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ITW Lukas Nicot (commentateur) : « Il faut diffuser de belles images et intéresser le spectateur, qu’il soit connaisseur ou novice »

Lukas Nicot est la voix qui monte dans le petit monde des commentateurs du basket français. Et un œil pertinent sur la place du basket français dans le monde audiovisuel, qu’il s’agisse de Sport en France, de LNB TV ou d’autres plates-formes de diffusion.

Lukas Nicot est la voix qui monte dans le petit monde des commentateurs du basket français. Et un œil pertinent sur la place du basket français dans le monde audiovisuel, qu’il s’agisse de Sport en France, de LNB TV ou d’autres plates-formes de diffusion.

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Il n’a pas encore 27 ans mais il est d’ores et déjà une figure du « paysage audiovisuel du basket français » : Lukas Nicot, journaliste indépendant, est la voix du basket français sur Sport en France depuis un an et demi, tout en collaborant avec la LNB pour des résumés de match et des Top 10 ainsi qu’avec la FFBB pour des événements tels que la coupe de France, les tournois 3×3 ou le handisport. Il livre ici ses réflexions sur la place du basket français à la télévision et, plus globalement, dans le paysage audiovisuel.

Quelle est votre vision du basket en France à la télé ?
Pour la télévision, nous sommes à un tournant. Quel que soit le sport, les chaînes de télévision ne sont plus prêtes à mettre de gros moyens pour acquérir les droits et diffuser. Elles cherchent toutes à trouver comment faire pour montrer du sport pour moins cher. Cela se retrouve dans l’évolution des productions, qui perdent en qualité. Malheureusement, c’est comme ça, même si elles essayent de présenter le produit le plus qualitatif possible. Parallèlement, il y a aussi un tournant sur le numérique, Internet. La LNB réfléchit à la manière d’exposer son basket de la meilleure manière possible. Lorsqu’il était diffusé sur des chaînes payantes, Canal+ ou RMC Sport, le basket français n’était finalement pas aussi bien exposé qu’il aurait été souhaitable, alors qu’il y avait des moyens. Aujourd’hui, sans ces chaînes, il faut réfléchir aux moyens de produire de bonnes images, d’exposer le plus possible le basket français, sur LNB TV ou sur les réseaux sociaux.

Photo : Sport en France

Les chaînes ne mettent donc plus autant d’argent pour la production et l’acquisition des droits de la plupart des sports, et du basket français en particulier. Cela implique de trouver d’autres sources de diffusion, d’autres façons de présenter le produit ?
Oui, il faut trouver des alternatives. Même une diffusion télévisuelle ne résout pas tous les problèmes. Par exemple, il faut plus utiliser Youtube, une plate-forme qui, pour moi, n’est pas encore assez exploitée par le basket français alors que la NBA y est depuis des années. Sur ma chaîne Youtube, j’essaye de développer tout ce qui est interview de joueurs ou d’acteurs du basket français, de montrer ses coulisses, etc. Il faut diffuser de belles images et intéresser le spectateur, qu’il soit connaisseur ou novice. Plus généralement, il y a plein de portes à ouvrir, au-delà de la diffusion d’un match. Le basket français, ce n’est pas que ces rencontres mais aussi tout ce qu’il y a autour, des personnes, des histoires à raconter. Et j’ai l’impression qu’on peut beaucoup développer ces aspects.

« Il faudrait trouver une meilleure solution technique que la keemotion mais qui soit accessible à tous les clubs de la ligue »

Pour parler de LNB TV, la saison passée, alors que la saison se déroulait à huis clos, on a pu voir des clubs comme Saint-Quentin ou Blois, entre autres, faire des efforts pour « habiller » leurs retransmissions, en proposant des avant-matchs, des interviews, des plateaux à la mi-temps, divers moyens d’exposer leurs partenaires. Mais j’ai l’impression que l’on voit beaucoup moins cela cette saison. N’est-ce pas regrettable ?
Il est vrai que des clubs comme Saint-Quentin, Blois ou aussi Le Mans, qui avait investi dans la production de reportages de suivi des joueurs avec de très belles images, ont fait de bonnes choses la saison dernière. Cette année, cela s’est effectivement un peu tassé, car ces initiatives représentent de gros investissements, qui se justifiaient lorsque le public ne pouvait venir à la salle et que les clubs voulaient que leurs fans puissent continuer à suivre leur équipe. Mais c’est un business modèle qui a ses limites, au niveau des ressources des clubs. Il faudrait que tout cela soit fait à une échelle plus grande que celle des clubs car s’il y a eu de super retours des spectateurs, il y a en face des clubs qui ont mis la main à la poche mais qui ne peuvent pas le faire en permanence (NDLR : même si Saint-Quentin continue de s’appuyer sur une chaîne de télé locale, ViaMaTélé, pour produire et diffuser ses matchs à domicile). C’est décevant de voir que la plupart des clubs ne continuent pas dans ce sens, mais c’est aussi compréhensible : les spectateurs peuvent revenir à la salle et les dirigeants se disent qu’ils ne peuvent plus se permettre cet investissement. De ce fait, la keemotion (NDLR : le système automatisé de prise de vue utilisé par la plupart des clubs) représente un bon moyen de continuer à diffuser les matchs. Pour suivre une rencontre, c’est un bon outil, mais il a ses limites. Il faudrait trouver une meilleure solution technique que la keemotion mais qui soit accessible à tous les clubs de la ligue.

Certains clubs se cantonnent à la diffusion par keemotion pour, disent-ils, « ne pas nuire à la billetterie ». Cela vous semble-t-il un argument valable ?
Je ne connais pas la problématique de la billetterie des clubs, mais globalement, si les clubs ne font pas plus d’effort sur la production, c’est par manque de moyens financiers pour certains, par manque d’envie pour d’autres. Ensuite, à mon sens, ce n’est pas parce que l’ASVEL ou Monaco ont plus de ressources que d’autres que la qualité vidéo de leurs matchs sur LNB TV doit être supérieure. Pour moi, si l’on veut créer une dynamique sur cette plate-forme, il faut que tous les matchs soient produits avec une qualité équivalente. Parce que si, par exemple, un internaute voit un match de Saint-Quentin bien produit mais qu’il passe ensuite sur un match en keemotion, il risque de se dire « mince, il n’y a pas de continuité, pas de fil conducteur. » Il faut donc que l’on trouve un moyen de hausser le niveau de qualité visuelle et de commentaires sur LNB TV. Sur ce dernier point, je trouve qu’il y a eu un effort sur les commentaires, qui sont du reste moins critiqués. Je vois que la LNB essaye de faire en sorte que les commentateurs soient briefés en amont sur leur rôle, la façon de prononcer le nom de tel joueur, etc. Il y a un suivi, c’est positif dans l’optique de l’amélioration de la plate-forme.

« Est-ce que des amateurs de basket seront prêts à dépenser x euros pour suivre du basket français ? Je n’en suis pas sûr, pour le moment. »

Sentez-vous dans les clubs une volonté d’aller de l’avant sur la qualité de diffusion ?
Avec Sport en France, nous sommes toujours bien reçus dans les clubs, ils sont contents de voir la télévision chez eux. Mais je n’ai pas eu plus de discussions que ça sur le sujet. Je sais que certains voudraient rendre l’accès à LNB TV payant pour financer l’amélioration de la qualité. À mon avis, c’est sans doute un peu tôt : est-ce que des amateurs de basket seront prêts à dépenser x euros pour suivre du basket français ? Je n’en suis pas sûr, pour le moment. À mon sens, il faut commencer par fidéliser le public, en rendant le basket français agréable à regarder, après on pourra passer à un modèle payant. C’est également l’intérêt des clubs : plus le basket français sera vu, plus les sponsors seront présents, et ainsi de suite.

« Ma vie de commentateur de basket professionnel », sur la chaîne Youtube de Lukas Nicot

La keemotion a ses limites, mais elle a le mérite d’exister. Pourtant, le regard des fans de basket français sur LNB TV semble très négatif, à ce que l’on peut voir sur les réseaux sociaux. On peut dès lors se poser la question de savoir comment attirer de nouveaux publics si les passionnés disent « c’est nul » ?
Il y a un ensemble de choses à prendre en compte. Les passionnés, ceux qui s’expriment sur les réseaux sociaux, ce sont des personnes qui ont toujours été abonnées, à Canal+, à RMC, qui ont eu droit à de belles productions. Voir des matchs en keemotion après cela, ça engendre forcément de la frustration. Mais, d’un autre côté, je vois un aspect positif : tous les matchs sont diffusés, il n’y a pas une rencontre que le téléspectateur va rater, alors qu’à l’époque du basket sur une chaîne payante, il y avait deux ou trois matchs par week-end au grand maximum. Aujourd’hui, on peut voir tous les matchs gratuitement. Alors, oui, il y a des améliorations à apporter, des modèles économiques à trouver pour que la qualité visuelle soit meilleure, mais il faut voir que le basket français n’a jamais été autant diffusé. L’an dernier, il y avait La Chaîne L’Équipe et Sport en France, qui continue cette saison à proposer du basket français en clair. Pour moi, ce sont des choses hyper intéressantes, d’autant plus que la LNB développe sa présence sur les réseaux sociaux. Des fois, je vois des critiques du type « il n’y a pas de diffuseur » qui me frustrent, car avec Sport en France, on fait quelque chose de bien. Mais ce n’est pas encore assez connu.

La NBA peut-elle être un modèle pour le développement de l’exposition du basket français ?
Le produit NBA est très bien vendu, il y a donc forcément des éléments à y prendre. Cela étant, le basket français doit garder son identité, son ADN. On peut s’inspirer de la NBA pour tout ce qui est culture des highlights, faire plus de Top 10, de résumés de match. C’est important pour les gens qui n’ont pas l’occasion d’aller dans les salles tous les weekends ou de regarder un match en entier. Il faut leur donner la possibilité d’avoir des images de chaque match de chaque journée, cela crée du lien. La NBA fait cela depuis longtemps, elle a dû se lancer sur Youtube, notamment, vers 2009-2010. Moi, je me suis d’abord intéressé au basket US parce qu’il était bien amené, bien présenté, bien raconté. Du reste, le storytelling est un domaine sur lequel le basket français peut grandement progresser. À mon niveau, pour chaque match que je vais commenter, j’écris 3-4 histoires que je peux potentiellement raconter à l’antenne. Dans chaque rencontre, il y a des choses intéressantes, un joueur qui revient dans l’un de ses clubs précédents, un autre qui en affronte un avec qui il a joué, des choses qui peuvent paraître anodines mais qui vont accrocher le téléspectateur. Un match, ça sert aussi à raconter des histoires !

L’interview de Vincent Collet par Lukas Nicot

Avez-vous une idée des audiences des matchs sur Sport en France ?
La chaîne n’est pas prise en compte par Médiamétrie (NDLR : l’organisme qui mesure l’audience des chaînes de télévision), je n’ai pas les chiffres. Mais je sais que la chaîne est plutôt contente, notamment du magazine que j’ai présenté et qui a bien marché. La chaîne aimerait bien améliorer la production, mais elle fait avec ses moyens. Quand on peut être sur place, comme à Orléans, où nous avions un car régie, nous pouvons faire des interviews, etc. En ce moment, Sport en France discute avec la LNB pour trouver le moyen d’avoir une aussi bonne qualité qu’à Orléans où qu’on aille au cours de la saison.

« La saison dernière, le basket français a raté le virage du basket en clair, sur L’Équipe et Sport en France »

L’Équipe a expliqué son désengagement du basket français par ses faibles audiences. Quel est votre point de vue sur la question ?
L’année dernière, j’ai été frustré par L’Équipe, je m’attendais à ce qu’ils en fassent plus sur le basket, qu’ils proposent un magazine avec du contenu en plus des matchs, par exemple. S’il y avait eu une émission hebdomadaire sur le basket sur la chaîne, les téléspectateurs auraient pu se dire « tiens, il y a un match ce week-end », l’audience s’améliorerait. Sur Sport en France, à chaque émission que nous avons fait sur le basket, nous avons eu de nombreux retours positifs, des questions sur « quand aura lieu le prochain match ? », il y a vraiment une attente à ce niveau. L’autre problème, ça a été le Covid, les matchs annulés, reportés, programmés à des horaires différents. Pour les téléspectateurs, c’est perturbant. En début de saison, ils se sont dit « tiens, il y a du basket, regardons » mais avec ce manque de continuité, ils se sont petit à petit désintéressés. On peut dire que, la saison dernière, le basket français a raté le virage du basket en clair, sur L’Équipe et Sport en France. Le basket français a perdu une occasion de développer son audience, d’autant que tout le monde était derrière sa télé puisqu’il y avait le confinement.

Pour Sport en France, le principal souci semble être celui de la notoriété ?
C’est le problème que rencontrent toutes les chaînes qui sont loin dans les canaux télé. L’Équipe est sur le canal 21. Si Sport en France était dans les mêmes eaux, sur un canal entre 20 et 30 par exemple, la chaîne serait plus connue. Ensuite, Sport en France s’adresse à des fans de sports peu exposés. Ainsi, les matchs de hockey y sont très suivis. Les vrais passionnés savent ce qui passe sur Sport en France, ils viennent voir les contenus qui les intéressent. C’est ce qu’il se passe pour le basket : le téléspectateur intéressé zappera sur Sport en France, mais celui qui n’est pas un passionné ne le fera pas. Il faut faire en sorte que la chaîne soit mieux connue par le biais d’émissions, de diffusion de matchs de qualité, de bonne communication sur les réseaux sociaux, d’originalité, comme ce que nous essayons de faire avec Fred Weis et Angelo Tsagarakis (NDLR : les consultants basket de Sport en France). Il y a plein de choses à raconter autour du basket français, mais comme ce n’est pas assez raconté, assez vu, les gens oublient que ça existe. Changer cet état de fait est un véritable challenge à relever.

Photo d’ouverture : DR

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Il n’a pas encore 27 ans mais il est d’ores et déjà une figure du « paysage audiovisuel du basket français » : Lukas Nicot, journaliste indépendant, est la voix du basket français sur Sport en France depuis un an et demi, tout en collaborant avec la LNB pour des résumés de match et des Top 10 ainsi qu’avec la FFBB pour des événements tels que la coupe de France, les tournois 3×3 ou le handisport. Il livre ici ses réflexions sur la place du basket français à la télévision et, plus globalement, dans le paysage audiovisuel.

Quelle est votre vision du basket en France à la télé ?
Pour la télévision, nous sommes à un tournant. Quel que soit le sport, les chaînes de télévision ne sont plus prêtes à mettre de gros moyens pour acquérir les droits et diffuser. Elles cherchent toutes à trouver comment faire pour montrer du sport pour moins cher. Cela se retrouve dans l’évolution des productions, qui perdent en qualité. Malheureusement, c’est comme ça, même si elles essayent de présenter le produit le plus qualitatif possible. Parallèlement, il y a aussi un tournant sur le numérique, Internet. La LNB réfléchit à la manière d’exposer son basket de la meilleure manière possible. Lorsqu’il était diffusé sur des chaînes payantes, Canal+ ou RMC Sport, le basket français n’était finalement pas aussi bien exposé qu’il aurait été souhaitable, alors qu’il y  avait des moyens. Aujourd’hui, sans ces chaînes, il faut réfléchir aux moyens de produire de bonnes images, d’exposer le plus possible le basket français, sur lnb.tv ou sur les réseaux sociaux.

Photo : Sport en France

Les chaînes ne mettent donc plus autant d’argent pour la production et l’acquisition des droits de la plupart des sports, et du basket français en particulier. Cela implique de trouver

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