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Nando De Colo : le CSKA ou la NBA ? Le choix du roi

Le MVP de l’Euroleague, en fin de contrat cet été, va sans doute prolonger au CSKA Moscou, malgré l’intérêt que lui portent une douzaine de franchises NBA. On vous explique pourquoi. Par Antoine Lessard, Meilleur marqueur, MVP de la saison puis du Final Four de l’Euroleague. Nando De Colo a tout raf

Le MVP de l’Euroleague, en fin de contrat cet été, va sans doute prolonger au CSKA Moscou, malgré l’intérêt que lui portent une douzaine de franchises NBA. On vous explique pourquoi.

Par Antoine Lessard,

Meilleur marqueur, MVP de la saison puis du Final Four de l’Euroleague. Nando De Colo a tout raflé cette saison sur la grande scène européenne. Et offert au CSKA le titre qu’il convoitait depuis 2008. L’international français, déjà très en vue la saison dernière, a pris place dans le Panthéon des meilleurs joueurs européens. Cette petite dizaine de superstars de l’Euroleague, parmi lesquelles son propre coéquipier au CSKA, Milos Teodosic. Le Serbe et le Français ont martyrisé toutes les défenses de la compétition. Ils forment probablement la meilleure ligne arrière d’Europe à l’heure actuelle. Leur entraîneur, le Grec Dimitrios Itoudis, a comparé son tandem à la paire légendaire de l’Aris Salonique, Panagiotis Giannakis et Nick Galis.

C’est aujourd’hui une évidence, Nando a pris la bonne décision lorsqu’il a choisi de quitter la NBA en 2014 pour rejoindre le club le plus puissant d’Europe. « Les dirigeants de Toronto avaient été particulièrement surpris du choix du joueur de partir », rappelle son agent, Wassim Boutanos. La franchise canadienne tenait à conserver son frenchy. « Son retour en Europe n’était pas du tout programmé dans son esprit.

Suite de l’article : La chose qui a fait basculer son choix par rapport à Toronto, outre le fait qu’Itoudis avait une idée très précise de la façon dont il voulait l’utiliser, c’est que le CSKA c’était 11 participations aux 12 derniers Final Four. C’était l’équipe qui briguait le titre suprême depuis quelques années. »

Cantonné à un rôle mineur en NBA, à peine une dizaine de minutes chez les Spurs puis chez les Raptors, Nando a retrouvé des responsabilités importantes au CSKA. Il a rempli son armoire à trophées, individuels et collectifs… et accessoirement son compte en banque puisqu’il a touché au CSKA le double de ce qu’il gagnait en NBA – un peu plus d’1,5 M€ nets d’impôts sur les deux dernières saisons contre 1,4 M$ en NBA, soit entre 700 et 800 000 € nets d’impôts. Son salaire actuel le situe autour du vingtième rang européen. Il ne correspond plus à sa valeur réelle. En fin de bail cet été au CSKA, avec une option pour la saison prochaine, le MVP de l’Euroleague se retrouve en position de force pour négocier son nouveau contrat.

3 M€ par saison

Le président du CSKA, Andrey Vatutin, ne veut pas perdre son joyau français. Il a fait savoir sur le site Eurohoops qu’il ferait tous les efforts possible pour conserver Nando — « Nous ferons ce que nous devons. La réponse lui appartient. Il décidera. » En vérité, les discussions ont commencé depuis longtemps, « bien avant le Final Four », précise Wassim Boutanos. Aucun chiffre n’a encore filtré mais selon nos informations, le contrat porterait sur trois ou quatre saisons, autour de 3 M€ par saison. Nando De Colo serait alors le deuxième joueur le mieux payé d’Europe, presqu’au même niveau que le numéro un, l’arrière russe du Khimki Moscou, Alexei Shved (3,5 M$ la saison, soit 3,1 M€ au cours actuel). Vu le contexte actuel de l’économie russe – le rouble a perdu 35% de sa valeur par rapport à l’euro et au dollar en un an – cela signifie que le CSKA est prêt à réaliser un effort très important pour garder son MVP.  Ceci pour contrer les offres éventuelles venues d’Europe et surtout de NBA.

« Pas moins de 12 franchises sont intéressées », révèle Wassim Boutanos. Les Toronto Raptors en font partie. La franchise canadienne possède toujours les droits sur Nando et aura priorité sur les autres franchises à condition d’égaler la meilleure offre venue de NBA. Nando a déclaré sur BeIN Sports qu’un retour au Canada n’était pas exclu.  Cette franchise est en pleine ascension. Seulement, les lignes arrières des Raptors sont déjà bien remplies (Kyle Lowry, DeMar Derozan, sans compter Cory Joseph en rotation). Denver fait également partie des franchises intéressées. Nando y aurait plus de garanties de temps de jeu (Jameer Nelson, D.J. Augustin, Emmanuel Mudiay se partagent l’essentiel des minutes à l’arrière). C’est une condition nécessaire pour qu’il accepte de repartir en NBA. Mais pas suffisante. En effet, Nando veut jouer dans une équipe qui gagne. « Cela ne l’intéresse pas de jouer trente minutes dans une franchise qui va gagner cinq matches dans l’année », livre Wassim Boutanos. « Il a bien retenu la phrase de son premier coach pro, Erman Kunter : c’est mieux de marquer dix points dans une équipe qui gagne que trente points dans une équipe qui perd. Or, il n’y a pas plus de trois, quatre, cinq franchises maximum susceptibles de jouer le titre. »

Une chose est sûre, son choix ne sera pas dicté par l’argent. « Depuis le début de sa carrière et son premier contrat à Cholet, Nando n’a jamais mis l’aspect financier en priorité. » En outre, Nando De Colo ne devrait pas recevoir d’offre mirobolante en NBA, en dépit de l’explosion des salaires à venir. Selon nos informations, les meilleures propositions ne devraient pas dépasser 6 ou 7 M$ par saison, ce qui correspond peu ou prou à l’offre du CSKA (après impôts et avantages inclus).

Tellement bien à Moscou

Nando De Colo aime l’Espagne. Il y a passé trois excellentes années, à Valence. C’est là-bas qu’il a rencontré sa femme Veronica. Làbas encore qu’il souhaite s’installer après sa carrière pour y couler une retraite paisible sous le soleil. En 2012, il avait hésité entre l’offre du Barça et celle des Spurs. En 2014, sa priorité hors NBA était de revenir en Espagne. Deux ans plus tard, un retour parait illusoire.

« Cela ne l’intéresse pas de jouer trente minutes dans une franchise qui va gagner cinq matches dans l’année. » Wassim Boutanos, son agent

En Europe, seuls les plus gros clubs turcs auraient les moyens d’attirer le Français. Mais le CSKA a une longueur d’avance. « Osmose sportive, relations sportives avec l’entraineur, les techniciens, les dirigeants, ses coéquipiers, et en plus la possibilité d’aller chercher des titres… ce n’est pas évident à trouver ailleurs », poursuit son agent. Nando l’a confirmé sur BeIn Sports : « Je suis dans la bonne équipe et à la bonne place. Ma priorité reste le CSKA. » Tous les éléments sont réunis pour qu’il rempile. Juste après la finale à Berlin, Dimitrios Itoudis s’est vu proposer un nouveau contrat. Sauf cataclysme, l’entraîneur va poursuivre l’aventure au CSKA. Itoudis a révélé au journal Kos Magazin que son objectif était « d’atteindre et de dépasser le Real Madrid » au nombre de titres d’Euroleague. Le Real a en neuf, le CSKA sept. « C’est un grand club, mais dans la vie vous devez toujours avoir des objectifs. » Le coach grec pourra toujours compter sur Milos Teodosic, Aaron Jackson, Nikita Kurbanov, Kyle Hines, Andrei Vorontsevich et Joel Freeland, tous sous contrat la saison prochaine, sans compter les éventuelles prolongations (Cory Higgins ? Vitaliy Fridzon ? Viktor Khryapa ?). Si Nando rempile à son tour, le CSKA sera le premier candidat à sa propre succession.


Peut-il vraiment réussir en NBA ?

Le Nando De Colo de 2016 est beaucoup plus fort que celui de 2012, parti rejoindre les San Antonio Spurs après trois saisons à Valence. Rarement ces dix dernières années, un arrière n’a été aussi dominant, régulier et maître de son sujet en Euroleague. C’est pourquoi sur sa valeur intrinsèque, De Colo n’a rien à envier à une majorité de joueurs NBA et est même supérieur à plusieurs « starters » de la meilleure ligue au monde. Le seul bémol porte sur ses qualités athlétiques. La vitesse représente une barrière en NBA. Beaucoup de bons joueurs européens se sont crashés outre-atlantique à cause de cela. Les Tony Parker, Goran Dragic, Ricky Rubio voire Jose Manuel Calderon ont tous réussi à faire carrière parce qu’ils avaient la vitesse nécessaire pour répondre au défi athlétique. À l’inverse, plusieurs seigneurs du vieux continent, Sarunas Jasikevicius, Sergio Rodriguez, Nick Calathes, Raul Lopez n’y ont pas fait d’étincelles. Le passage de Vassilis Spanoulis à Houston il y a une dizaine d’années a été un bide monumental. À notre connaissance, un seul meneur européen s’est imposé en NBA sans disposer de qualités physiques hors norme, le Slovène Beno Udrih, double champion NBA avec les Spurs en 2005 et 2007, aujourd’hui à Miami. Ce constat, implacable, en dit long sur les faibles chances de Nando de s’imposer sur la durée en NBA. Elles existent, bien sûr, mais seulement à condition de trouver l’environnement adéquat et surtout le bon entraîneur. « Pour beaucoup de coaches en NBA, Nando est un ovni », rappelle Wassim Boutanos. Visiblement, l’international français a fait le choix de la raison entre l’anonymat en NBA et les titres en Europe. l