Basket Europe continue de s'intéresser aux Français(e)s évoluant à l'étranger. Entretien avec le pivot international Jerry Boutsiele (2,07 m, 32 ans, 4 sélections) qui nous raconte sa nouvelle vie aux Émirats Arabes Unis. Pour profiter de nos premiums en intégralité, abonnez-vous.
« Après votre passage dans plusieurs clubs turcs (Bahçesehir, Pinar Karsiyaka), qu'est-ce qui vous a motivé dans le choix de signer à Dubaï et de changer de continent - du moins géographiquement ?
Il n'était pas prévu que je joue à Dubaï au début d'année, j'étais basé au Pinar Karsiyaka, à Izmir. Mais suite aux problèmes financiers qu'a rencontrés le club au cours des quatre premiers mois de la saison, j'ai dû faire un choix, celui de partir avec ma famille. Dubaï était l'une des propositions. J'en avais d'autres en Espagne, en Israël, et plusieurs autres pays en Europe. Mais compte tenu de la situation et aussi du projet qu'on m'avait présenté par rapport à l'équipe de Dubaï, il me semblait que c'était la meilleure solution à prendre pour moi et pour ma famille. C'est comme ça que je me suis retrouvé là-bas début janvier avec l'équipe.
Le fait d'être le premier Français de l'histoire du Dubaï BC vous a-t-il octroyé un statut particulier au club ?
Non, du tout, parce qu'en fait, toute l'équipe est composée de joueurs étrangers. Il n'y a pas un seul joueur qui vient des Émirats Arabes Unis. On a des joueurs de l'Europe de l'Est, des Italiens, des Américains, et même un Turc aussi. En vrai, il n'y a aucune différence, on ne prend pas en considération le fait que je sois Français. J'ai eu des messages de mes proches, de mes amis, qui ont été surpris en disant qu'ils n'avaient aucune idée qu'il y avait une équipe à Dubaï. C'était une équipe toute nouvelle, qui ne faisait pas beaucoup de bruit. Mais non, ça ne nous donne aucun plus d'être Français ici. Je croise des Français à la salle ou même dans la rue, mais par rapport au club, il n'y a aucun privilège, aucun passe-droit.
Étant donné que l'équipe est composée seulement de joueurs étrangers, vous devez converser en anglais. Est-ce également le cas hors des parquets ?
Oui, la plupart des personnes ici, je dirais même 80-95 % des personnes habitant à Dubaï parlent anglais. Il y a de toutes les origines, que ce soit des indiens, des pakistanais, des arabes, des italiens, des allemands, tout le monde parle anglais. C'est vraiment une ville très cosmopolite. Il y a, je crois, 135 nationalités qui sont représentées à Dubaï. Dans l'équipe, on parle anglais sans problème, même si évidemment, il y a des Serbes et des Slovènes qui parlent le même langage. Mais entre nous 100 % du temps, on converse en anglais.
« Je comprends pourquoi les gens essaient de venir vivre à Dubaï parce que la qualité de vie est vraiment très bonne »
Fait-il bon vivre à Dubaï ? Vous y plaisez-vous depuis maintenant quelques mois ?
Ah oui, bien sûr ! (sic) J'avais évidemment entendu des choses à gauche à droite sur cette ville. C'est une ville très nouvelle, ça ne fait que très peu d'années que les gens commencent à venir vivre ici. La qualité de vie est vraiment très bonne, il fait beau tous les jours, il fait très chaud. C'est aussi une ville très sécurisée, très safe, franchement, pour une vie de famille, c'est l'idéal. Non, je n'ai rien à redire sur la vie de Dubaï, je comprends pourquoi les gens essaient de venir vivre ici, parce que la qualité de vie est vraiment très bonne.
Y'a-t-il des avantages fiscaux ou financiers à venir vivre à Dubaï ?
Oui, ici, il n'y a pas de problème récurrent comme il pouvait y avoir dans la plupart des clubs en Turquie. Ici, il n'y a pas de retard de salaire, tout est vraiment encadré, on prend vraiment soin des joueurs à tous les niveaux. Comme ça, nous, on a juste une chose sur laquelle on doit se concentrer, c'est le basket. Pour le reste, tout est pris en charge par le club, ils font bien en sorte qu'il n'y ait aucun souci extra-sportif ou sportif pour que le joueur performe. Donc là aussi, je n'ai clairement pas à me plaindre.

Avez-vous développé des affinités particulières avec certains coéquipiers ?
Oui, bien sûr, il y a des joueurs contre qui j'ai joué plusieurs fois dans ma carrière. D'autres avec qui j'ai déjà évolué aussi, comme Danilo Anđušić, avec qui j'ai joué à Monaco il y a trois ans maintenant. Certes, ce n'est jamais facile d'arriver en cours de saison dans un effectif, parce qu'on ne connaît pas les habitudes des joueurs, on ne connaît pas leur personnalité. Mais mes coéquipiers m'ont tout de suite mis à l'aise. On a vraiment que des bons gars dans cette équipe, on a vraiment une alchimie, que ce soit sur le terrain, ou en dehors.
Au niveau du basket, y'a-t-il quelque chose qui vous a particulièrement marqué à votre arrivée dans ce club ?
Je dirais l'ego. C'est une équipe de très haut niveau, on veut tous performer, c'est sûr, collectivement, mais aussi individuellement, mais il n'y a pas de question d'ego. À la fin, on veut tous atteindre le même but. Je vois bien que tout le monde s'est mis à la page, tout le monde s'est mis au diapason, et qu'on est tous sur la même longueur d'ondes. Personne ne reste en retrait ou à l'écart dans l'équipe. À aucun moment, j'ai senti qu'il y avait quelque chose de négatif sur le groupe. Il vit très bien, et justement, on a besoin de ce genre de collectif pour avoir du succès.
« On a entre 5 et 6 000 personnes qui viennent à chaque match »
On sait que le Final Four de l'Euroleague aura lieu cette année aux Émirats, à Abu Dhabi. Comment est le public émirati ?
L'ambiance est très bonne. On joue à la Coca-Cola Arena, une salle d'à peu près 16 000 places, et elle est remplie à peu près à 40 %. Ça veut dire qu'on a entre 5 et 6 000 personnes à chaque match, qui viennent nous voir. C'est assez surprenant d'ailleurs, parce que quand on parle de culture basket, c'est clairement pas à la ville de Dubaï à laquelle je pensais. J'étais agréablement surpris, parce que pour mon premier match à domicile, il y avait énormément de monde. Il y avait 4 500 personnes, qui habitent ici, qui sont de passage ou qui viennent passer des vacances et qui ont envie de voir du basket pendant leur séjour ici.
La culture n'est pas la même que dans les autres grands clubs d'Europe, mais ça va venir avec le temps. Oui, les gens ont critiqué (le choix de) Dubaï parce que c'est assez loin. Mais la Coupe du monde (de football) a eu lieu au Qatar en 2022. Les grands événements sportifs se passent ici à Doha, à Abu Dhabi, à Dubaï... Je pense que ça va être une place forte du basket dans les prochaines années à venir. Les gens peuvent être rassurés : qu'il y ait des gros matchs ou pas, il y a toujours du monde pour pouvoir apprécier le basket ici.
Ressentez-vous une croissance de l'intérêt des fans pour le basket à Dubaï depuis votre arrivée ?
Un peu oui, parce qu'on fait parler de nous dans les médias. Avec notre projet ambitieux et l'Euroleague, les gens commencent à savoir qu'il y a une équipe à Dubaï. Au début, ils ne s'y intéressaient pas trop, mais ça va venir. Là ce n'est que la première année, et pour un début c'est vraiment pas mal. Il ne faut pas être impatient, ça va venir avec le temps, donc je ne m'en fais clairement pas pour le club de Dubaï dans les années à venir à ce niveau.
Vous évoluez cette saison en ABA League, est-ce que ça ne fait pas un peu bizarre d'évoluer dans un championnat sans aucune autre équipe Emirati ?
Non, parce que la ligue adriatique est déjà composée de plusieurs pays, Bosnie, Slovénie, Monténégro, Croatie, Serbie, et maintenant les Émirats Arabes Unis. Je ne me focalise pas dessus, je me contente de jouer. Par contre, c'est sûr qu'on fait beaucoup de déplacements et beaucoup d'heures de vol. On est très loin, à peu près 5 heures de vol minimum à chaque fois en déplacement. C'est une ligue que je découvre aussi, l'ABA League, je n'y avais jamais joué auparavant. Je ne tiens pas en compte le fait qu'on soit dans un pays étranger dans la ligue. On est nouveaux, certes, mais on va dire que c'est juste un pays en plus qui se rajoute dans ce championnat.
La ligue a-t-elle facilité vos déplacements, par exemple l'organisation de road trip quand vous jouez à l'extérieur ?
Oui, entre les 6 heures de vol et en plus un décalage horaire d'une heure ou deux, ce n'est pas évident de partir la veille de match pour la récupération. Dans 90 % des cas, on part deux jours avant, c'est-à-dire que si on a un match samedi, on part le jeudi, on s'entraîne le vendredi, on joue samedi, on rentre le dimanche. On part quatre jours en déplacement sur une semaine. C'est énorme, mais cette année, on joue seulement un match par semaine. On a le temps de s'organiser. L'année prochaine, on verra bien comment c'est, s'il y a une coupe d'Europe. Mais le club fait en sorte qu'on voyage dans les meilleures conditions à tous les niveaux, que ce soit dans le déplacement en avion ou l'hôtel. On a des hôtels haut de gamme pour pouvoir nous faciliter le voyage. A ce niveau-là, c'est vraiment le top.
« À Karsiyaka, on était dans l'incompréhension et la désinformation à tous les niveaux »
Pour revenir sur votre aventure en Turquie, comment l'histoire s'est-elle terminée ?
Le club (Pinar Karsiyaka) avait des problèmes financiers depuis début juillet, mais quand on est arrivé en août, on nous a seulement dit que le sponsor principal avait quitté le club. On était dans l'incompréhension et la désinformation à tous les niveaux. Personne ne nous a tenu au courant de ce qui se passait en coulisses, on nous demandait seulement d'être professionnels, de jouer. Donc on a fait notre job, mais on voulait aussi des réponses à nos questions. On n'en a pas eues. Avec le manque de communication entre le staff, le conseil d'administration et les joueurs, il y a eu une rupture à la fin décembre. Suite à cela, tous les joueurs étrangers ont quitté le club en cours de saison. Concernant mon cas, je ne joue pas pour l'argent, je joue parce que j'aime le basket. Mais je suis un professionnel, je ne joue pas gratuitement non plus. Je me suis donc retrouvé à Dubaï une semaine plus tard pour pouvoir jouer dans la ligue adriatique.

Gardez-vous malgré tout un bon souvenir de votre aventure turque, notamment de votre passage à Bahçeşehir ?
Oui bien sûr, c'était ma première expérience à l'étranger. C'est vraiment un club familial où j'ai été très bien accueilli. J'ai passé deux merveilleuses années à Istanbul. Pour une première expérience à l'étranger, je peux vraiment dire que c'était vraiment le top du top. On prenait vraiment soin des joueurs. Le président et le GM m'ont accueilli vraiment comme un nouveau membre de la famille quand je suis arrivé. Même à Izmir, je garde un très bon souvenir. C'est dommage parce qu'on avait une équipe compétitive, on pouvait vraiment jouer le titre cette année-là. Mais les choses ont fait que les chemins se sont séparés, c'est la vie d'un sportif. Peut-être qu'un jour je retournerai en Turquie, je ne sais pas. Pour l'instant, je suis à Dubaï. On verra dans les années à venir comment ça se passe, mais pour l'instant je suis ici.
« Le championnat français est le plus athlétique d'Europe »
Quelles différences avez-vous pu remarquer entre les championnats turcs et français lors de votre passage ?
Le championnat français est le plus athlétique d'Europe. Quand je l'ai quitté, je pense que c'était un peu moins fort qu'aujourd'hui. Avec des équipes comme le Paris Basket et Bourg-en Bresse qui ont fait une finale d'Eurocup l'année dernière, maintenant on est dans le top des compétitions européennes. Comparé au championnat turc, je pense que les deux se valent. On a des équipes référencées en Turquie, même en dehors de celles d'Euroleague comme le Fener et Efes. À Istanbul, on a des équipes comme Galatasaray et Besiktas qui jouent le haut du tableau en Europe. Mais si je dois comparer les niveaux des joueurs étrangers, je pense qu'ils sont un peu plus qualitatifs en Turquie.
Comment est la Ligue Adriatique comparée aux deux autres championnats que vous avez connus en Turquie et en France ?
C'est moins fort, il ne faut pas se mentir. Je joue des équipes moins fortes, comme des équipes du Monténégro, ou en Slovénie. En dehors des deux équipes de Belgrade, l'Étoile Rouge et le Partizan, avec aussi le Budućnost Podgorica (Monténégro), les équipes sont moins qualitatives que les équipes turques ou françaises. C'est clairement un championnat moins fort où je vois bien que c'est moins athlétique.

Vous avez rejoint un club avec plusieurs stars européennes à la mi-saison (Davis Bertans, Klemen Prepelič), que pouvez-vous nous dire sur la qualité globale de l'effectif du Dubaï BC ?
C'est un effectif de très grande qualité. Quand on m'a parlé du projet Dubaï, on m'a parlé de certains joueurs, comme Bertans qui arrive tout droit de la NBA. C'est un effectif de très grande qualité, on a une équipe niveau Eurocup. C'est une équipe compétitive, je l'ai remarqué dès les premiers entraînements. C'est une équipe qui n'est pas là pour faire de la figuration. On est deuxième actuellement - quand je suis arrivé, l'équipe était quatrième ou troisième - avec un coach, un staff, et une équipe de très grande qualité.
On a pour ambition de gagner le titre, cette équipe a été taillée pour ça malgré tout ce que les gens peuvent dire. Ça a beau être une équipe jeune, à la fin on voit bien le classement. On est deuxième de la ligue adriatique et on veut aller gagner le titre à la fin de saison. Je suis très content d'avoir des joueurs de ces qualités, plus on joue avec des joueurs forts, plus on progresse, je suis très content d'évoluer à leurs côtés cette saison.
Même si vous n'étiez pas là en début de saison, est-ce que les objectifs fixés à votre arrivée, sont en train d'être surpassés par la performance que vous êtes en train de réaliser ?
Au début de saison, ça m'étonnerait que le club ait affirmé dans les médias qu'il voulait directement gagner le titre. Mais plus on avance dans la saison, plus je me rends compte que c'est quelque chose de réalisable et je pense que toutes les personnes qui gravitent autour du club le réalisent. Donc oui, je pense qu'on ne peut plus forcément se cacher derrière ça en se disant que pour la première année du club c'est plutôt pas mal. On est ambitieux et il faut aller au bout. On a montré qu'on pouvait battre le Partizan Belgrade, on a battu l'Étoile Rouge deux fois. Il faudra compter sur nous pour les finales qui vont se jouer mi-juin à la fin de saison.
« Si on ne gagne pas le titre d'ABA League, ça sera une déception »
Voir le titre d'ABA League vous échapper serait une vraie déception en cette fin de saison ?
Bien sûr, on n'est pas huitième ou dixième du championnat, on est deuxième. On l'est pour une raison, parce qu'on a envie de gagner. Si on ne gagne pas le titre, évidemment que ce sera une déception, qu'on sorte au premier tour, en demi-finale ou en finale. À la fin, quand on est engagé dans quelque chose et qu'on a décidé qu'on voulait ça, si on n'a pas ce qu'on veut, c'est clairement un échec. Je peux parler au nom de tout le monde, si je dis qu'on ne gagne pas le titre, même si ce n'est que la première année d'existence du club, ça sera une déception, c'est sûr.
Ressentez-vous un vrai engouement auprès de l'ABA League d'avoir intégré Dubaï à leur championnat ?
Je pense que oui. On connaît tous la ville de Dubaï, on a tous vu des choses à la télé, des reportages, des informations dessus dans les médias. Je pense que c'est bien pour la ligue adriatique d'avoir une équipe aussi attractive que Dubaï. En termes d'exposition médiatique, c'est bien parce que c'est un produit vendeur. En disant que Dubaï, ce n'est pas que des vacances, c'est aussi un club de basket qui est très sérieux, avec un projet ambitieux. Ça fait plutôt joli en vitrine pour la ligue adriatique.

Pensez-vous que Dubaï peut recevoir une place en Euroleague dès la saison prochaine ?
Je pense que oui. Il faut, bien sûr, réunir quelques conditions. Il y a des ingrédients à mettre dans le saladier pour ça. Mais je pense que oui, le club de Dubaï a de sérieux arguments pour pouvoir soumettre son projet. On sait que le président de l'Euroleague était là pendant le match contre le Partizan. Il doit y avoir des discussions très sérieuses à ce niveau-là. Je pense que le club de Dubaï peut jouer l'Euroleague l'année prochaine. Je ne sais pas quels sont les prétendants, à part le club de Tel-Aviv qui a gagné l'Eurocup. Je ne sais pas ce qu'il se passe en coulisses. Je n'ai pas forcément demandé d'explications au GM, au président, ni au propriétaire. Mais je pense que oui, Dubaï a toutes ses chances pour pouvoir l'intégrer dès l'année prochaine, ce qui serait une incroyable progression pour le club.
Est-ce un sujet de discussion dans le vestiaire entre les joueurs ?
Pas forcément, on voit beaucoup de choses sur les médias, sur Instagram, sur Facebook, mais on n'en parle pas forcément plus que ça entre nous. Même le coach, avant les entraînements, il fait son speech en nous disant que l'Euroleague ou l'Eurocup, c'est pour l'année prochaine, et que là, on a une saison à finir et un titre à aller chercher. On y va step by step, on ne se presse pas, on ne se projette pas sur l'année prochaine. Là, on est clairement focus sur cette année et après, on verra qui sont les joueurs qui resteront, qui partiront quand la saison sera finie. Ça serait une erreur monumentale de se focaliser là-dessus maintenant.
Qu'est-ce qui vous manque le plus ici à Dubaï par rapport à votre vie et vos années passées en France ?
Je dirais la bonne nourriture française, les bonnes pâtisseries, les bons desserts qu'on a en France. On en a ici aussi, mais ce n'est pas pareil. Ce n'est jamais fait de la même façon. Par exemple, ici, dans les croissants, il y a toujours un truc en plus. On met du chocolat, on met du fromage. Moi je préfère les vrais croissants français !
« À mon poste, il y a énormément de concurrence en équipe de France. Ce n'est pas forcément un objectif que je me suis fixé. »
Ces derniers temps, on voit beaucoup de joueurs Français partir pour l'étranger, est-ce qu'il y a une raison à cela selon vous ?
Il y a la fiscalité, il ne faut pas se mentir. Il y a des top joueurs français qui ne sont pas forcément payés à leur juste valeur à cause de la fiscalité. Par exemple, un top joueur français, aujourd'hui, touche entre 15 et 20 000 euros (par mois). Alors qu'il pourrait gagner plus en gardant le même niveau de jeu dans une ligue espagnole ou une ligue turque. Le niveau de jeu peut expliquer ça aussi, surtout en Espagne, qui est le meilleur championnat d'Europe pour moi. C'est une Ligue où on est habitué à jouer contre des équipes de haut de tableau dans toutes les compétitions européennes. On joue contre Barcelone, Madrid, Valence, Malaga, Bilbao, etc.
Il y a également l'exposition médiatique. C'est dans une ligue comme celle-là que l'on devient vraiment très référencé. Avec tout le respect que j'ai pour eux, ce n'est pas en jouant contre Le Portel, Boulazac, ou Gravelines-Dunkerque que l'on va être le mieux référencé en Europe. C'est en jouant contre des grosses équipes comme en Turquie. On joue contre des clubs mythiques, Galatasaray, l'Anadolu Efes, Fenerbahçe. C'est comme ça que l'on devient un joueur référencé, que l'on peut vraiment être jugé et payé à sa juste valeur. C'est pour ça que la plupart des meilleurs joueurs français ne jouent pas en France.
À 32 ans, vous réalisez une très belle saison au sein d'une équipe qui a le vent en poupe. Pensez-vous pouvoir prétendre à revenir en équipe de France un jour grâce à cela ?
Honnêtement, je ne pense pas. J'ai déjà fait l'équipe de France il y a trois ans, mais ce n'est pas forcément un objectif de carrière que je vois en me disant qu'il faut absolument que je fasse une compétition internationale avec l'équipe de France. C'est sûr que si je suis appelé, j'irai avec grand plaisir, mais ça n'est pas forcément une fin en soi pour moi. A mon poste, il y a énormément de concurrence avec Wembanyama, Rudy Gobert, Mathias Lessort, Vincent Poirier, etc. Il y a de très gros joueurs de très grande qualité. Ce n'est pas forcément un objectif que je me suis fixé.

Suivez-vous toujours les résultats de Monaco, votre ancien club ?
Oui, bien sûr. Je regarde l'Euroleague toutes les semaines. Ils sont très bons, Monaco finit toujours en haut de tableau quoi qu'il arrive. C'est l'une des équipes les plus talentueuses du championnat. Ils ont le MVP de l'année dernière, Mike James. Donc oui, je crois en leurs chances d'aller au Final Four et de gagner le titre à Abu Dhabi. Ça ne va pas être facile contre Barcelone, et ils ne seront sûrement pas favoris du Final Four, mais sur un match, tout peut se jouer.
Comptez-vous rester à Dubaï pour la saison prochaine, qu'il y ait une compétition européenne ou non ?
Pour l'instant, j'ai signé seulement pour les six derniers mois de la saison, jusqu'en juin. On n'a pas encore parlé de mon contrat avec le GM et le président du club. Il nous reste encore un ou deux mois de compétition, en comptant les playoffs. Après ça, on verra ce qu'il en est, si je reste à Dubaï ou si je pars. Mais il y a plusieurs conditions à ça, il faut qu'on en parle. Mais pour l'instant, je suis là avec l'équipe, je me concentre dessus et on verra ce qu'il se passe après les playoffs.
« Finir ma carrière en France, ce n'est pas dans mes plans »
Est-ce que vous envisagez un jour de revenir en France, ou même peut-être d'y terminer votre carrière ?
Déjà, j'espère jouer le plus longtemps possible et au très haut niveau, mais finir ma carrière en France, ce n'est clairement pas dans mes plans. Après, une carrière, c'est fait d'aléas, d'imprévus, on ne sait jamais ce qui peut se passer. Me retrouver à Dubaï, jamais je ne l'aurais imaginé. On verra dans les deux ou trois prochaines années, mais en tout cas, ce n'est pas dans mes plans de finir ma carrière en France.

Vous avez, depuis votre arrivée, la meilleure évaluation de l'effectif, avec une moyenne au-dessus de 16. Est-ce que vous arrivez à ressentir le bien que vous faites à vos coéquipiers sur le parquet depuis que vous êtes au Dubaï BC ?
Je ne savais même pas, je n'ai pas regardé les stats d'évaluation. Après, j'ai été briefé par rapport aux exigences du club et de l'équipe. Il y a le coach qui m'a parlé en me disant ce que je devais apporter. Tout ce qu'il m'a demandé d'apporter à l'équipe, c'est ce que je fais depuis que je joue au basket. C'est d'apporter de l'intensité, de l'impact physique dans la raquette, d'être un vrai point de fixation aussi dans la raquette. Et après, d'apporter de la défense aussi, de laisser jouer mon jeu. Juste de m'exprimer sur le terrain, c'est ce que j'essaie de faire au maximum avec l'équipe depuis que je suis ici. Je pense que le coach est satisfait de ce que je produis. Je vais continuer à faire ce que je fais, simplement. Je vais aider mes coéquipiers au maximum et leur apporter toute mon énergie et tout mon basket pour pouvoir performer. Et surtout les aider à aller chercher ce titre à la fin de la saison.
Pensez-vous produire actuellement le meilleur basket de votre carrière, sur un plan individuel comme collectif ?
Individuellement, j'ai fait des meilleures saisons statistiques à Bahçeşehir quand j'y étais. Ici, mon rôle est différent que celui que j'avais là-bas. J'étais la première solution offensive à Bahçeşehir. Cette année, je ne le suis pas forcément. Mais dans une équipe comme ça, c'est normal. Quand on a une équipe de très grande qualité autour, avec des joueurs de grosse qualité, la menace vient de partout. Elle peut venir de Davis, de Klemen, de moi ou de plein d'autres joueurs de l'équipe. Après, c'est comme ça qu'il faut s'adapter.
Il faut essayer de trouver le fit et de savoir ce qu'on peut apporter à l'équipe. Je sais que la chose que je peux apporter à l'équipe, c'est mon intensité, ma dureté, l'impact physique que j'ai dans la raquette au niveau du rebond et au niveau de la défense. Je me sens très bien dans cette équipe. Tout le monde partage le ballon. L'harmonie et la cohésion sont bonnes, en attaque comme en défense. »