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Interview – Pascal Donnadieu (Nanterre): « Si la saison ne se termine pas, ce n’est pas la fin du monde »

Le basket français, européen, mondial est à l’arrêt. Depuis ce midi, les relations entre joueurs, coaches, dirigeants, journalistes ne se font plus que par téléphone, réseaux sociaux, WhatsApp… Pascal Donnadieu, le coach de Nanterre 92, est un citoyen comme un autre. Nous avons fait appel à son témo

Le basket français, européen, mondial est à l’arrêt. Depuis ce midi, les relations entre joueurs, coaches, dirigeants, journalistes ne se font plus que par téléphone, réseaux sociaux, WhatsApp… Pascal Donnadieu, le coach de Nanterre 92, est un citoyen comme un autre. Nous avons fait appel à son témoignage plein de sagesse pour savoir comment il voit cette situation de crise.

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Etes-vous confiné chez vous ?

Tout à fait. Comme tout le monde. Il faut respecter les consignes à la lettre.

Avez-vous le sentiment que tout est bloqué au niveau du basket ?

Oui. Je pense que chacun a le droit de s’exprimer mais donner aujourd’hui son avis sur « reprendre, pas reprendre », c’est complètement utopique. Il faut que l’on ait tous, les acteurs, un droit de réserve par rapport à ça parce que je pense qu’on ne maîtrise pas la situation. La priorité c’est la santé de tout le monde.

A quoi allez-vous occuper ces deux semaines, au minimum, sans avoir le droit sortir ? Vous allez regarder des matches ?

Avec un soupçon d’humour, je dirai que l’avantage c’est que les coaches ne pourront pas dire qu’ils n’ont pas eu de temps pour scouter et trouver des joueurs ! Oui, il faut déjà s’occuper intellectuellement sinon on tourne en rond. C’est lire, c’est s’intéresser bien sûr à notre corps de métier, c’est prendre des nouvelles des proches. J’ai la chance d’habiter à dix mètres des bords de Seine et suivant les consignes qu’il y a aujourd’hui, je peux faire une petite balade tout seul sans mettre en péril ma santé et celle des autres.

Comment se sont déroulés au club les derniers jours d’activité ?

Ça s’est fait en plusieurs temps. On a alerté les joueurs quand ça a commencé à monter, à la fin février. Bien sûr, à cette époque-là l’équipe s’entraînait et entre-nous on avait mis des consignes : ne pas se checker, éviter les contacts, on avait en place les solutions hydro alcooliques. On avait fait en sorte à notre petit niveau de la prévention. Jusqu’au match de Bourg on s’est entraîné normalement avec un maximum de précautions. Après Bourg on était censé jouer Monaco le dimanche d’après, c’est-à-dire il y a deux jours. On est resté dans la même configuration et quand on a vu que ça s’aggravait, on a tout stoppé à partir du jeudi.

Mehdy Ngouama a eu par exemple le feu vert pour rejoindre sa fille en province ?

Le vendredi matin, on a fait une réunion au niveau du staff technique avant les mesures draconiennes qui sont tout à fait normales. On envisageait une reprise là, en fin de semaine, et on avait dit aux joueurs que c’était important de pouvoir les localiser et s’ils devaient partir à droite et à gauche, c’était bien évidemment pas à l’étranger. Mehdy a une petite fille vers Troyes et nous a demandés l’autorisation de la rejoindre. Pareil pour Isaïa (Cordinier) qui est retourné voir ses parents à Antibes. On leur demande de prendre le minimum de risques et de faire très attention à eux. Au départ on s’était organisé comme ça et évidemment maintenant c’est le confinement total.

Photo: Mehdy Ngouama (Eurocupbasketball)
« On essaye d’être le plus efficace possible pour que contractuellement personne ne soit lésé y compris le club avec les enjeux financiers qu’il peut y avoir »

Aujourd’hui, les joueurs sont-ils en chômage technique ?

C’est un peu moins mon domaine mais bien évidemment j’ai des éléments à travers les discussions avec les dirigeants. Juridiquement, il y a un vide car c’est quand même une première. On est en train de mettre en place un dispositif pour que tout le monde s’y retrouve. Et visiblement, oui, ça va vers un chômage partiel comme cela a été dit hier au niveau gouvernemental.

Les Américains sont-ils repartis dans leur pays ?

En ce qui nous concerne, les étrangers sont toujours là mais il est bien évident que l’objectif est que tout le monde ait la meilleure situation au-delà du basket. Il ne faut pas faire tout et n’importe quoi aussi bien contractuellement que par rapport à la santé des joueurs. On essaye d’être le plus efficace possible pour que contractuellement personne ne soit lésé y compris le club avec les enjeux financiers qu’il peut y avoir, à Nanterre comme dans tous les autres clubs. Pour avoir échangé avec quelques agents et quelques clubs, pour l’instant il y a différentes options. Des clubs ont envie de faire en sorte que les joueurs puissent partir.

Etes-vous en contact régulier avec vos joueurs et leur avez-vous donné un programme pour conserver leur forme physique ?

Pas forcément moi mais tout le staff est en contact avec tous les joueurs. Au départ, on leur avait évoqué le fait de pouvoir se rendre à la salle ce qui n’est plus d’actualité. Pour être clair, là, on ne leur a pas donné de programme précis. A part la personne qui peut sortir de son appartement et qui se retrouve dans un endroit où il est seul et où il peut s’entretenir, c’est extrêmement compliqué. Pour l’instant, la priorité s’est surtout de stopper l’épidémie au détriment peut-être de garder sa condition physique. Au-delà du sportif, ce qui compte c’est la santé des gens.

Est-ce problématique pour un jeune comme Victor Wembayama, qui est un grand espoir du basket mondial, d’interrompre ainsi son développement ?

Dieu sait que c’est un prospect mais la gravité de la situation fait que c’est embêtant pour lui comme pour tout le monde. Je disais que je ne voulais pas être trop loquace sur le fait qu’il faut une « saison blanche », etc, car c’est tellement anecdotique par rapport à ce qui se passe, à la santé publique, que l’on doit faire la part des choses. Si pendant quelques semaines tout le monde fait des efforts et que l’on arrive à stopper cette épidémie, on aura le temps de rattraper le temps perdu avec des gens qui sont en bonne santé.

L’avenir de cette saison en cours -faut-il décerner le titre de champion de France, faut-il des montées et des descentes, à qui attribuer les places européennes ?- vous paraît anecdotique ?

Je considère qu’aujourd’hui on ne peut pas se prononcer. Il y a trop d’interrogations et il faut avoir la sagesse de prendre un petit peu de recul. Le plus important c’est la santé de tous au-delà des basketteurs. Il faut patienter un peu. Ça fait déjà débat à travers le foot. J’ai lu une interview d’Aulas (NDLR : Jean-Michel, le président de l’Olympique Lyonnais). Il ne faut pas tomber dans ce panneau-là. A chaque déclaration d’un membre d’un club, que ce soit un président ou un coach, on va dire que la personne pense avant tout à son club. Je pense qu’aujourd’hui on n’est pas en capacité de répondre à ça : saison blanche ou garder ses places, etc… Ce n’est pas le moment de discuter de ça. Je m’interdis de donner mon point de vue là-dessus même si j’en ai peut-être un en interne. Il y a des arguments pour dire « saison blanche » ou « on garde les positions ». Ce que je sais c’est qu’aujourd’hui ça ne me paraît pas raisonnable de reprendre la saison vu la situation. Ça évoluera peut-être, pourquoi pas. C’est tout ce que je peux dire.

Photo: Kenny Chery (Eurocupbasketball)
« Pour un club comme Nanterre c’est un gros préjudice financier et il va falloir s’adapter »

En tant que coach adjoint de l’équipe de France, et alors que le tirage au sort vient d’être reporté, avez-vous le sentiment que les Jeux de Tokyo vont être maintenus ?

Il y a deux choses. Encore une fois, je me place en tant que citoyen et par rapport à la santé des uns et des autres : si on ne doit pas aller aux Jeux, on n’ira pas aux Jeux. Après, c’est tous les quatre ans et c’est l’évènement majeur du sport dans le monde. J’en n’ai jamais vécu et ça serait forcément une déception. Tout est envisageable. Il faut laisser parler les experts, il faut réussir à stopper cette situation là et après il sera temps de voir. On se doit de tout envisager, le maintien, le report, l’annulation pure et simple.

Les informations d’aujourd’hui font état du fait que pour la première fois la propagation du virus en Italie n’est pas exponentielle. C’est une nouvelle d’espoir…

C’est pour ça qu’il faut que l’on dépasse notre petit confort, que l’on se montre tous raisonnable, que l’on mette nos intérêts un peu persos de côté et que l’on pense avant tout à préserver tout le monde. On fait du sport, on est quand même des privilégiés et l’essentiel c’est que tout le monde soit en bonne santé. Si on reprend dans deux mois, ça sera dans deux mois, dans trois mois, ça sera dans trois mois, si la saison ne se termine pas, ce n’est pas la fin du monde. Il y aura de toutes façons des lésés au niveau sportif. Des gens qui ont fait une grosse saison, qui espéraient plus, mais c’est tellement anecdotique par rapport à ce qui se passe qu’il faut que l’on ait tous cette sagesse d’être lucide par rapport à tout ça.

Votre père est président et votre frère manager général, vous devez avoir une idée sur l’impact économique sur un club comme Nanterre ? La survie du club peut-elle être menacée s’il n’y a pas de fin de saison ou n’est-ce pas très grave ?

C’est entre les deux. Certains dirigeants se sont exprimés et ont dit qu’il va y avoir un préjudice financier très important par rapport aux recettes si la fin de saison n’a pas lieu. Un préjudice financier important oui, mais j’ai la faiblesse de croire que des clubs sains financièrement et qui ont été assez rigoureux vont prendre une petite claque mais ça devrait pouvoir se gérer pour pouvoir reprendre et ne pas être en danger de mort. Je ne connais pas l’état de tous les clubs. Au grès des mouvements certains ont peut-être pris des risques financiers très importants pour se sauver et je ne sais pas dans quel état ils sont. Pour en avoir bien évidemment discuté avec les dirigeants, pour un club comme Nanterre c’est un gros préjudice financier et il va falloir s’adapter, peut-être revoir le budget pour la saison prochaine. Des clubs avaient certainement misé sur de très grosses recettes. J’ai vu que Pau allait recevoir Limoges puis Villeurbanne. On a reçu un communiqué de la ligue concernant le chômage et les dirigeants vont essayer de travailler pour perdre le moins d’argent possible évidemment sans léser non plus les salariés. Nous, les clubs, on peut encore s’adapter mais j’ai des amis, qui ont un restaurant, qui sont avocats, et pour eux ça prend des proportions dramatiques.

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Etes-vous confiné chez vous ?

Tout à fait. Comme tout le monde. Il faut respecter les consignes à la lettre.

Avez-vous le sentiment que tout est bloqué au niveau du basket ?

Oui. Je pense que chacun a le droit de s’exprimer mais donner aujourd’hui son avis sur « reprendre, pas reprendre », c’est complètement utopique. Il faut que l’on ait tous, les acteurs, un droit de réserve par rapport à ça parce que je pense qu’on ne maîtrise pas la situation. La priorité c’est la santé de tout le monde.

A quoi allez-vous occuper ces deux semaines, au minimum, sans avoir le droit sortir ? Vous allez regarder des matches ?

Avec un soupçon d’humour, je dirai que l’avantage c’est que les coaches ne pourront pas dire qu’ils n’ont pas eu de temps pour scouter et trouver des joueurs ! Oui, il faut déjà s’occuper intellectuellement sinon on tourne en rond. C’est lire, c’est s’intéresser bien sûr à notre corps de métier, c’est prendre des nouvelles des proches. J’ai la chance d’habiter à dix mètres des bords de Seine et suivant les consignes qu’il y a aujourd’hui, je peux faire une petite balade tout seul sans mettre en péril ma santé et celle des autres.

Comment se sont déroulés au club les derniers jours d’activité ?

Ça s’est fait en plusieurs temps. On a alerté les joueurs quand ça a commencé à monter, à la fin février. Bien sûr, à cette époque-là l’équipe s’entraînait et entre-nous on avait mis des consignes :

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