« Vous êtes sur le point de boucler votre carrière de joueuse par une finale de La Boulangère Wonderligue. Une fois de plus, vous ne partirez pas favorites contre Basket Landes. Est-ce un statut qui vous galvanise depuis le début ?
Oui, parce que ça a bien tourné. On n'a jamais été favorites, et ça s'est plutôt bien passé pour nous, donc peut-être que ça a joué. Maintenant, au vu de notre saison, je me dis que, certes on n'était pas favorites, mais moi à la place des autres équipes, je me méfierais parce qu'on est capable du pire comme du meilleur. Avant de commencer les playoffs, on avait montré qu'on était capable d'accrocher des équipes comme Bourges, Montpellier... Toutes les grosses équipes au final.
Sept ans plus tard ✨, le @tgbbasket retrouve les finales de l'élite.
— LFB (@basketlfb) May 8, 2025
Pour sa sixième participation (2004, 2009, 2010, 2011, 2018 et 2025), le club des Hautes-Pyrénées peut-il décrocher sa deuxième couronne 👑 , quinze ans après son premier titre ?#LaBoulangereWonderligue pic.twitter.com/uX21ZMjftk
Malgré votre 8e place de saison régulière, vous atteignez la finale du championnat. Vous attendiez-vous à aller si loin ?
On n'était même pas encore qualifiés en playoffs, j'ai dit aux filles de mon équipe - elles se sont toutes moquées de moi - que si on se qualifiait en playoffs, il fallait qu'on vise le titre. Je leur ai dit, je vois la façon dont on joue et je vois ce dont on est capable, et il faut vraiment qu'on se dise qu'on peut aller jusqu'en finale. Evidemment, personne ne m'a cru, mais pour moi, c'était quelque chose de possible.
Vous avez à chaque fois perdu le premier match et ensuite vous êtes revenue au match retour. Comment avez-vous fait pour vous remettre les idées en place et rattraper votre retard à chaque fois ?
Contre Bourges [au premier tour], on perd de deux points à la maison, donc ce n'est pas grand-chose. Et après, c'est peut-être là où le fait de ne pas être favorites nous a un peu aidé, c'est qu'on doit aller jouer au Prado, qu'on est seulement à -2, quelque part, il suffit juste de gagner le match. La pression était plus sur leurs épaules que sur les nôtres, parce que justement, elles avaient le statut de favorites, parce qu'elles étaient à la maison et que c'est ce match-là où il ne fallait pas qu'elles se loupent. Nous, on est parties en se disant qu'on a montré des belles choses sur le premier match et qu'on était capable de refaire la même chose là-bas.
Endy Miyem, prochaine directrice sportive du TGB : « J'ai une expérience qu'il serait dommage de ne pas partager »
Qu'est-ce qui vous a séduit dans le projet qui vous a été présenté par Tarbes pour y effectuer la dernière saison de votre carrière ?
En fin de saison dernière, je ne savais pas trop si j'allais continuer ou pas. J'attendais de voir si j'avais des projets intéressants, mais j'étais surtout en train de penser à ma reconversion. Disons que je ne voulais plus jouer pour jouer. Quelque part, je sentais déjà que c'était la fin et j'avais la sensation d'avoir fait le tour. Et justement, Tarbes s'est proposé de m'aider, de m'accompagner dans ma reconversion. Chacun se rend service : "Je viens, je joue pour ma dernière saison et vous m'aidez pour l'après". Et en plus, ça va se faire au sein du club. C'est pour ça que je me suis sentie concernée par ce projet et que j'ai eu envie de prolonger [ma carrière] ici à Tarbes.
Qu'est ce qui vous plaît dans ce nouveau métier de directrice sportive que vous vous apprêtez à exercer au TGB ?
Ce que j'aime bien, c'est que je suis toujours dans le même milieu. Ensuite, c'est l'idée de se dire que je vais faire mon maximum pour aider à la performance et d'essayer de mettre les joueuses, l'équipe, dans les meilleures conditions pour performer. Il y a aussi le fait de pouvoir continuer à travailler en équipe, d'avoir un but commun. C'est quelque chose que j'apprécie. Et je me suis dit qu'avec l'expérience que j'avais pu avoir, les différents clubs, les différentes personnes, les différentes joueuses que j'ai pu rencontrer, j'ai une expérience qu'il serait dommage de ne pas partager.

Cela veut-il dire qu'au-delà de votre saison de joueuse, vous avez déjà un peu commencé à vous plonger dans ce nouveau travail ?
Un petit peu dans le sens où je regarde comment les choses se passent. J'avais un rôle de co-capitaine ou capitaine de l'ombre aux côtés de Camille (Droguet). Donc il y avait des sujets que je pouvais prendre en main pour la décharger. Et ça m'a permis de voir un peu comment les choses pouvaient se dérouler, de pouvoir donner mon avis certaines situations. Par exemple, François (Gomez, le coach) m'a consulté un petit peu sur la cellule de recrutement. Donc petit-à-petit, je mets les pieds de l'autre côté.
Cette dernière finale de championnat de France contre Basket Landes, c'est du bonus ?
Ouais, clairement. Quand j'ai signé ici, je ne me suis pas dit qu'il fallait absolument que je sois championne de France ou que je sois en finale pour bien terminer. Je suis arrivée dans une équipe avec beaucoup de jeunes joueuses et mon but était plus d'essayer de partager, de transmettre un petit peu mon expérience en prenant du plaisir pour ma dernière saison. Maintenant, je ne dirais pas que j'ai tout réussi, mais j'ai vu pas mal de choses. J'ai envie de m'en contenter, d'être satisfaite de ce que j'ai pu vivre. Et honnêtement, je suis bien là où je suis.

Vous imaginiez-vous, au début de votre carrière, être capable d'accomplir tout ce que vous avez fini par réussir dans le monde pro ?
Pas du tout. Déjà, j'ai commencé à imaginer tard que je pouvais être joueuse professionnelle. C'est peut-être seulement à l'INSEP que j'ai pensé que j'allais y arriver, et vivre de ça. Et puis en fait, petit-à-petit, on signe à Bourges et puis on se rend compte qu'on arrive quand même à jouer, à faire quand même deux, trois trucs sympa, de gagner. C'est vraiment venu petit-à-petit. A chaque étape, j'en visais une autre et ça s'est fait plutôt comme ça, au fur et à mesure.
Qu'avez-vous appris lors de votre premier passage à Bourges ?
L'arrivée à Bourges, qui était parmi les deux plus gros clubs de France, déjà, rien que ça, ça m'a fait quelque chose. Mes coéquipières m'ont énormément appris. J'ai joué avec Cathy Melain. Mon père m'en parlait tout le temps, il aimait trop son jeu. Il n'arrêtait pas de me dire, "tu as quand même l'occasion de jouer avec une grande joueuse comme ça, il faut en profiter". Donc oui, on se rend compte de ce que ça représente de se retrouver dans cet effectif-là. Ensuite, il y a cette quête d'excellence. Quand on est à Bourges, on sait qu'on se doit de gagner, que les équipes avant nous ont gagné. C'est ça la philosophie, c'est de trouver tous les moyens pour gagner. Que tu sois fatiguée, malade, en forme, pas en forme, que tu aies fait je ne sais pas combien d'heures de voyage, tu sais qu'en fait, tu dois gagner. Ça a forgé la joueuse que je suis.
Il y a évidemment la rencontre avec Pierre Vincent. Ça a commencé très tôt. Mais forcément, je dois parler de lui. C'est lui qui m'emmène en équipe de France en parallèle. C'est un club historique. Des fans qui sont là, fidèles, et qui font vibrer le Prado sur des séries de playoffs, ou des gros matchs d'Euroleague. C'est vraiment une institution. Bourges, pour moi, ça représentait une grosse écurie française. Et puis au niveau européen, on était quand même connues et reconnues.
« À Bourges, il y a un savoir-faire et une culture de la gagne »
Dans cette quête d'excellence, qu'avez-vous remarqué dans la méthode de Bourges par rapport aux autres clubs français ?
À Bourges, tout est rodé. Dans les bureaux et au niveau du staff, c'est carré. Pour les joueuses recrutées, il y a une vraie philosophie. On sait où on va. Donc, oui, il y a un certain savoir-faire et une culture de la gagne. Quand on est habitué à gagner comme ça, il y a forcément des choses qui en découlent. C'est tout une organisation, c'est une mentalité que les filles, les unes après les autres, générations après générations, qui essaient de partager avec les suivantes pour qu'on sache que quand on arrive à Bourges, c'est comme ça que ça se passe.
En affrontant Bourges au premier tour des playoffs cette année, avez-vous senti une reconnaissance de la part des fans à votre égard ?
Oui, un petit peu. Déjà, à la suite du deuxième match, il y a eu un petit hommage qui a été réalisé. Quelques personnes sont restées dans la salle pour pouvoir partager ce moment avec moi, ça m'a fait très chaud au cœur. Après, j'imagine que parmi toutes les personnes qui étaient là au début quand je suis arrivée en 2006, malheureusement, il y en a qui nous ont quittées, mais il y en a aussi qui étaient là à mes débuts. J'ai eu pas mal de messages. Certains sont venus me voir, m'ont félicité en m'encourageant pour la fin de saison.

Quel est le premier souvenir qui vous vient en tête en pensant à votre premier passage (2006-2015) à Bourges ?
Forcément, les titres gagnés. Maintenant, j'en ai pas un seul qui me revient, mais j'en ai plusieurs. Je revois des images. Il y a eu des Coupes de France (NDLR : 2006, 2008, 2009, 2010, 2014). C'est très dur de n'en choisir qu'un parce qu'il y en a eu plusieurs marquantes. Chacun était très beau parce que les joueuses qui composaient les équipes étaient différentes. À chaque fois, j'ai vécu des expériences folles. C'est aussi pour ça que je suis restée neuf ans d'affilée sur mon premier passage. J'aimais les gens avec qui je jouais, on a partagé des moments juste dingues.
Le fait de ne pas avoir remporté l'Euroleague, ça reste votre plus grosse déception à Bourges ?
Oui. On a quand même fait de très beaux parcours avec les moyens qu'on avait à l'époque. Il y avait quand même des clubs russes qui étaient vraiment au-dessus et qui explosaient les budgets. Ce sont des équipes qu'on a réussi à battre. Mais quand on arrivait au Final Four, c'était plus compliqué. Néanmoins, c'est sûr que oui, ça aurait été pour moi le rêve de pouvoir la gagner avec Bourges. Ça aurait été vraiment juste extraordinaire. Mais disons que j'ai plus de regrets de ne pas l'avoir fait avec Koursk au vu des moyens qui étaient mis sur la table.
« En Russie, il y avait une scission entre les joueuses russes et étrangères »
Par rapport à Koursk, pouvez-vous nous expliquer ce choix de vous expatrier en Russie ? Qu'est-ce qui vous a attirée là-bas ?
Dès que j'ai commencé en tant que pro, c'est quelque chose que j'ai eu envie de faire, de pouvoir partir, jouer à l'étranger, découvrir un nouveau continent ou tout simplement un nouveau pays. C'est ce que j'ai pu faire quand j'ai eu la proposition de Koursk qui est arrivée. La Russie, en plus, je me suis dit que c'est dingue. Peu de gens peuvent se dire qu'ils ont vécu en Russie. C'est aussi pour l'aventure humaine, pour le dépaysement total et de vivre quelque chose hors du commun. Ça, c'était vraiment quelque chose qui m'attirait. C'était la deuxième meilleure équipe de Russie. Et financièrement parlant, c'était autre chose [rires] !
Comment avez-vous vécu cette année en Russie, tant sur le plan humain que sportif ?
Ça a été très dur à tous les niveaux, dans le sens où je quittais Bourges. Quand je parlais de tous les effectifs que j'avais vus là-bas, il y avait toujours une ambiance particulière, de la cohésion. Il y avait ce côté de club familial. Sauf que là, en arrivant à Koursk, c'était différent. Il y avait vraiment une scission entre les joueuses étrangères et les joueuses russes. Et même au sein des joueuses étrangères, tu avais les joueuses américaines d'un côté et de l'autre, les Européennes. Je ne me suis pas retrouvée dans tout ce que j'avais vécu pendant mes 9 ans à Bourges.
Ensuite, sur le terrain, ça a été dur de trouver ma place et de feater dans le collectif. Il m'a fallu un petit peu de temps pour passer du 5 majeur à Bourges où j'étais dans ma zone de confort à sortir du banc. À côté, tu as des Américaines. Il faut commencer à se battre pour sa place. Au début, ça a été un petit peu dur. Sur la fin de saison, ça a été mieux, mais c'est vrai que j'ai eu besoin d'un temps d'adaptation.
Après cette courte expérience russe, vous êtes partie en Italie à Schio, un championnat moins relevé à l'échelle européenne...
J'y suis allée parce qu'il y avait Isabelle Yacoubou qui y était. Elle m'a parlé du fait que forcément, c'était différent, elle qui avait aussi joué en Russie. Elle m'a dit, tu verras, là c'est une autre atmosphère, une autre ambiance beaucoup plus proche de Bourges, un club familial où les gens sont plus proches les uns des autres. Et à ce moment-là, c'était de ça dont j'avais besoin, de retrouver des connexions et cette envie de pouvoir partager avec les gens qui sont autour de moi. En Russie, ça m'avait manqué. Donc, je me suis dit, pourquoi pas ? Et puis, encore une fois, financièrement, c'était pas mal non plus [rires]. Je n'étais pas encore prête à rentrer en France. Je restais un peu sur un semi-échec de cette saison à Koursk. Donc, j'avais vraiment envie de pouvoir vivre autre chose et de pouvoir me prouver que j'étais capable d'évoluer et de me sentir bien dans un club étranger.

Avant votre retour en France justement, vous avez connu une dernière expérience à l'étranger, aux Minnesota Lynx en WNBA. Racontez-nous les dessous de cet été 2018 ?
À Koursk, j'avais joué avec Seimone Augustus (NDLR : légende du Lynx, où la numéro 1 de la draft 2006 a évolué jusqu'en 2019). On avait déjà évolué ensemble. Et puis, le fait que à ce moment-là, le mari d'Edwige Lawson (NDLR : coéquipière d'Endy Miyem en sélection), James Wade, était assistant là-bas, a rendu l'expérience possible. C'est ce qui a fait que je me suis retrouvée là-bas. Ils connaissaient mon profil.
À Minneapolis, vous avez côtoyé des joueuses exceptionnelles comme Maya Moore ou Sylvia Fowles. A quel point avez-vous trouvé la WNBA au-dessus des autres ligues de basket ?
À tous les niveaux. Rien que les moyens qui étaient mis, même au niveau médical, il y avait du monde. Les assistants, je ne sais pas combien ils étaient. On s'entraînait au même endroit que les Wolves. C'est de la qualité, ça brille. Il y a de la moquette partout avec le logo. Tu as ton nom dans le vestiaire, sur une plaque qui est gravée. Tout est mieux. Après, on a joué dans des salles mythiques. Au Staples Center, tu te dis « wow, mais où est-ce que je me trouve ? » Tu arrives à la salle, tu n'as rien dans les mains. Tous tes trucs d'entraînement, ils sont là-bas, ils sont lavés après chaque entraînement. Tu as autant de t-shirts ou de goodies que tu veux. C'est juste dingue. En fait, on veut vraiment que tu performes. Tu n'as pas à penser à autre chose que jouer.
Vous avez été coupée à quelques jours des playoffs. Quelles explications la franchise vous a-t-elle données pour justifier son choix ?
À ce moment-là, on avait un problème de blessure, si j'ai bien compris. C'était un peu particulier au niveau des contrats et de la masse salariale. Ils voulaient faire venir une joueuse pour remplacer notre meneuse qui était blessée. Mais en la faisant venir, il fallait qu'ils libèrent de la place. C'est moi qui ai été coupée.
Comment l'avez-vous vécu ?
Ce n'était pas agréable. En plus, je crois que c'était un matin de match. Si je ne dis pas de bêtises, on était au shooting parce que je me revois dans la salle de match. La coach me dit « Endy, viens voir » ! Je me dis « Ça ne sent pas bon ça ». Et elle m'explique. À partir du moment où elle m'a dit « on va devoir se séparer de toi », j'ai eu comme une espèce de bug. Je ne sais pas exactement tout ce qu'elle a pu me raconter. Forcément, c'était une déception parce que j'aime aller au bout des choses.
Mais bon, même dans les moments compliqués, j'essaie de prendre du recul et de trouver le positif. Là, ça me permettait de rejoindre l'équipe de France, heureusement. J'ai rejoint les filles en stage. Je crois qu'elles étaient à Anglet. Je les ai rejoints et elles m'ont fait un super accueil. Ça m'a aidée à passer à autre chose plus rapidement. Et puis après, avec le temps, je me suis dit que j'avais eu la chance de pouvoir voir ce que c'était, moi qui n'avais jamais osé pensé pouvoir aller en WNBA. J'aurais aimé que ce soit plus long, mieux, différent. Mais, au moins, j'y suis allée.
Par rapport à l'équipe de France, vos parents étant d'origine camerounaise, cela vous a-t-il traversé l'esprit de représenter une autre nation que la France en sélection ?
Non, ça a toujours été la France. Je suis née à Reims et j'ai commencé à jouer au basket ici. Ça s'est fait naturellement, donc je ne vais pas dire que c'est l'équipe de France qui m'a sélectionnée, mais il n'y a pas eu de choix à faire réellement. [...] Maintenant, si le Cameroun était venu et m'avait proposé, bon, ça aurait peut-être été différent. Mais dans mon cas, ils ne se sont pas manifestés. Je n'ai pas eu d'appel ou quoi.
Quel a été votre meilleur souvenir avec les Bleues ?
Les Jeux Olympiques de Londres de 2012. C'était un truc dingue d'être qualifiée pour les Jeux Olympiques alors qu'on était passées par des qualifs pour le championnat d'Europe en 2008. On repartait un peu de zéro avec un nouveau groupe. Il y avait pas mal de jeunes joueuses. La plupart, on n'avait déjà rien vécu. C'était nos premières compétitions à chaque fois : l'Euro, le Mondial, tout ça. Donc arriver aux Jeux, c'était juste... On était comme des enfants. C'était juste le kiff d'être à Londres, aux JO, de voir des Usain Bolt et toutes les stars mondiales de tous les sports. C'était ce qui primait au départ.
Je me souviens aussi que Pierre Vincent, suite à un match amical face à l'Angleterre où on avait été nulles, avait remis un peu les pendules à l'heure. Il nous avait aussi montré le tableau, il nous a dit que c'était assez ouvert. Nous, on n'y croyait pas forcément. Et puis en fait, on commence à gagner des matchs dans une atmosphère juste extra parce que c'est serré, il y a du monde dans les salles... C'est vraiment un tout qui fait que tu vis le moment comme si tu étais à Disney en fait. Pour notre parcours, on s'en sort bien parce qu'on a quand même vécu des matchs dingues. Mais on était portées par un truc, une énergie, une insouciance qui a fait de cette aventure mon meilleur souvenir en équipe de France.

À l'inverse, quel est votre souvenir le plus douloureux en sélection ?
L'Euro 2013, en France. On sort des JO où on a été vice-championnes olympiques et là, je ne vais pas dire logiquement, mais où on se dit qu'on a des arguments pour viser le titre. Malheureusement, on tombe sur notre bête noire, l'Espagne. On a une équipe de fous mais on perd, en France, avec du monde qui est là, qui est venu nous encourager. C'est la grosse déception parce qu'on sait qu'on était capable de le faire. On fait un espèce de non match, comme la plupart de nos finales. C'est ça qui est rageant.
À quel point était-ce important pour vous de représenter la France sur la scène internationale ?
C'était important. J'en parlais avec les filles de mon équipe qui me disaient "mais c'est quand même ouf, tu joues jusqu'à 36 ans - bientôt 37 d'ailleurs. Moi, je pense que je n'aurais pas fait ça." Je leur ai répondu que, tenir aussi longtemps ce n'était pas nécessairement le plan mais que ce qui m'a fait tenir justement, c'est l'équipe de France. Parce que c'est particulier. C'est encore plus grand que le club. Tu représentes ton pays, tu as sur les épaules le maillot "France", tu vis des émotions et des expériences juste dingues. Tu te dis que tu as envie de pouvoir lever le drapeau de ton pays le plus haut possible.
C'est ça qui me faisait avancer à chaque fois. Quand j'étais à l'étranger, revenir pour l'équipe de France, c'était aussi ma bouffée d'air frais. C'était un peu la carotte qui me disait "bon allez, même dans les moments compliqués, t'inquiète, il y aura l'équipe de France". Tout ce que je faisais, c'est parce qu'il y avait les Bleues. Je ne veux pas dénigrer les moments que j'ai vécu en club mais je pense que si je n'avais pas eu l'équipe de France ou si ça s'était arrêté plus tôt, je n'aurais peut-être pas joué aussi longtemps.
Malgré la déception d'être laissée sur le côté pour les JO de Paris cet été, vous avez tout de même été porteuse de la flamme, qu'est-ce que vous avez ressenti en recevant cette immense reconnaissance ?
C'était très particulier, mais j'avais surtout de la fierté par rapport à ma famille. À ce moment-là, je pensais surtout à eux et je me disais qu'ils devaient être fiers. En plus, on avait fait une petite fête, on avait invité pas mal de la famille, des amis, tout ça. Donc, je me dis que quelque part, je les représentais eux aussi en tenant cette flamme. C'est mon nom de famille, le nom de mon père et de toute une lignée qui la portait.
« La force de la France, c'est son énorme vivier »
Vous disiez aussi, par rapport à votre poste de consultante, que vous alliez "vivre les Jeux par procuration", comment s'est passée cette nouvelle expérience ?
J'avais été contactée durant la saison et j'avoue qu'à ce moment-là, je me disais "Je ne sais pas si je dois accepter". Je n'avais pas encore de nouvelles [du sélectionneur]. Je me suis posée la question pendant un bon moment et puis après, je me suis dit "tu dis oui et au pire, si vraiment tu es sélectionnée, je pense qu'on te laissera partir". C'était un sorte de lot de consolation au cas où je n'étais pas sélectionnée. Au final, j'ai bien fait d'accepter.
Une fois là-bas, on me dit que je vais devoir commenter les filles et les garçons. Je me suis dit "Ça va être très chaud. Je n'ai jamais commenté de ma vie". Là, j'ai commencé à regarder plus de matchs, essayer de connaître tous les joueurs, les équipes nationales. J'ai bossé. Ensuite, ça s'est plutôt bien passé. Je suis tombée sur des journalistes qui m'ont beaucoup aidée, qui m'ont donné des conseils et qui m'ont aidée à progresser dans ce rôle de consultante. C'était juste dingue parce qu'en plus, j'étais accréditée. Je pouvais aller voir quasiment toutes les compétitions quand je ne travaillais pas. C'était les Jeux par procuration. J'y étais et j'ai vécu un truc différent, que je n'espérais pas d'ailleurs, mais c'était juste fou.

Si vous avez été laissée sur le côté, c'est aussi car Jean-Aimé Toupane a voulu donner la priorité à la nouvelle génération. Que pensez-vous du talent de ce nouveau vivier qui émerge en France ?
Directement, je pense à une fille comme Dominique Malonga. Maintenant, on arrive à sortir ce genre de profil. Une fille super grande, super habile, jeune, athlétique, qui dunke même. À côté de ça, on a tellement de filles qui sont là actuellement, et d'autres qui sont en attente. La force de la France, c'est d'avoir un vivier énorme. On a toujours eu des résultats sur toutes les dernières compétitions. On est toujours ressorti avec une médaille. Même quand on effectue un changement de génération, on a toujours réussi à rester au plus haut niveau. Et ça, c'est parce qu'on a une jeunesse talentueuse et un vivier qui est inépuisable. Quand on les voit évoluer, pour parler de la dernière compétition aux Jeux Olympiques, qui est a deux doigts de battre Team USA, je pense qu'il n'y a rien à ajouter.
Vous qui avez connu le championnat de France, quasiment de votre première à votre dernière saison, que pouvez-vous nous dire sur l'évolution de celui-ci ?
Je dirais que le championnat de France a toujours été parmi les meilleurs. Maintenant, il faut qu'on soit vigilant pour pouvoir garder ce statut. On voit qu'il y a pas mal de la fuite de nos talents pour diverses raisons. C'est un avantage quelque part dans le sens où ça donne l'occasion et de la place pour des jeunes de pouvoir avoir de la place dans des effectifs et de pouvoir jouer rapidement. Mais c'est un peu dommage de voir nos meilleures joueuses partir en très grand nombre. Il faut juste qu'on arrive à être vigilant pour trouver les solutions et être avant-gardiste pour que l'on puisse rester une ligue d'excellence. »




