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ITW Yacine Sene, ancienne internationale française : « La transition a été facile car j’avais anticipé »

Cette semaine, Yacine Sene, 39 ans, participait aux Rencontres du Leadership organisées par la JL Bourg. À cette occasion, l’ancienne joueuse de l’équipe de France s’est confiée sur sa reconversion et sur l’évolution du basket féminin.

Cette semaine, Yacine Sene, 39 ans, participait aux Rencontres du Leadership organisées par la JL Bourg. À cette occasion, l’ancienne joueuse de l’équipe de France s’est confiée sur sa reconversion et sur l’évolution du basket féminin.

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À même pas 20 ans, Yacine Sene était déjà championne de France et vainqueur de l’Euroleague avec Bourges. 15 saisons de Ligue Féminine (346 matches avec Reims, Aix, Clermont-Ferrand, Mondeville et Charleville-Mézières) plus tard, l’ancienne internationale (25 sélections) a pris sa retraite sportive et s’est installée dans les Ardennes où elle s’investit pleinement dans la vie associative et municipale. Tout en gardant un pied dans le basket, notamment auprès de son club de coeur, les Flammes Carolo. Discussion avec une femme optimiste, dynamique et expérimentée qui n’est pas prête, sept ans après la fin de sa carrière professionnelle, de quitter l’univers du basket.

Vous avez arrêté votre carrière de basketteuse pro en 2015. Que devenez-vous ?
« 2015, ça remonte (rires). Depuis sept ans, j’ai attaqué une autre partie de ma vie. Je l’avais anticipée puisque j’ai fini mes études de droit en 2010. J’avais déjà assuré ma reconversion en tant que juriste, au tribunal. En même temps, j’ai eu ma fille… Tout s’est enchainé un peu naturellement après ma carrière. Après, j’ai travaillé dans une association d’aide aux victimes et comme mandataire judiciaire. Et, depuis un an et demi, je suis chargée de mission au conseil départemental des Ardennes et adjointe aux sports et à la vie associative à Charleville-Mézières. »

Vous qui avez cumulé basket et études pendant votre carrière de joueuse, est-ce facile, aujourd’hui en France, de basculer du basket professionnel au monde du travail traditionnel ?
« Pour moi, ça a été facile parce que j’ai pu choisir le moment où je voulais m’arrêter, ce moment où j’avais l’impression d’être allée au bout de ce que je pouvais donner. Je n’avais pas le sentiment de me dire « il faut que je continue ». Vraiment, j’étais au bout du bout du bout. Et puis, j’avais anticipé, je savais ce que je voulais faire après au-delà du basket. A côté du basket et à la fin de mes études notamment, j’ai fait du bénévolat dans une asso. J’ai toujours eu un pied dans autre chose que le basket, ça a toujours été important. Donc j’avais déjà un aperçu de ce qu’était la vie « réelle » . Et, vraiment, la transition a été facile. La seule difficulté, c’était de trouver du travail sur mon territoire, car ce n’est le territoire le plus attractif. Mais, à force de m’acharner, de chercher, de postuler malgré le fait qu’on me ferme plein de portes, je suis rentrée par d’autres (rires). Au final, j’ai eu l’impression d’une transition en douceur que j’avais préparé dans quelque chose qui me plaisait aussi. »

« Le premier critère pour combiner études et basket pro, c’est la motivation »

Avant l’entrée dans le monde professionnel, combiner études et basket professionnel n’est pas adapté à tous les cursus et envies de chacun, du moins chez les filles…
« À mon époque, il commençait à y avoir des aménagements pour les sportifs de haut niveau, mais c’était déjà compliqué, parce qu’on me disait déjà par exemple « t’es pas payée pour faire des études » (rires). Et de l’autre côté, on a l’autre discours, « c’est quoi ces sportifs qui demandent des aménagements ? » Donc, en effet, ça demande de la persévérance. Pour combiner les deux, quelque chose me paraît essentiel, c’est de trouver un autre domaine que le basket et pour lequel on se passionne parce que c’est plus facile de se tenir à quelque chose qu’on aime. Je dis ça car aujourd’hui, il y a beaucoup de sportifs qui se lancent dans STAPS (NDLR : sciences et techniques des activités physiques et sportives, fac de sport) par défaut. Mais il faut déjà aimer ça ! C’est un ensemble de choses. Maintenant, je crois que le premier critère pour combiner études et basket pro, c’est la motivation parce qu’en effet, c’est dur. Dur dans le rythme, dans la négociation entre club et côté scolaire pour arriver à combiner. »

Yacine Sene était l’invitée cette semaine des Rencontres du Leadership organisées par la JL Bourg. (c) Jacques Cormarèche

Y’a-t-il une amélioration ces dernières années dans l’aménagement des études pour les basketteuses ?
« Oui, je crois. Malgré tout, il y a de plus en plus de filières où le sportif de haut niveau est valorisé, et où on l’accompagne, notamment la Fondation Lagardère qui a ouvert un cursus permettant aux sportifs de haut niveau de pouvoir intégrer Sciences Po. Il valorise le sportif et prend en compte ses contraintes. Il y a de plus en plus d’opportunités. Et, pour l’avoir vécu certaines saisons, c’est plus facile de se concentrer que sur le sport, on peut se dire qu’on va être moins performant, qu’on va avoir moins d’énergie. Mais, d’un autre côté, ça nourrit et ça enrichit différemment. »

Etes-vous toujours impliquée aujourd’hui, de près ou de loin, dans le monde du basket ?
« Je suis toujours proche des terrains de basket, forcément, c’est un sport que j’adore. J’ai aussi eu la chance de finir ma carrière dans un club qui m’a énormément donné (NDLR : Charleville-Mézières) et qui m’a aussi accompagné dans ma transition, m’a aidé dans plein de domaines de ma vie. »

« Il y a une forme de stabilité, ne serait-ce qu’au niveau de la structuration des clubs de LFB. On n’a plus ces phénomènes de disparitions de clubs pour des raisons budgétaires. On a une équipe de France qui, à l’image de ce championnat, performe. Il y a une progression et le basket français, dans son ensemble, est très attractif »

Vous êtes engagée dans le milieu associatif, notamment en tant qu’adjointe aux sports et à la vie associative de Charleville-Mézières. Quels sont vos combats, en lien ou non avec le basket ?
« Certains de mes combats associatifs sont liés indirectement au sport. Je pense notamment que le sportif de haut niveau a un rôle qui va au-delà du sportif, notamment sur des territoires où les gens qui viennent aux matches n’ont pas forcément des vies simples et évidentes. Il faut savoir redonner vers les enfants, les familles en souffrance. C’est quelque chose qui doit être de plus en plus inscrit dans l’ADN des clubs. À Charleville, cela existe depuis longtemps. Lyon est depuis peu de temps devenu un club à mission. C’est quelque chose d’important. Il y a d’autres sujets. C’était une chance dans le basket de travailler avec des personnes d’origines extrêmement différentes. J’ai toujours eu cette appétence pour accompagner les personnes qui arrivent dans notre pays, c’est d’autant plus d’actualité en ce moment. Je donne de l’énergie aux associations d’accompagnement des migrants, ça me parait important. Et puis forcément, tout ce qui concerne la place des femmes dans la société, et notamment dans le sport féminin. Il y a encore du boulot, ça avance, mais quand on a été confrontée directement à ce que ça implique d’être une femme, et de devoir, au-delà de la performance, défendre sa place et exister encore plus, c’est important. »

Comment cela se traduit-il au quotidien ?
« Dans le cadre de mes nouvelles missions, j’essaie d’insuffler et de prôner une égalité femmes-hommes, ne serait-ce que dans la médiatisation. Le sport féminin a toute sa place, et il faut qu’il y ait un traitement équivalent en termes de visibilité. Il y a du chemin, je vous assure. Sinon au niveau du club de Charleville-Mézières, j’ai aidé à la structuration de « Flammes de Coeur » qui est devenue une association. Je ne suis plus présidente de l’association du fait de mes fonctions d’élue. Mais j’essaie toujours d’agir en étant actrice au niveau d’associations ou en mettant en avant des femmes qui font avancer les choses. »

Yacine Sene était l’invitée cette semaine des Rencontres du Leadership organisées par la JL Bourg. (c) Jacques Cormarèche

Comment se porte le basket féminin français selon vous ?
« Je trouve que le championnat de France s’est homogénéisé avec le temps. Il y a une forme de stabilité, ne serait-ce qu’au niveau de la structuration des clubs. On n’a plus ces phénomènes de disparitions de clubs pour des raisons budgétaires (NDLR : Valenciennes, Challes-les-Eaux, Aix-en-Provence, Clermont-Ferrand notamment). On arrive également à garder nos Françaises dans le championnat, même si certaines tentent parfois une expérience à l’étranger. En termes d’attractivité, les championnats russes, turques, espagnols, arrivent à attirer des superstars américaines. Là, on n’y est pas encore. Mais ça reste l’un des tous meilleurs championnats en Europe. On a une équipe de France qui, à l’image de ce championnat, performe. En coupe d’Europe, c’est plus difficile qu’à la grande époque des Valenciennes et Bourges (NDLR : avec laquelle Yacine Sene a remporté l’Euroleague en 2001) mais on reste au contact. Je trouve qu’il y a une progression et que le basket français, dans son ensemble, est très attractif. »

« Charleville-Mézières, c’est un petit qui devient grand »

Quel est votre regard sur la saison des Flammes Carolo  ?
« Malgré le Covid, les blessures, les mouvements en cours de saison, la construction d’un équipe jeune, l’équipe s’en sort vraiment bien. Il n’y a plus de coupe d’Europe ni de coupe de France à l’heure où on se parle mais une belle deuxième place en championnat. Et il ne faut pas oublier tout ce qui a été fait ces dernières années, et la transition qui a dû être mise en place pour, un peu comme tout le monde, passer la crise liée à la pandémie. Chaque année, cette équipe a passé des paliers. Charleville-Mézières, c’est un petit qui devient grand. »

Et sur sa structuration du club ?
« La structuration du club s’est faite étape par étape, en partant quand même de Départementale il y a un peu plus de 20 ans ! C’est, pour moi, un des clubs qui s’est inscrit dans le paysage du basket féminin français. On le compare par exemple à Basket Landes pour son côté identité de territoire assez forte. C’est un club qui a su construire sur la durée, étape après étape, et qui aujourd’hui existe dans le haut de tableau et en coupe d’Europe (NDLR : élimination en huitièmes de finale de l’Eurocup contre Mersin). Après, ça reste mon club de coeur, c’est difficile de rester totalement objective (rires). »

Il y a quelques années, vous continuiez de jouer au basket à un niveau plus modeste dans une « équipe de mamans ». Est-ce toujours le cas ?
« La crise est passée par là (rires). J’ai toujours ma licence, je m’entraîne encore, mais j’ai un peu ralenti. J’ai commencé en Départementale il y a maintenant trois ans avec des copines, et pas que des « mamans », avec des jeunes de 18 ans également. C’est un mélange intéressant. On est montées en Pré-Nationale, on est championnes Grand Est, quand même. C’est le titre dont je suis le plus fière (rires). Malheureusement, cette année, on a eu énormément de blessées, on a dû faire un forfait général. Mais, quand on aime autant un sport, c’est difficile de s’arrêter. »

A suivre jeudi : interview avec Camille Lacourt, quintuple champion du monde de natation.

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À même pas 20 ans, Yacine Sene était déjà championne de France et vainqueur de l’Euroleague avec Bourges. 15 saisons de Ligue Féminine (346 matches avec Reims, Aix, Clermont-Ferrand, Mondeville et Charleville-Mézières) plus tard, l’ancienne internationale (25 sélections) a pris sa retraite sportive et s’est installée dans les Ardennes où elle s’investit pleinement dans la vie associative et municipale. Tout en gardant un pied dans le basket, notamment auprès de son club de coeur, les Flammes Carolo. Discussion avec une femme optimiste, dynamique et expérimentée qui n’est pas prête, sept ans après la fin de sa carrière professionnelle, de quitter l’univers du basket.

Vous avez arrêté votre carrière de basketteuse pro en 2015. Que devenez-vous ?
« 2015, ça remonte (rires). Depuis sept ans, j’ai attaqué une autre partie de ma vie. Je l’avais anticipée puisque j’ai fini mes études de droit en 2010. J’avais déjà assuré ma reconversion en tant que juriste, au tribunal. En même temps, j’ai eu ma fille… Tout s’est enchainé un peu naturellement après ma carrière. Après, j’ai travaillé dans une association d’aide aux victimes et comme mandataire judiciaire. Et, depuis un an et demi, je suis chargée de mission au conseil départemental des Ardennes et adjointe aux sports et à la vie associative à Charleville-Mézières. »

Vous qui avez cumulé basket et études pendant votre carrière de joueuse, est-ce facile, aujourd’hui en France, de basculer du basket professionnel au monde du travail traditionnel ?
« Pour moi, ça a été facile parce que j’ai pu choisir le moment où je voulais m’arrêter…

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Photo : Yacine Sene (Bellenger-Allée/IS/FFBB)

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