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Rétro Coupe du monde – 1994: Dans les baskets de la Dream Team II

Pour le championnat du monde à Toronto en 1994, deux ans après les JO de Barcelone, les Américains envoyèrent la Dream Team II avec Shaquille O’Neal en tête de gondole. Nous les avions suivi pas à pas durant quatre semaines.

Pour le championnat du monde à Toronto en 1994, deux ans après les JO de Barcelone, les Américains envoyèrent la Dream Team II avec Shaquille O’Neal en tête de gondole. Nous les avions suivi pas à pas durant quatre semaines.

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Mercredi 20 juillet

Chicago

Premier entraînement en commun au Moody Bible Institute de Chicago. Le soleil rayonne sur la ville et comme le gymnase ne dispose pas d’un système d’air conditionné, c’est l’étuve. Don Nelson ne les épargne pas : les douze stars de la Dream Team II suent à grosses gouttes. Ils avalent des hectolitres d’eau.

Premier incident sans gravité : Mark Price se relève avec une douleur au pouce suite à un choc avec Alonzo Mourning qui, jamais, ne fait de cadeaux.

L’équipe reçoit la visite de Isiah Thomas, nouveau general manager des Toronto Raptors, et de Tim Hardaway, choisis initialement pour mener le jeu de cette Dream Team mais qui ont dû tous les deux déclarer forfait suite à une blessure.

Tout de suite, c’est Reggie Miller qui s’empare du micro. Le shooter des Indiana Pacers est fidèle à sa réputation de provocateur. Il se prend carrément pour Mohamed Ali, l’ancien champion du Monde de boxe qui anéantissait ses rivaux dès la conférence de presse. « Je veux connaître la même réussite que la Dream team I », prévient Miller. « Je veux battre nos adversaires de 30, 40, 50 points. Je veux détruire la compétition. Je veux montrer au reste du monde que le basket-ball est roi en Amérique. » Motivé Reggie. D’ailleurs son coach Don Nelson, qui est aussi celui de Golden State Warriors, reconnait qu’il est particulièrement impressionné par son talent et sa forme du moment. « Je savais qu’il était diablement bon, mais pas à ce point là. »

Toutefois, c’est Dominique Wilkins qui est le centre d’attention des médias. On vient d’apprendre qu’il a signé pour trois ans aux Boston Celtics. Après 11 saisons et demie aux Atlanta Hawks, Wilkins n’aura donc fait qu’un bref intérim sous le maillot de Los Angeles Clippers où il avait été transféré à contre-cœur. « Je ferai de mon mieux pour satisfaire les gens de Boston. Et je sais désormais que je terminerai ma carrière avec les Celtics. »

Photo: Shaquille O’Neal

Mardi 26 juillet

Charlotte

23 698 spectateurs au Charlotte Coliseum pour assister l’entrée en matière de la Dream Team II. Contre l’Allemagne, champion d’Europe en titre. L’un des deux matches de préparation au programme.

Pour faire plaisir au public, Don Nelson introduit Alonzo Mourning et Larry Johnson dans le starting five. Ça patauge un peu. Les Américains ne savent pas trop comment se dépêtrer de la bonne vieille zone des familles mise en place par les Allemands. Il n’y a que 14 points d’écart à la mi-temps. Tout revient dans l’ordre à la reprise grâce à une press tout terrain. Les Allemands sont particulièrement faiblards dans le maniement de balle. On repère les qualités de shooteurs de Joe Dumars (20 points, 7 sur 12 aux tirs) et de Reggie Miller (19 points, 7 sur 10) mais c’est surtout Shaquille O’Neal qui fait forte impression : 14 points en 11 minutes avec quelques dunks assourdissants.

Ce qui est remarquable, c’est que Shaq se démène comme un fou. Il passe par-dessus allemand à la recherche d’un ballon indomptable. Il n’est visiblement pas là pour rigoler. « Je n’avais pas peur de me blesser » commente O’Neal. « J’ai une très bonne assurance. »

Bilan : USA 114, Allemagne 81.

Deuxième bonne nouvelle de la journée pour Derrick Coleman. Une entraîneuse d’une boîte de nuit de Detroit l’avait accusé de violences sexuelles. Or, des analyses viennent de prouver que l’ADN trouvé sur les vêtements de la fille n’est pas celui de l’ailier de New Jersey Nets. Mais Derrick ne veut pas en rester là. Il contre-attaque et demande 10 000 dollars de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Samedi 30 juillet

Oakland

Les Dreamteamers préparent dans la banlieue de San Francisco leur deuxième test face à une sélection d’universitaires qui reviennent, la queue entre les jambes, des Goodwill Games à Saint-Petersbourg. Ils se sont contentés du bronze.

Joe Dumars ne cache pas son admiration devant la force herculéenne de Shaq O’Neal. « J’espère simplement que ces gars vont s’écarter de son chemin quand il va partir au dunk. Sinon, il ne me restera plus qu’à prier pour eux. »

Shaq s’est motivé en se passant la cassette de la finale des Jeux olympiques de Munich en 1972. L’URSS y avait battu les États-Unis d’un point et à la suite d’un final houleux. « Mec, c’était incroyable. Aucune chance que cela arrive de nouveau », assure le pivot d’Orlando lors d’une conférence de presse. « Avez-vous regardé ce match en direct à la télé à l’époque ? » demanda un journaliste qui ignore visiblement l’âge de Shaquille. « Uh… Je suis né en 1972 ! », répond l’intéressé.

Photo: Don Nelson

Dimanche 31 juillet

Oakland

La Dream Team II a pulvérisé la sélection US des Goodwill Games. 113 à 75. Simple anecdote.

Le fait du jour, c’est la bataille verbale qui s’est engagée pour savoir qui est la meilleure équipe de tous les temps, la Dream Team I ou la Dream Team II ?

Reggie Miller, qui décidément n’a pas la langue dans sa poche, est formel : c’est la Dream Team II. Shaquille O’Neal partage cet avis et argumente : « La dream Team I, c’est une vieille équipe. Nous sommes jeunes. Nos jambes sont jeunes. Ils sont vieux. On les battrait, que ce soit en un, trois ou sept matches. »

De quoi mettre en pétard Michael Jordan lui-même qui pose sa batte de baseball et lance quelques piques assassines au micro de NBC : « Ces gars sont tout à fait à leur place dans cette équipe car, assurément, ils rêvent ! Non seulement la Dream Team I était meilleure mais en plus on pourrait encore les battre aujourd’hui, tout de suite. »

Le même jour, Michael règle quelques comptes dans une interview accordée au New York Post : « J’ai l’impression que mes anciens équipiers (aux Bulls) n’ont jamais véritablement apprécié ce que j’ai fait pour eux(…) Après seulement deux semaines de préparation, je pourrais marquer 32 points par match… Mais je n’ai pas l’intention de revenir. »

Plus mesuré que son partenaire Reggie Miller, Zo Mourning reconnait que « les deux Dreams teams sont totalement différentes » et que la Dream Team I « avait trois des plus grands joueurs de l’histoire du basket-ball. »

Lundi 1er août

Oakland/Toronto

L’équipe américaine fait le trajet dans le jet privé des Detroits Pistons. Elle prend ensuite un bus qui l’amène au Four Seasons, un hôtel proche du centre-ville plus luxueux à l’intérieur que dans ses façades. Les Américains sont les seuls avec les Canadiens à ne pas aménager dans un hôtel réservé par les organisateurs aux délégations. A équipes spéciales, traitement spécial.

Les joueurs bénéficient des mêmes conditions que lors des déplacements dans le championnat NBA. Ils ont chacun leur chambre. Ils prennent leur repas en commun comme n’importe quelle équipe au monde. Un efficace (on l’a testé !) service de sécurité les protège des importuns, mais cela n’empêche pas une nuée de chasseurs d’autographes de faire le pied de grue dans le lobby et de pourchasser les stars jusque dans les ascenseurs.

Don Nelson annonce le soir que Larry Johnson, Joe Dumars et Reggie Miller seront les co-capitaines de l’équipe. Un entraînement quotidien est programmé jusqu’au début de la compétition.

Photo: Reggie Miller

Jeudi 4 août

Hamilton

L’Espagne avait pris une trempe face à la Dream Team I à Barcelone : 122-81, soit 41 points d’écart. Elle ressort cette fois du Copps Coliseum d’Hamilton avec 15 points à son débit et après en avoir manqué 100 tout rond à leurs adversaires. Jugez la différence…

On n’a pas vu le Showtime, une parade de dunks, de contres, de fastbreaks. Ce n’était pas un all-star game. Les Dreamteameurs n’ont pas trouvé leurs marques en défense et leur circulation de balle n’a pas été toujours bien ajustée. L’absence de cohésion fut criarde. Les 9 paniers à trois points (sur 17) du tandem Dumars-Miller et un O’Neal incontournable (12 points, 6 rebonds, 3 contres en 16 minutes) furent nécessaires pour que les USA se débarrassent des Espagnols. Pendant la période où O’Neal fut sur le terrain, les Américains dominèrent les joueurs au maillot rouge, 48 à 27.

Ces Espagnols ne sont pas entrés sur le terrain pour demander des autographes ou prendre des photos-souvenir mais pour jouer, intelligemment, un vrai match de basket. Avec une défense ardente et une patience d’ange en attaque afin de limiter les pertes de balles et trouver le meilleur shoot possible. Villacampa a joué comme un Dieu (28 points). Il a démontré que les Blancs aussi -parfois- savent sauter.

Les supporters espagnols présents dans les tribunes se sont même permis de chanter « ce match, on va le gagner ! » lorsque leur équipe passa en tête, 42 à 41, à la 15ème minute, sur un trois points de Herreros. Ça ne dura que le temps d’un frisson, mais quel bonheur !

Dan Majerle fait grise mine face aux micros : « C’est une déception. Nous espérions battre chacun de nos adversaires avec des marges importantes. Il faudra mieux jouer à l’avenir. »

« C’est un bon moyen de nous réveiller. Je pense que mes joueurs auront davantage de respect pour nos adversaires désormais », lance un peu furibard Don Nelson.

Le plus maussade, c’est Dominique Wilkins. Il n’a joué que sept petites minutes. Et ce ne fut pas glorieux. L’hélicoptère a ressemblé à un simple vieux coucou bientôt hors d’usage.

Vendredi 5 août

Hamilton

Les Chinois n’ont pas grand chose à offrir en résistance sinon leur discipline légendaire. Les Américains contrarient leur passing-game et profitent à fond de leur faiblesse à l’intérieur. Résultat : 33 points d’avance à la pause, 41 en milieu de deuxième période, 50 à cinq minutes de la fin, et 55 au coup de klaxon terminal. Le massacre. Un petit gag aussi : Reggie Miller veut faire une passe à Shaq en faisant rebondir la balle sur le panneau. Raté. Il se précipite ensuite à la table de marque en se marrant pour bien préciser aux statisticiens : « Ce n’est pas un shoot, c’est une tentative de passe ! »

Les joueurs avaient été sérieusement critiqués la veille pour leur relâchement face aux Espagnols. Ils voulaient se racheter. Ils sont allés jusqu’à la ligne d’arrivée au sprint. « On en avait discuté ensemble auparavant et nous estimions que nous pouvions gagner ce match de 60 ou 70 points. Nous voulions enterrer cette équipe », révèle Dominque Wilkins. Mais ce n’est pas toujours drôle, n’est-ce pas Dan Majerle ? « Effectivement, ce n’est pas amusant de battre quelqu’un de la sorte. Mais c’est quelque chose que nous étions supposés faire et que nous avons fait. »

Photo: Kevin Johnson et Dan Majerle

Samedi 6 août

Toronto

Pas de match au programme. Juste un entraînement. Que devez-vous faire comme exercice lorsque vous avez gagné de 55 points la veille ? Don Nelson l’explique à ses joueurs : « Les gars, vous êtes un peu lents, oui, un peu lents pour revenir sur le banc lorsque l’autre équipe demande un temps-mort. Nous allons travailler ça jusqu’à ce que ce soit bon… »

Après la séance, on discute de la grève des joueurs qui pend au nez dans la ligue professionnelle de baseball. Mark Price défend la position de ses collègues : « Les fans voient simplement le fait qu’un gars gagne 2 millions de dollars et ils se disent : et en plus, il se plaint ! Ce que les fans ne lisent pas dans les journaux, c’est que les propriétaires se font beaucoup plus que les joueurs, peut-être 200 ou 300 millions. Et maintenant les proprios veulent limiter le salary cap ! »

Dan Marjele ne partage pas l’opinion de meneur du Cleveland. Il estime gagner très bien sa vie et il ne veut pas tuer la poule aux œufs d’or : « Mon sentiment, c’est que si vous êtes bien payé et que la ligue prend bien soin de vous, vous devez prendre soin de la ligue. »

On sait qu’en NBA le syndicat des joueurs et la ligue se sont opposés cet été sur la nécessité ou non de maintenir la draft et la salary cap. Joe Dumars est confiant : « Je ne pense pas qu’il y aura une grève un jour en NBA. Je ne le souhaite pas. »

Le lendemain, les États-Unis affrontent le Brésil. C’est la première rencontre qui sera télévisée sur la chaîne nationale NBC. Dans sa chronique de Chicago Tribune, Sam Smith écrit que « le moment est venu de prévoir une activité extérieure pour dimanche », ajoutant, malicieux : « spécialement si vous êtes membre de l’équipe brésilienne. »

Dimanche 7 août

Hamilton

C’est parfaitement organisé, immuable. C’est tout d’abord le coach, Don Nelson, qui arrive dans la salle de presse, un bon quart d’heure après la fin du match. Il répond sans sourciller aux questions des journalistes. « Pourquoi Coleman n’a-t-il pas joué davantage ? Que pensez-vous de l’Australie ; votre futur adversaire ? » Etc. Top-chrono : Le tout a duré 11 minutes et 20 secondes. Puis, c’est au tour d’un joueur. Cette fois, Shawn Kemp, 7 minutes de questions/réponses.

Puis les autres Dreamteamers, assis sur des chaises, sont à la disposition de la presse dans des mini-box constitués de rideaux bleus à la sortie des vestiaires. Price, Dumars, Smith n’attirent pas la foule. Coleman reste longtemps seul avant qu’une télé lui vienne le solliciter. Wilkins et Miller sont très demandés. O’Neal est carrément pris d’assaut. Casquette blanche en arrière, T. Shirt « USA Basketball » sur le torse, Shaq est entouré d’une quinzaine de confrères et fait face à deux caméras de télé.

Il a fait très fort, Shaq : 27 points et 11 rebonds pour cette victoire de 23 points sur le Brésil. Ce fut un véritable dunkorama (15 smashes des Américains) et à ce jeu là, O’Neal répond toujours présent. Il a clôturé la rencontre, sur une contre-attaque, en jetant la balle contre le panneau pour le récupérer en l’air et dunker sauvagement. « Je voulais finir le match avec un big bang. J’ai pensé à un 360°, mais au dernier moment, j’ai changé d’avis. » Larry Johnson se marre : « Je ne lui donne pas 10, mais 8 simplement. Il est supposé casser le panneau, non ? »

Photo: Alonzo Mourning

Lundi 8 août

Toronto

Repos complet pour l’équipe US. Ni match, ni entraînement. Ni même de sollicitations extérieures. Lors des Open McDonalds et des matches exhibitions de début de saison de la NBA prévoit des séances de photos. C’est ainsi qu’elle avait emmené les Lakers de Magic Johnson à l’Arc de Triomphe et les Orlando Magic de Shaq O’Neal sur le bord de la tamise. Rien de tout ça ici. Il faut « planquer » pour arracher une image d’un Dreamteamer dans la rue ou à son hôtel.

Quartier libre aujourd’hui donc. Certains joueurs reçoivent la visite de leur famille ou de potes. On peut croiser à l’hôtel la grande silhouette de Dikembe Mutombo, le pivot zaïrois de Denver Nuggets. Quelques-uns vont au cinéma. La plupart visitent la ville et le Eaton Center, l’un des plus grands centres commerciaux du Monde. « Nous cherchons à nous mélanger, à mieux nous connaître. Ça devient chouette », indique Larry Johnson.

Shaq O’Neal a fait une petite sieste puis il est allé voir le match Canada-Grèce. « Je n’avais pas de billet mais le gars à l’entrée m’a reconnu. » Vraiment ?

Mardi 9 août

Toronto

Deux shoots extérieurs de Ronaldson et Gaze. Un layup de Bradtke. 6-0 pour l’Australie contre la Dream Team.

Ça continue. Contre attaque. Passe dans le dos de Shane Heal à Andrew Gaze. Layup. Puis c’est autour de Vlahov. Et enfin à Heal de tenter un tir à trois points. Dedans. 17-10 pour les Aussies. « J’espère que nous aurons quelques photos du panneau d’affichage à cet instant », plaisantera ensuite lors de la conf’ de presse Andrew Gaze.

Les Australiens sont comme ça, sur un nuage bleuté, les 3/4 de la première mi-temps. Ils sont encore à égalité à 31 points à la 12ème minute.

Et puis c’est la descente aux enfers. Soudainement. Ils ont dépensé tout leur carburant durant cette quinzaine de minutes initiale et ils n’ont plus le souffle pour courir et défendre, ni les jambes et la lucidité pour shooter correctement. Au bord de la crise d’apoplexie, ils vont céder 10, 14 (à la mi-temps), puis très vite, 20, 30, et enfin 40, 50, 56 points. Terrible la vengeance des Américains.

La Dream Team réussit un extraordinaire 14 sur 22 à trois points. Trente-et-un points pour Reggie Miller avec une adresse presque parfaite : 4 sur 4 à deux points, 5 sur 6 à trois points, 8 sur 8 aux lanceurs. Shawn Kemp réussit deux dunks barbares.

Le tout alors qu’O’Neal n’est pas apparu en 2ème mi-temps. Don Nelson a voulu ménager son dos. « We want Shaq ! (nous voulons Shaq !) » hurle, en fin de match, un public privé de l’attraction majeure de la Dream Team.

Photo: Shaquille O’Neal

Mercredi 10 août

Toronto

Showtime à tous les étages. Les Américains pulvérisent leurs voisins de Porto Rico. 134-83. Vous avez bien calculé. Il fait froid sous les palmiers de Porto Rico : -51. Shaq secoue le panier plusieurs fois. Il s’offre même un coast-to-coast (rebond, remontée de terrain en dribles, dunk). Kemp n’est pas à la traîne. Mais c’est encore Reggie Miller qui fait sensation. Il transforme 8 de ses 11 shoots à trois points. « Vous ne pouvez pas mettre cette ligne (à 6,25m) en NBA. A cette distance, même les pivots peuvent mettre dedans. La ligne NBA est là où il faut. C’est la différence qu’il y a entre les hommes et les garçons. »

Le Portoricain Orlando Vega n’a pas peur des… hommes. Il contre le Shaq et se frictionne un peu avec lui avant que Larry Johnson n’intervienne. Puis Vega qui a appris la vie à New York City et passé quatre ans dans les geôles du Minnesota, vient chambrer plusieurs fois le banc de la Dream Team. A la manière de Reggie Miller face à Spike Lee lors de la dernière finale de Conférence Est de la NBA, New York-Indiana… Mourning, Kemp, Coleman et les autres ont failli en mourir de rire. Faut dire que le dénommé Vega a l’air un peu givré et ne craint rien ni personne, surtout pas le ridicule.

Jeudi 11 août

Niagara Falls

Kevin Johnson est parti visiter avec sa famille les fabuleuses chutes de Niagara. C’est le seul Dreamteamer à avoir accepté la proposition touristico culturelle de son staff. Dan Majerle a disputé un tournoi de golf au King Valley Golf Club avec quelques officiels de la NBA. Les autres n’ont pas dérogé à leurs habitudes : télé, sieste, shopping.

Juste avant, à l’entraînement du matin, on avait évoqué le match du lendemain face à la Russie. « Les Russes ont des gars costauds, de bons arrières, et ils savent tirer les lancers-francs. Ils ne font rien de mauvais, aussi nous devons nous montrer patients », a commenté Kemp.

Le coach des Russes, Sergei Belov, était le leader de l’URSS qui battit les USA en finale des Jeux Olympiques de Munich en 1972. Ses déclarations sont écoutées avec attention par les Dreamteamers. « Nous ne voulons pas faire un simple match exhibition comme ce fut le cas pour d’autres équipes », dit Belov. « La question que je dois poser à mes joueurs n’est pas « pouvez-vous perdre de moins de 40 ou 50 points ? » mais « pouvez-vous rivaliser avec les États-Unis ? » Je sais ce qu’ils vont me répondre. Notre objectif principal est toujours la victoire, peu importe qui nous jouons. A Barcelone, je n’ai pas vu une équipe jouer les États-Unis sérieusement. J’ai promis que nous serons la première à le faire. »

Vendredi 12 août

Toronto

Belov tient sa promesse. Les Russes jouent crânement leurs chances, plient, mais ne se brisent à aucun moment face aux musclors américains. Les joueurs de l’Est européen mènent au score après 10 minutes et demie de jeu (30-28) et Don Nelson est obligé de vraiment coacher (y compris d’appeler un temps-mort à la rescousse) pour que son équipe prenne la situation en main.

Après un départ en fanfare de Coleman (15 points, 6 rebonds), on vit à l’œuvre un remarquable Dumars (20 points, 4 passes et une défense de fer sur Babkov). Pourtant, c’est, toujours et encore Shaq qui fait la différence. Il suffit de le servir convenablement en-dessous et c’est gagné (10 sur 11 aux shoots, 9 rebonds, 2 contres en 18 minutes).

Même lorsque Belov fait entrer ses joueurs du banc les USA ne parviennent pas à couler le cuirassé russe. L’écart final est tout à fait décent : -17. « C’est de loin l’équipe la plus agréable que nous avons jouée », confie Joe Dumars. « J’ai adoré jouer contre eux car ils vous permettent de jouer un pur basket. »

Sergei Bazarevich, le meneur moustachu des Russes (14 points et 6 passes) a forcé le respect de la colonie US. Et plus particulièrement de Kevin Johnson qui n’a pas chômé en défense.

Samedi 13 août

Toronto

Une heure avant la demi-finale contre la Grèce, Reggie Miller, Mark Price et Dan Majerle s’échauffent en organisant des concours de tirs à trois points. A ce petit jeu, Miller est imbattable et réellement impressionnant. C’est du 90% à 6,25m et presque aussi bien un mètre plus loin.

Price et Majerle poursuivent leur feu d’artifice en match mais ce ne sont cette fois que des pétards mouillés : 3 sur 12 pour le meneur des Cavaliers, 2 sur 8 pour l’ailier des Suns. Voici une des explications aux errements des Américains durant les premiers échanges. La Grèce est en tête au bout de 9 minutes : 17-14. Leur zone bien pourrie n’est pas du goût de la Dream Team.

Il n’y a que dix points d’avance pour les Américains à mi-parcours (40-30) mais ensuite le coach grec envoit sur le front tous les remplaçants (Yannakis, Fassoulas et Christodoulou n’auront joué que 21 minutes chacun) et c’est la débandade. Priorité absolue au match du lendemain pour la médaille de bronze expliqueront les Grecs.

La Grèce a pourtant marqué de son empreinte défensive la rencontre : c’est la première fois qu’une Dream Team ne marque pas 100 points.

Lors de la conférence de presse Kevin Johnson ne fait pas mystère de son peu d’enthousiasme pour Toronto : « Vivement demain que l’on gagne la médaille d’or et que l’on parte. J’aimais Phoenix. J’aime Phoenix davantage encore aujourd’hui. Je veux simplement retourner dans la Vallée… »

Dimanche 14 août

Toronto

On comprend tout de suite qu’il n’y aura pas de matches. Coleman commence par un panier à trois points et une pénétration et un lancer : 6-0. Joe Dumars est en place pour neutraliser Bazarevich. Il s’occupera bientôt du sort du Babkov qui aura rarement l’occasion de goûter à la douceur du cuir de balle. La pression défensive de toute la Dream Team est terrible, surtout que les Russes apparaissent fatigués physiquement et mentalement. Ils ont tout donné la veille au soir face à la Croatie. Coleman et Kemp font des Chest Bumps à renverser un bœuf, preuve de leur motivation. « J’étais fasciné par leur défense », dira Sergei Babkov revenu asphyxié aux vestiaires. « J’ai toujours eu la sensation que je me heurtais à un mur et que j’étais incapable de le pénétrer. »

Le score au bout de 10 minutes : 42-18. Calculez : les Américains sont alors sur les bases de près de 170 points pour match entier… Leur réussite aux shoots, et principalement à trois points (9 sur 12), est affolante en cette première mi-temps. « Nous savions que c’était le match de basket international le plus regardé. Aussi nous ne voulions laisser aucun doute dans l’esprit de personne », commentera Reggie Miller.

Cette finale devient vite un peu rasoir. On entend parfois les mouches voler lorsque la fanfare (espagnole) placée dans les tribunes cesse de jouer. Pour se divertir, on compte les tirs à trois points du Shaq (3, tous ratés). Andrei Fetissov, sur le banc en civil avec une casquette de Dream Team II (!?) à l’envers sur le crâne, a trouvé un bon moyen de s’occuper : il prend des photos du match… Bientôt imité par Yevgeni Pashoutine. Les deux Russes ne font que suivre l’exemple du Lituanien Arturas Karnishovas à Barcelone.

C’est le carnage. +33 (73-40) à la mi-temps. +41 (89-48) à la 25ème. +49 (114-65) à la 33ème. C’est le plus gros écart. +46 (137-91) à la fin des hostilités. Ouf ! C’est terminé.

On passe aux cérémonies officielles : remise des médailles, des trophées aux meilleurs joueurs, hymnes nationaux. Shaq, élu dans le « Cinq idéal » du tournoi, refuse d’aller cherche son trophée. Partenaire privilégié de Pepsi-Cola, il ne veut pas cautionner un référendum parrainé par Coca !

Conférence de presse. Quelle fournaise ! Quand un joueur traîne un peu longtemps à son goût avec le journaliste, un célèbre de USA Basketball dont l’arrogance est visiblement inversement proportionnelle à son Q.I., le rappelle à l’ordre : « Johnson… Bus ! » Même un Dreamteamer uni d’une médaille d’or doit obtempérer.

Quelques-uns des joueurs seront vus plus tard dans un night club. Un centre de 2,15m et 135 kilos en tête. Il y a autant de jolies filles au mètre carré que de voitures place de la Concorde sous le coup de 18h. Sweet time, baby.

Lundi 16 août

Detroit

Derrick Coleman n’a pas voulu quitter ses équipiers d’un été sans faire la fête ensemble. Il a organisé une party dans sa ville natale, Detroit. Les caméras et les appareils photos n’étaient pas invités. Soirée privée pour 12 basketteurs qui pendant quatre semaines ont joué les relations publiques de la NBA.

Rendez-vous à Atlanta dans deux ans. Hey, Shaq ! c’est le bastion de Coca-Cola. Comment vas-tu faire?

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Mercredi 20 juillet

Chicago

Premier entraînement en commun au Moody Bible Institute de Chicago. Le soleil rayonne sur la ville et comme le gymnase ne dispose pas d’un système d’air conditionné, c’est l’étuve. Don Nelson ne les épargne pas : les douze stars de la Dream Team II suent à grosses gouttes. Ils avalent des hectolitres d’eau.

Premier incident sans gravité : Mark Price se relève avec une douleur au pouce suite à un choc avec Alonzo Mourning qui, jamais, ne fait de cadeaux.

L’équipe reçoit la visite de Isiah Thomas, nouveau general manager des Toronto Raptors, et de Tim Hardaway, choisis initialement pour mener le jeu de cette Dream Team mais qui ont dû tous les deux déclarer forfait suite à une blessure.

Tout de suite, c’est Reggie Miller qui s’empare du micro. Le shooter des Indiana Pacers est fidèle à sa réputation de provocateur. Il se prend carrément pour Mohamed Ali, l’ancien champion du Monde de boxe qui anéantissait ses rivaux dès la conférence de presse. « Je veux connaître la même réussite que la Dream team I », prévient Miller. « Je veux battre nos adversaires de 30, 40, 50 points. Je veux détruire la compétition. Je veux montrer au reste du monde que le basket-ball est roi en Amérique. » Motivé Reggie. D’ailleurs son coach Don Nelson, qui est aussi celui de Golden State Warriors, reconnait qu’il est particulièrement impressionné par son talent et sa forme du moment. « Je savais qu’il était diablement bon, mais pas à ce point là. »

Toutefois, c’est Dominique Wilkins qui est le centre d’attention des médias. On vient d’apprendre qu’il a signé pour trois ans aux Boston Celtics. Après 11 saisons et demie aux Atlanta Hawks, Wilkins n’aura donc fait qu’un bref intérim sous le maillot de Los Angeles Clippers où il avait été transféré à contre-cœur. « Je ferai de mon mieux pour satisfaire les gens de Boston. Et je sais désormais que je terminerai ma carrière avec les Celtics. »

Photo: Shaquille O’Neal

Mardi 26 juillet

Charlotte

23 698 spectateurs au Charlotte Coliseum pour assister l’entrée en matière de la Dream Team II. Contre l’Allemagne, champion d’Europe en titre. L’un des deux matches de préparation au programme.

Pour faire plaisir au public, Don Nelson introduit Alonzo Mourning et Larry Johnson dans le starting five. Ça patauge un peu. Les Américains ne savent pas trop comment se dépêtrer de la bonne vieille zone des familles mise en place par les Allemands. Il n’y a que 14 points d’écart à la mi-temps. Tout revient dans l’ordre à la reprise grâce à une press tout terrain. Les Allemands sont particulièrement faiblards dans le maniement de balle. On repère les qualités de shooteurs de Joe Dumars (20 points, 7 sur 12 aux tirs) et de Reggie Miller (19 points, 7 sur 10) mais c’est surtout Shaquille O’Neal qui fait forte impression : 14 points en 11 minutes avec quelques dunks assourdissants.

Ce qui est remarquable, c’est que Shaq se démène comme un fou. Il passe par-dessus allemand à la recherche d’un ballon indomptable. Il n’est visiblement pas là pour rigoler. « Je n’avais pas peur de me blesser » commente O’Neal. « J’ai une très bonne assurance. »

Bilan : USA 114, Allemagne 81.

Deuxième bonne nouvelle de la journée pour Derrick Coleman. Une entraîneuse d’une boîte de nuit de Detroit l’avait accusé de violences sexuelles. Or, des analyses viennent de prouver que l’ADN trouvé sur les vêtements de la fille n’est pas celui de l’ailier de New Jersey Nets. Mais Derrick ne veut pas en rester là. Il contre-attaque et demande 10 000 dollars de dommages et intérêts pour préjudice moral.

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