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Spécial Limoges – Jonathan Rousselle dans un tourbillon

Suite à un reportage sur place, nous consacrons toute cette semaine, du dimanche à vendredi, au Limoges CSP. Le club le plus prestigieux, le plus titré et aussi le plus turbulent du basket français, qui possède une saveur unique. Ce troisième chapitre est consacré au meneur Jonathan Rousselle, à la

Suite à un reportage sur place, nous consacrons toute cette semaine, du dimanche à vendredi, au Limoges CSP. Le club le plus prestigieux, le plus titré et aussi le plus turbulent du basket français, qui possède une saveur unique.

Ce troisième chapitre est consacré au meneur Jonathan Rousselle, à la fois néo-international et néo-limougeaud qui de son propre aveu a été plongé dans un tourbillon.

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Le basket de haut niveau est souvent une affaire de filiation. Décédé il y a trois ans, Jean-Pierre Rousselle était ce que l’on qualifie une « grande figure » du basket nordiste. Joueur, il le fut à l’AS Denain à l’époque de Jean Degros et aussi son entraîneur. Avant de devenir moniteur et entraîneur au Stade Roubaisien, il fit un crochet par le Clermont Université Club, référence absolue du basket féminin français dans les années soixante-dix dont il fut le coach et avec qui il devint champion national en 1979. La même année il fut adjoint en équipe de France féminine au championnat du monde à Séoul.

« Peu de monde est au courant de ça mais oui il a un passé qui n’est pas neutre dans le basket. Il a été très important pour moi. C’était vraiment un guide, il avait une vraie expérience et on a beaucoup parlé de basket. On est une famille de basketteurs et ça vient essentiellement de lui. Il a fait un nombre de kilomètres et d’heures incroyables, » résume Jonathan. Et quand on demande au fils si le père a évoqué avec lui la frénésie qui s’était emparée de Denain, petit ville toute acquise aux rouges et blancs, il précise: « On en parlait mais lui ça se passait bien. Quand il m’en parlait, c’était vraiment des souvenirs très positifs. »

Jonathan Rousselle est né à Seclin, il y a vingt-huit ans, et s’est longtemps cantonné au Nord : à Roubaix, forcément, à Gravelines, son club formateur, à Boulogne où il se classa en deuxième position, derrière son équipier Mam Jaiteh, au référendum qui désignait en 2013 les meilleurs joueurs français de Pro B, avant d’effectuer une dernière saison au BCM. C’est là qu’il s’est forgé ce shoot si caractéristique, si peu académique mais si efficace que son adresse à trois-points fut de 51,7% à Cholet Basket, il y a deux ans. On l’a vu notamment réaliser quelques shoots « clutch » avec beaucoup de sang-froid. Mais tout de même, sa façon d’agripper la balle défie les lois de la balistique et Jonathan, n’a-t-il pas envisagé d’y apporter quelques corrections ?

« On ne me l’a jamais vraiment proposé parce que l’efficacité était là et ça ne m’a jamais posé de soucis, de barrière, je n’ai jamais été bloqué en montant de niveau pour tirer. J’arrive à tirer assez vite et à partir du moment où tu arrives à le faire avec de l’opposition pourquoi changer un truc qui marche correctement ? Je l’ai perfectionné, je me le suis approprié. Ça vient de moi et je suis très à l’aise avec ça. C’est plutôt efficace et ça ne me pose pas de soucis à haut niveau. L’esthétisme, c’est… une question de goût. Quand j’étais jeune, j’étais gringalet, je n’avais pas assez de force mais je m’entêtais à tirer de loin et j’allais chercher de la force là où je pouvais. Et c’est resté. En montant de niveau, ça m’a peut-être permis de tirer un peu plus de loin. »

D’apparence, le néo-Limougeaud n’est pas un pur-sang. Il a presque le gabarit de M. Tout-le-Monde si ce n’est une taille avantageuse (1,92m) pour un meneur. Seulement, méfiez-vous de l’eau qui dort. Balle en main, Jo est une sorte de dragster et on l’a vu déborder des vis-à-vis qui ont été surpris par sa vitesse balle en main.

« C’est Philippe Hervé qui m’a ouvert les yeux là-dessus. On a fait un entretien avec la fameuse question : quelles sont tes forces et tes faiblesses ? C’est dur de parler de soi et par défaut, je lui ai répondu que j’étais quelqu’un d’adroit. Il m’a dit, « tu te considères comme un shooteur ? » Moi, « oui ». Et lui de dire, « moi je ne pense pas. Tu ne construis pas tes matches avec ton shoot. Kyle McAlarney est un shooteur. Quand il rate, on est surpris. Quand tu rates, on n’est pas surpris plus que ça. » A la Philippe Hervé ! Comme ça, pah ! » (rires). Il n’a pas tort car je peux exister dans un match sans mettre un tir. Et il m’a dit, « pour t’avoir vu évoluer un mois ou deux, ta force c’est la rapidité balle en main ». En me regardant jouer, en ouvrant les yeux, c’est vrai que je suis capable de déborder. Il m’a beaucoup aidé là-dessus et j’essaie de m’en servir beaucoup plus souvent qu’avant. »

« Tu te sens forcément coupable »

C’est à Cholet qu’il a atteint sa maturité, gagné l’estime de tous, y compris du coach Vincent Collet qui l’a convoqué pour les fameuses fenêtres internationales lorsque les titulaires de NBA et d’Euroleague étaient indisponibles. L’équipe de France, il la connaissait tout de même un peu puisqu’il fut champion d’Europe U20 et qu’il a transité par le sas des A’. Un chiffre significatif : en quatre ans, son évaluation a grimpé de 5,2 au BCM à 12,1. Il était si populaire dans les Mauges qu’un club de fans s’est créé sur les réseaux sociaux, ce qui est rarissime en Jeep Elite.

« Je crois savoir qui c’est mais je ne les connais pas personnellement. Ce n’est pas quelqu’un de ma famille ! C’est sympa et ça démontre que j’ai pu laisser une bonne image à Cholet. C’est toujours agréable que l’on reconnaisse que tu ne triches pas, que tu donnes tout ce que tu as. »

Son transfert dans le Limousin est apparu naturel car il lui offrait la possibilité de jouer l’Eurocup alors que Cholet était sevré de coupes d’Europe et a priori le haut du panier français. Lui qui connaissait la ferveur de Sportica et de La Meilleraie est aussi monté d’un grade au niveau de l’ambiance avec Beaublanc. Question : cela décuple les forces ou cela tétanise de se retrouver au milieu du parquet quand l’équipe n’est pas à la hauteur des espérances du peuple vert ?

« Ca peut t’inhiber de temps en temps surtout quand on est dans la situation actuelle où l’on ne surfe pas sur une grande vague de confiance. Tu démarres tes matches avec deux-trois paniers contre toi. Tu sens tout de suite… le truc. Ça, il faut savoir le gérer car ce n’est pas forcément évident. Ce n’est pas donné à tout le monde. Il faut un temps d’adaptation quand tu n’as pas l’habitude. » Jonathan confie que les joueurs évoquent entre-eux cette atmosphère si particulière. « On essaye de se donner confiance entre nous car ça ne viendra pas forcément de l’extérieur. On se parle mais ce n’est pas évident. Mais a contrario, quand on arrive à aller chercher ce public-là, c’est une vraie force. Tu te laisses porter, tu peux être amené à surfer là-dessus mais pour atteindre cet état-là, il y a un boulot à faire avant. »

La fameuse pression est-elle encore plus forte qu’à Cholet, qui est une sorte de grand village, dans une région, les Mauges, qui est avec les Landes et le Roannais, ce qui se fait de mieux en France en matière de pratique du basket-ball ?

« En toute honnêteté, je pensais être préparé à ça. Je pensais pouvoir maîtriser ça rapidement car je l’avais vu de l’extérieur. Mais une fois que tu y es, tu es pris dans un tourbillon. Et cette année, il se passe beaucoup de choses. Emotionnellement c’est vraiment prenant. C’est vrai que c’est récurrent mais je trouve que cette année on atteint un niveau de péripétie -pour employer un mot soft- qui est important. »

N’allez pas croire pour autant qu’être basketteur à Limoges peut devenir aussi terrifiant que d’être footballeur à Marseille lorsque les défaites s’accumulent. Pas d’agressions verbales dans la rue les lendemains de défaite.

« Pas moi en tous les cas. J’ai la chance de vivre un peu retiré mais même quand je suis en ville, tu es reconnu mais tu n’es pas importuné, alpagué. Ca ne m’est jamais arrivé et pour en discuter avec les collègues, il n’y a pas de tout ça. Les gens sont forcément déçus et nous aussi, les premiers, et on est dans le même truc. Ils ont envie de nous voir gagner, réussir. Ils sont à fond, certes extrémistes, mais pour le bien de leur équipe et de leur club. »

Ce qui a donc changé aussi pour Jonathan, c’est les cadences de matches avec deux rendez-vous hebdomadaires et les rassemblements en équipe de France alors que la majorité de ses équipiers peuvent souffler quelque peu dans ces moments-là.

« C’est sûr qu’il y a un temps d’adaptation surtout au niveau mental, au niveau rythme. Surtout quand tu n’as pas des résultats très positifs. Tu enchaînes et tu n’as pas forcément le temps de travailler. C’est éprouvant mentalement mais aussi physiquement parce que Limoges, ce n’est pas super bien desservi. On passe du temps dans les transports et c’est fatigant ! On a pris une fois le jet privé pour aller à Strasbourg. On en a pris 20 et du coup je ne pense pas que l’on va rééditer ça. Pour la Coupe d’Europe, on va souvent chercher un avion à Toulouse, à Bordeaux ou même à Paris. On a toujours trois-quatre heures de bus pour prendre un premier avion puis un deuxième. »

Dans la morosité actuelle du paysage limougeaud, l’équipe de France n’apparait pas pour lui comme une vraie bouffée d’air pur.

« Ça serait mentir de dire que mon esprit est à 100% avec l’équipe de France. Forcément, tu ne coupes pas surtout dans la situation dans laquelle on est. Ça ne serait pas sérieux. Je suis concerné ici mais sans oublier le CSP car c’est quand même pour moi le plus important. L’équipe de France c’est une parenthèse. »

D’ailleurs, s’il était apparu à son affaire face à la Finlande en septembre (6 points, 3 rebonds et 2 passes), il n’a pas eu la même pèche lors des matches face à la République Tchèque et la Bulgarie ratant ses 4 shoots.

Les défaillances collectives du CSP pèsent d’ailleurs sur l’aura des internationaux limougeauds puisqu’aucun des trois n’a été retenu pour le All-Star Game du 29 décembre.

« J’ai été déçu qu’il n’y ait pas de Limougeaud surtout en pensant à Axel Bouteille qui fait une saison incroyable et qui nous aide beaucoup. J’ai été déçu pour lui parce que je pense qu’il le méritait. Par contre, je ne suis pas forcément surpris de ne pas l’être parce que je ne pense pas le mériter cette année. »

Sans livrer de secte-défense, précisons que Axel Bouteille fut l’un des derniers « coupés » par le jury lors de la sélection -on le jure- très démocratique.

Quand on s’est entretenu la semaine dernière avec Jonathan Rousselle à l’hôtel de l’équipe de France, à Limoges, l’ombre du coach Kyle Milling, qui venait d’être remercié par le CSP, planait au-dessus des têtes.

« Tu te sens forcément coupable. Je l’ai dit à Kyle. Nous les joueurs, on est les premiers fautifs. Malheureusement c’est ce qui se passe souvent quand les résultats ne suivent pas, il y a un fusible, c’est le coach. On a essayé de changer des joueurs, ça n’a pas marché. Je savais que ça pouvait arriver, je ne suis pas surpris mais déçu, de moi-même et de nous les joueurs car on n’a pas réussi à éviter ça. »

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Le basket de haut niveau est souvent une affaire de filiation. Décédé il y a trois ans, Jean-Pierre Rousselle était ce que l’on qualifie de « grande figure » du basket nordiste. Joueur, il le fut à l’AS Denain à l’époque de Jean Degros et aussi son entraîneur Avant de devenir moniteur et entraîneur au Stade Roubaisien, il fit un crochet par le Clermont Université Club, référence absolue du basket féminin français dans les années soixante-dix dont il fut le coach et avec qui il fut champion national en 1979. La même année il fut adjoint en équipe de France féminine au championnat du monde à Séoul.

« Peu de monde est au courant de ça mais oui il a un passé qui n’est pas neutre dans le basket. Il a été très important pour moi. C’était vraiment un guide, il avait une vraie expérience et on a beaucoup parlé de basket. On est une famille de basketteurs et ça vient essentiellement de lui. Il a fait un nombre de kilomètres et d’heures incroyables, » résume Jonathan. Et quand on demande au fils si le père a évoqué avec lui la frénésie qui s’était emparée de Denain, petit ville toute acquise aux rouges et blancs, il précise: « On en parlait mais lui ça se passait bien. Quand il m’en parlait, c’était vraiment des souvenirs très positifs. »

Jonathan Rousselle est né à Seclin, il y a vingt-huit ans, et s’est longtemps cantonné au Nord :

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Photos: Eurocupbasketball et Limoges CSP

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