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[REDIFF] Sous médiatisée la Ligue Féminine ? Pas si sûr !

Une étude sur la Ligue Féminine, ses clubs, ses joueuses, ses compétitions, ses affluences et sa médiatisation. En deux parties. Voici la deuxième.

Une étude sur la Ligue Féminine, ses clubs, ses joueuses, ses compétitions, ses affluences et sa médiatisation. En deux parties. Voici la deuxième.

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« Ça fait des années que l’on se bat pour la médiatisation du basket féminin et une forme de parité. A l’époque de M. Chêne et de Antenne 2 on nous disait d’être plus féminine, que l’on passera alors plus de matches. Après c’était, ayez plus de résultats ! Je peux vous faire l’historique. Je sais que toutes les joueuses mettent du cœur à l’ouvrage pour essayer de professionnaliser la chose. »

Ainsi s’exprime l’ancienne internationale Loétitia Moussard à propos de la médiatisation du basket féminin. Une vielle tarte à la crème. L’auteur de ses lignes se souvient ainsi d’une discussion enflammée d’une bonne demi-heure, il y a plus de trente ans, avec Alain Jardel, alors fougueux entraîneur du BAC Mirande qui ne comprenait pas que les filles ne soient pas logées à la même enseigne médiatique que les garçons. La raison était finalement simple : la demande était moins forte et les entreprises de presse ne sont pas des services publics et doivent contenter leurs lecteurs/téléspectateurs pour vivre ou survivre. Plusieurs études à l’époque du magazine Maxi-Basket, qui consacrait environ 1/5e de sa pagination aux féminines, indiquait que si 25% des lecteurs estimaient qu’il en fallait davantage, 50% s’accordaient à considérer que c’était la bonne dose, et un autre quart disait que ça ne les intéressait absolument pas. Autre élément incontournable : le nombre de lectrices était dix fois moins important que le nombre de lecteurs qui constituaient l’essentiel du contingent de fans du basket… féminin. En faisant le tour des publications et des sites spécialisés en Europe, on s’aperçoit que les basketteuses françaises sont loin d’être les parents pauvres du continent. Les mentalités ont évolué, bien sûr, mais pas forcément à la vitesse supersonique.

Un record de matches

Il y a eu trois pics dans la médiatisation du basket féminin. La première dans la première moitié des années soixante-dix lorsque le Clermont Université Club, finaliste à répétition de la Coupe des Champions -l’équivalent de l’Euroleague- profita du désert sportif français pour bénéficier de retransmissions sur la première chaîne de l’ORTF. Deuxièmement, on observa un éclairage sur les « Filles en Or » à l’occasion de leur triomphe en France à l’Euro 2001, et troisièmement, un autre encore plus intense ur l’équipe de France, et plus spécialement sa meneuse Céline Dumerc, aux Jeux de Londres en 2012, car ses matches spectaculaires furent retransmis sur France Télévisions à des horaires où ça cartonne -pas à l’heure de la rosée du matin comme les garçons aux JO de Sydney.

Une fois que l’on a dit ça, sortons une vérité : il n’y a jamais eu autant de matches télévisés de la Ligue Féminine que pour la saison 2018-19. Déjà parce que jusqu’à un passé récent, c’était zéro sur toute la ligne.

La première révolution à l’échelle de la Ligue Féminine fut la captation automatisée de ses matches par le système K-Motion et leur diffusion sur Internet. Un système qui ne peut satisfaire que les fans du premier cercle (320 000 vues ont été enregistrées cette saison en totalité) sachant qu’il n’y a que deux caméras qui suivent la balle, que l’image n’est pas top, et qu’il n’y a pas de commentaires. Le deuxième facteur, c’est le contrat LNB/FFBB négocié avec le groupe Altice qui par ricochet permet la diffusion de matches de LFB sur RMC Sport. En fait, il existe deux contrats distincts. L’un concerne les équipe de France dont la FFBB est signataire et l’autre regroupent les championnats français, garçons et filles, plus la Coupe de France, la Leaders Cup, le All-Star Game, l’Open Féminin, et ce sont Jean-Pierre Siutat pour la FFBB et Alain Béral pour la LNB qui apposent leurs signatures.

C’est ainsi que l’on est arrivé à un record de 31 matches de basket féminin dont 13 de LFB diffusés en direct cette saison dont l’ensemble de la finale Lyon-Montpellier.

« Il fallait démocratiser la visibilité de l’image, ce qui n’a pas été simple car il y a un diffuseur qui paye l’exclusivité », explique la directrice de la LFB, Irène Ottenhof à propos de la diffusion de tous les matches de LFB sur Internet. « La deuxième partie c’est de produire des images digestes, agréables donc plus qu’avec un algorithme qui permet de suivre la balle et deux caméras, d’avoir des commentaires. Si RMC diffuse le match, c’est évidemment verrouillé. Parfois des chaînes régionales diffusent des matches. C’est à la charge des clubs et c’est soumis au préalable à l’autorisation de RMC. »

Rédacteur en chef du basket sur RMC Sport, Cyril Méjane affirme que sa chaîne est très conciliante sur le sujet.

« On le fait sans soucis, on ne va pas aller à l’encontre du basket féminin. On l’a fait avec les filles et aussi en Pro B avec le club de Quimper lorsqu’ils ont joué dans la salle de Brest. L’objectif pour nous est que ce soit diffusé le plus possible sur les télé locales comme ça été le cas en Eurocup pour Montpellier qui a été diffusé sur France 3 régionale jusqu’à la finale. Quand on produit un match de LFB c’est au même niveau de production qu’un match de LNB. Et encore plus pour un match d’Eurocup car les normes FIBA sont encore plus importantes. »

Négocié des droits en solo ?

Début mai, suite à une chronique humoristique dans l’émission Buzzer sur RMC Sport, l’Union des Clubs de LFB (UCLFB) a publié une diatribe sur les réseaux sociaux, en prenant comme cibles le chroniqueur, lui reprochant des propos « sexistes, vulgaires et insultants pour notre sport, les clubs et les joueuses qui font notre championnat » et aussi le fait que les petites lucarnes ne sont pas suffisamment ouvertes, à son goût, au basket féminin.

« Les clubs de LFB ne sont bénéficiaires d’aucun droit TV. Pire encore, la diffusion en webtv repose sur un investissement annuel de 20 000 euros par club pour les seuls matchs de LFB. Cette saison RMC aura diffusé au maximum une quinzaine de matchs de LFB, sans rendez-vous récurrent, sans moyens de commentaires dans les salles par souci d’économies, sans ligne éditoriale assumée sinon ces commentaires vulgaires et scandaleux, » peut-on lire dans le communiqué. Et encore : « Enfermés dans un contrat de mariage forcé, le basket féminin regarde passer le train de l’évolution spectaculaire d’autres sports. » La requête arrive plus loin : « Alors OUI, STOP AU MEPRIS, AU SEXISME ET A LA VULGARITE, le basket féminin, ses joueuses, ses clubs et l’ensemble des supporters et pratiquants méritent le respect et une fenêtre médiatique. Ne comptez pas sur nous pour alimenter un faux débat basket masculin vs basket féminin. C’est bien le basket français dans son ensemble qui souffre d’une médiatisation trop faible et peu valorisante, un vrai paradoxe compte-tenu de la dimension spectaculaire de ce sport. Par ailleurs, l’ancrage et l’importance sur les territoires des clubs professionnels est également sans commune mesure avec la médiatisation qui en est faite. D’autre part, comme l’a souligné Madame la Ministre des Sports en mars dernier, nous ne pouvons plus admettre de nous voir reprocher depuis trop longtemps que le sport féminin devrait être plus performant pour être mieux médiatisé et plus vendeur pour attirer les annonceurs et le public. Cet argument ne tient plus. Comme nous l’avons exprimé devant le président de la Fédération Française de Basket le 8 avril dernier nous voulons avoir notre mot à dire sur la médiatisation de notre sport et les négociations futures des accords relatifs à notre sport. »

Est-il envisageable que la Ligue Féminine et ses clubs négocient directement leurs droits TV ?

« Je n’y crois pas ! », répond tout de go Philippe Legname, le président de la LFB. « Il faut savoir comment est financée la ligue féminine. Elle est financée en totalité par la Fédération. Si demain les clubs voulaient avoir une ligue indépendante, il faudrait qu’ils assument près de deux millions d’euros de fonctionnement. Je ne pense pas qu’ils puissent avoir deux millions d’euros de reversement télé. Donc ça leur coûterait de l’argent. Impossible pour eux de négocier les droits télé. Après que la fédération voit avec la LNB pour qu’il y ait une réversion vis-à-vis des clubs féminins, c’est la seule possibilité. Mais comme la fédération verse déjà cette somme pour le basket féminin, elle n’a pas l’intention de verser en plus de l’argent venant des droits TV. Il faudrait aussi connaître la position des clubs de la Ligue Nationale de Basket qui eux voudraient plus que ce qu’ils reçoivent. Il y a une partie qui va à la fédé et une à la ligue qui en reverse ensuite à ses clubs. C’est donc une histoire de pourcentage. Je ne vois pas la LNB et les clubs masculins accepter que quelque chose soit pris pour aller aux clubs de la Ligue Féminine. »

En fait, la Ligue Féminine ne génère pas suffisamment d’audience pour naviguer en solitaire et sa marque est étroitement liée au développement du basket dans son ensemble donc masculin. En revanche, il n’apparaît pas exclu de voir son exposition augmenter chez l’actuel diffuseur.

« Un match par semaine, je ne pense pas sur la prochaine année. Mais comme il reste un an de contrat, c’est quelque chose dont il faut rediscuter dans les négociations qui vont bientôt commencer », estime Cyril Méjane qui indique que son groupe est pleinement ouvert au basket féminin. « Sur RMC sport, à travers nos différents supports, c’est une volonté globale, que ce soit à la radio et sur les différentes chaînes gratuites et payantes et sur BFM TV. Un exemple, sur les 6 matches de l’équipe de France féminine du mois de juin, deux vont être diffusés en clair sur RMC Story. Un match à Rennes et celui de Rouen. C’est la volonté globale du groupe. Je suis pour diffuser plus de matches de Ligue Féminine mais, on en a déjà parlé avec Irène, il faut aussi trouver les meilleurs arrangements économiques. L’ASVEL va avoir un budget plus important -et j’en ai discuté avec Tony (Parker)-, et l’idée c’est d’avoir la même soirée l’ASVEL masculin et l’ASVEL féminin. On pourrait, nous, « l’événementialiser ». Ça ne ferait aussi qu’une seule production. Il y a d’autres soucis comme le fait que les filles ont des sponsors différents des garçons et que la salle de Mado-Bonnet a ses sponsors et qui ne seront pas sur le terrain si elles jouent à l’Astroballe. Oui le développement du basket féminin et du sport féminin en général est important chez nous. Après, il y a des histoires de contrats, d’obligations de diffusion que l’on a avec la LNB, la FFBB, la LFB qui sont en discussion. »

Il faut savoir qu’une production avec un simple commentaire en cabine revient à plus de 10 000 euros et que pour un match d’Eurocup ou de l’équipe de France les tarifs sont sensiblement supérieurs.

« Il faudrait faire en sorte que le calendrier de la Ligue Féminine soit en corrélation avec celui des garçons », reprend Cyril Méjane. « Les week-ends où il n’y a pas de garçons, on fera des matches si possible de basket féminin et ça serait bien que l’on ait de grosses affiches. Si on a de grosses équipes de Ligue Féminine qui jouent l’une contre l’autre c’est plus facile à mettre sur nos antennes, comme les garçons. Avec les coupes d’Europe on a les problèmes des matches du lundi et il faut être honnête : certaines équipes qui jouent ensemble ne font pas beaucoup d’audience. Un ASVEL-Montpellier, un Bourges-ASVEL, ça fait plus d’audience. On sait que l’ASVEL en garçons et en filles vont être très forts la saison prochaine et obligatoirement ça va faire venir du monde. La finale de LFB de cette année nous conforte dans le fait qu’il faut en diffuser. Après, il y a des contraintes économiques qui nous sont imposées par le groupe. RMC Sport a été racheté par le groupe Altice il y a deux ans et il y a des économies à faire. »

Les causes ne sont jamais perdues. Qui pouvait imaginer au début de ce siècle qu’il y aurait un jour 13 matches de Ligue Féminine diffusés sur une chaîne nationale ? Longtemps les joueuses qui étaient élues MVP du championnat ne recevaient pas de trophées faute d’un financement adéquat. N’est-ce pas Odile Santaniello et Yannick Souvré présentent lors de la cérémonie des Trophées du Basket, le lundi 20 mai dans le cadre prestigieux de la Salle Gaveau à Paris ? Depuis deux ans, les lauréates sont célébrées avec le même apparat que les garçons. La parité gagne malgré tout du terrain. Peu à peu.

Une moyenne de 1 689 spectateurs

Avec la naissance de quelques nouvelles salles (Charleville, Landerneau, Nantes-Rezé, Roche Vendée) ou l’agrandissement du Prado à Bourges et malgré le fait qu’il en existe encore de trop vétustes (Lattes), les affluences sont en hausse en quatre ans de 26% soit 34% depuis 2003, à 1 689 spectateurs, avec un taux de remplissage de 74%. Un chiffre pas très éloigné des 1 948 spectateurs de la Pro B. A ce propos, c’est un constat à faire: la Ligue Féminine est beaucoup plus médiatisée que la deuxième division des garçons.

[armelse]

« Ça fait des années que l’on se bat pour la médiatisation du basket féminin et une forme de parité. A l’époque de M. Chêne et de Antenne 2 on nous disait d’être plus féminine, que l’on passera alors plus de matches. Après c’était, ayez plus de résultats ! Je peux vous faire l’historique. Je sais que toutes les joueuses mettent du cœur à l’ouvrage pour essayer de professionnaliser la chose. »

Ainsi s’exprime l’ancienne internationale Loétitia Moussard à propos de la médiatisation du basket féminin. Une vielle tarte à la crème. L’auteur de ses lignes se souvient ainsi d’une discussion enflammée d’une bonne demi-heure, il y a plus de trente ans, avec Alain Jardel, alors fougueux entraîneur du BAC Mirande qui ne comprenait pas que les filles ne soient pas logées à la même enseigne médiatique que les garçons. La raison était finalement simple : la demande était moins forte et les entreprises de presse ne sont pas des services publics et doivent contenter leurs lecteurs/téléspectateurs pour vivre ou survivre. Plusieurs études à l’époque du magazine Maxi-Basket, qui consacrait environ 1/5e de sa pagination aux féminines, indiquait que si 25% des lecteurs estimaient qu’il en fallait davantage, 50% s’accordaient à considérer que c’était la bonne dose, et un autre quart disait que ça ne les intéressait absolument pas. Autre élément incontournable : le nombre de lectrices était dix fois moins important que le nombre de lecteurs qui constituaient l’essentiel du contingent de fans du basket… féminin. En faisant le tour des publications et des sites spécialisés en Europe, on s’aperçoit que les basketteuses françaises sont loin d’être les parents pauvres du continent. Les mentalités ont évolué, bien sûr, mais pas forcément à la vitesse supersonique.

Un record de matches

Il y a eu trois pics dans la médiatisation du basket féminin. La première dans la première moitié des années soixante-dix lorsque le Clermont Université Club, finaliste à répétition de la Coupe des Champions -l’équivalent de l’Euroleague- profita du désert sportif français pour bénéficier de retransmissions sur la première chaîne de l’ORTF. Deuxièmement,

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Photos: (ouverture): Fatimatou Sacko (Lyon) et Endy Miyem (Lattes-Montpellier). Ana Suarez (Nantes-Rezé). Marine Fauthoux (Tarbes).

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