a signé à Villeneuve d’Ascq qui est un des gros clubs français. Elle est repartie pour quelques saisons de basketteuse alors que sa reconversion est déjà entamée.

Il y a deux joueuses qui ont fait d’importants progrès. La première c’est Aby Gaye qui est annoncée depuis quelques saisons comme la future Isabelle Yacoubou mais qui est à chaque fois recalée en équipe de France ?

Quand elle arrive ici elle n’a que 22 ans et je sais que pour les joueuses de grande taille, pour avoir eu Helena Ciak et Isabelle Yacoubou, elles émergent bien après. Quand on est champion, Isa a 24 ans. Tout ce qu’elle fait au niveau international c’est après. Helena Ciak émerge beaucoup plus tard. Aby Gaye est un prospect énorme mais elle est arrivée comme jeune joueuse à Toulouse, elle n’a pas joué, à Villeneuve d’Ascq, elle a peu joué, elle était dans les rotations. Là, elle est au centre du projet tarbais avec un deal, « tu viens, tu t’entraînes et tu joues et en contre-partie, tu progresses et tu fais gagner l’équipe. » Ce n’est pas la seule mais sans elle, on n’en serait pas là. C’est un pivot incontournable avec encore de gros apprentissages à effectuer. Elle y travaille sur les aspects techniques, physiques et mentaux. Elle a fait de très gros progrès de janvier jusqu’à maintenant et là, elle se retrouve dans une situation compliquée. Pourquoi ? En face, Elodie Godin est une joueuse d’expérience qui lui fait des misères. Quand elle a le ballon, il y a deux ou trois filles sur elle. Cela prouve tout le respect que Olivier Lafargue lui apporte. Il ne la laisse pas dans des situations de un-contre-un. A elle de gérer ces situations pour ne pas être frustrée. Elle a fait notamment deux fautes de frustration, elle a mis un moment un coup de coude dans la tronche de (Valériane) Ayayi. Pareil de l’autre côté avec Elodie Godin. Mais à mes yeux, elle est dans les années à venir le futur pivot de l’équipe de France si son évolution reste sur la même courbe ascendante. C’est quelqu’un d’intelligent, brillant, qui a de la personnalité, qui travaille.

La deuxième, c’est Adja Konteh, qui a obtenu sa première sélection en février contre la Slovénie et qui montre dans ces playoffs qu’elle a beaucoup de culot ?

Je la connais depuis qu’elle a 11-12 ans, c’est sa troisième année chez nous, elle a re-signé. J’ai un lien affectif avec elle et c’est pour ça que l’on s’engueule souvent. On a du tempérament, de la personnalité. Il y a trois ans, elle revenait d’une grave blessure et personne ne voulait d’elle, c’est pour ça qu’elle s’est retrouvée en Ligue 2. Je crois qu’elle avait besoin de confiance et je lui ai toujours assuré qu’elle avait quelque chose qui l’amènerait vers le plus haut niveau, c’est-à-dire l’équipe nationale. Elle m’a cru. Elle a du culot et surtout des choses que l’on ne voit pas beaucoup chez les filles : ce tir en suspension à trois-quatre mètres, cette agressivité, cette vitesse, ce mental de compétitrice. C’est pour ça qu’elle est ma capitaine et qu’elle fait très bien le travail. Elle a un discours toujours conquérant, quelque fois elle est capable de remuer dans les brancards avec les copines. Elle est devenue une joueuse mature sur et en dehors du terrain. Elle est belle à voir jouer, c’est une belle athlète et en plus elle fait des choses de grande esthétique et d’une grande efficacité qui lui a valu une sélection en équipe de France. Je vois Marine Johannès qui est de l’ordre de l’exception et Adja est juste derrière elle. C’est une joueuse qui est faite pour le haut niveau avec des jump shoots, de l’agressivité, de la capacité à défendre, un mental. On a la chance d’avoir une vraie internationale au TGB.

« On est dans la moyenne basse des budgets et quand on propose à Michelle Plouffe après la saison qu’elle vient de faire un salaire plus intéressant, évidemment ça l’attire »

Vous conservez Aby Gueye et Adja Konteh mais Michelle Plouffe sera la saison prochaine à l’ASVEL, Angie Bjorklund à Villeneuve d’Ascq, Ana Suarez à Nantes. Quand on est finaliste du championnat, on pourrait croire que l’on peut conserver ses meilleures joueuses mais en fait vous n’avez pas les ressources financières qui vous le permettent ?

C’est la rançon du succès. Si l’équipe gagne, c’est que l’on a de bonnes joueuses et celles-ci à un moment intéressent d’autres équipes. Christelle Diallo va aussi à Villeneuve, qui est champion de France en titre et qui va peut-être jouer l’Euroleague. C’est un club qui a des ressources économiques que nous n’avons pas et un club qui ces dernières années a gagné. Alors que nous, ces dernières années, on n’a pas trop gagné et cette année on a juste gagné le droit d’être en finale. On est dans la moyenne basse des budgets et quand on propose à Michelle Plouffe après la saison qu’elle vient de faire un salaire plus intéressant, évidemment ça l’attire. En plus cette année, ça été très particulier. Tout le monde s’est mis à la chasse, au recrutement dès janvier. Et nous on n’était pas du tout prêt à cette période-là, on ne savait pas si on allait jouer les playdowns, les playoffs, être européen l’année d’après et donc on ne savait pas quel budget on allait avoir. Aussi on n’a pas pu négocier avec les joueuses au moment où il y a eu appel d’offres.

La période de recrutement a commencé encore plus tôt que d’habitude ?

Oui, en janvier. Quand je discute avec mes collègues masculins, ça n’a presque pas encore commencé. L’Espagnole ça s’est fait très tôt. Nous, on savait qui on voulait garder mais on ne pouvait pas l’affirmer à 100% et surtout pas parler argent. On était sur le budget de la saison précédente qui était petit et on ne pouvait pas se projeter sur un budget plus important alors qu’il est évident qu’avec les résultats que l’on a eu depuis, une salle pleine, plus de partenaires, c’est différent. En plus le contexte local nous est favorable avec un rugby en souffrance, un football inexistant, et les garçons de N1 qui ont fait une saison très moyenne. Le TGB a repris le leadership. On aura donc plus d’argent. Si on pouvait négocier aujourd’hui, on pourrait peut-être garder ces joueuses-là ou du moins leur faire des propositions que l’on ne pouvait pas leur faire à l’époque. Il y a aussi Naomie Mbandu qui part aux Etats-Unis. On garde trois joueuses : Tima Pouye, Aby Gaye et Adja Konteh.

Quelle coupe d’Europe ferez-vous l’année prochaine ?

L’Eurocup. C’était l’objectif pour la saison prochaine et puis l’opportunité s’est présentée. On a fait les comptes et on a dit ‘on y va !’ car c’est bien pour une ville comme Tarbes de la faire.

Vous n’êtes donc pas qualifié pour l’Euroleague en tant que finaliste des playoffs ?

Il y a deux places qui sont octroyées pour l’Euroleague, sûres. Une au champion de France et l’autre au vainqueur de la Coupe de France. Et le premier de la saison régulière s’il y a une troisième place. Si c’est Bourges dans les trois cas, c’est Charleville en tant que deuxième de la saison régulière. Et s’il y a une troisième place, ils iront cherché Villeneuve d’Ascq, le troisième de saison régulière. Etre finaliste n’apporte rien du tout.

A suivre

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Sur les deux premiers matchs, Bourges a donné l’impression d’un bloc indestructible, fort en défense et avec plein de solutions en attaque. C’est aussi l’impression vue du banc ?

J’essaye d’être pragmatique. On doit jouer cette finale avec l’espoir de gagner. Ceci étant, force est de constater que l’adversaire est d’un niveau supérieur. Le niveau de jeu global de Bourges offensif et défensif est celui d’une équipe d’Euroleague. Toutes les joueuses qui la composent ont fait ou font du très haut niveau. Elles sont dans des équipes nationales et généralement sur les podiums. Bourges a repris le leadership du basket féminin et puis il y a les autres. Je constate que lors de la demi-finale à Lyon, elles ont aussi gagné de vingt points. Elles ont beaucoup de ressources offensives, des joueuses cadres qui sont à leur meilleur niveau. Je pense à Marine Johannès et Valériane Ayayi mais aussi à Diandra Tchatchouang qui dans toute sa discrétion est magnifique dans ce qu’elle fait. Elles sont au sommet de leur art, c’est tant mieux pour le basket français et c’est de bon augure pour le mois de septembre (NDLR: Coupe du Monde en Espagne). Je pense aussi à la maitrise en marchant de Paulau et je rappelle que c’est encore une des meneuses de l’équipe espagnole qui est sur tous les podiums mondiaux, même si elle a décidé de passer la main. Même si le secteur intérieur paraît moins bien, on connaît le palmarès d’Elodie Godin, la qualité de l’internationale Katherine Plouffe, Alexia Chartereau est un futur poste 4 de très haut niveau. Au basket contrairement au foot, on ne peut pas défendre à onze derrière, attendre qu’il y ait une opportunité pour jouer une contre-attaque et marquer le seul but de la partie. Au basket, généralement c’est le meilleur qui gagne. On n’a jamais annoncé que l’on sera champion de France mais on défendra chèrement notre peau. Bourges n’a jamais été aussi près d’un nouveau titre de champion de France. Mais là on joue à la maison pour peut-être pas la gagner mais réussir cette finale. On ne l’a pas trop fait sur les deux premiers matchs à Bourges. On a réussi des parties de match comme notre entame lors du deuxième match mais où on a craqué malheureusement à une minute de la pause. Ça peut rassurer des gens qui se demandent ce qu’on fait là. Cette fois, on joue à la maison, on a fait une superbe saison et on a toujours envie de créer des problèmes. Mais à côté de ça, on est loin de ce que propose aujourd’hui une équipe comme Bourges.

Vous espérez que le fait de jouer à domicile va galvaniser votre équipe, lui faire oublier la fatigue, le fait qu’il y a des rotations moins fortes ?

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Photos: François Gomez (FIBA), Aby Gaye et Tima Pouye (Bellenger/FFBB)

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