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Interview (2) – Vincent Lavandier (coach Glasgow Rocks): « on se pose même la question de savoir si la ligue va continuer d’exister »

Photo: Ovie Soko (FIBA) La suite et la fin de l’interview de Vincent Lavandier, le coach des Glasgow Rocks.

Photo: Ovie Soko (FIBA)

La suite et la fin de l’interview de Vincent Lavandier, le coach des Glasgow Rocks.

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Le niveau de la BBL et des jeunes :

La BBL c’est un championnat que je suis depuis à peu près 15 ans. Je suis un malade de scouting. J’ai Synergie et quand je n’entraîne pas, je regarde tous les jours une dizaine de matches. C’est un championnat qui a vraiment progressé. Pour moi, le top 4 -et on pourrait mettre Newcastle dedans sauf qu’ils ont plein de blessés- a un niveau Pro B. Les JFL français sont meilleurs que les britanniques mais comme on a droit à 5 étrangers ça favorise le niveau de jeu. Il y a aussi beaucoup de double nationalités avec tous les Américains et Canadiens qui ont un grand-père en Angleterre plus des Américains qui ont un passeport italien par exemple et qui jouent comme Bosman. Des Nigérians aussi. Il y a un Australien qui a joué en première division australienne qui joue à Plymouth qui a un passeport anglais. Par ailleurs, je ne comprends pas pourquoi les centres de formation français ne vont pas chercher de jeunes Anglais. Les Espagnols le font. Il y a beaucoup de jeunes joueurs anglais qui sont en Espagne. Il y en a encore plus qui partent aux Etats-Unis car c’est un pays qui est proche de l’Angleterre. Beaucoup de ces jeunes jouent à 18 ans dans la première division anglaise et écossaise. J’ai mis le plus jeune joueur de la BBL sur le terrain, il a 16 ans. J’en avais de 16, 17, 18 et 20. Ma moyenne d’âge était de 24 ans en considérant que Gareth Murray, qui est un ami et que j’ai coaché en France, a 34 ans. Il y a beaucoup de jeunes qui peuvent jouer. Ça varie suivant la mentalité des coaches comme en France. Moi j’aime bien les découvrir donc je les fais jouer. J’ai failli signer comme coach des U20 ans de l’équipe de Grande-Bretagne. Ça ne s’est pas fait car mon propriétaire a refusé de me libérer. Il y a donc un vrai potentiel mais il n’y a pas de formation d’entraîneurs. Tu peux être entraîneur en première division après un week-end ! Mais dès qu’ils vont en Espagne et qu’ils ont une formation de qualité comme on peut en avoir en France ces jeunes progressent. Il y en a un qui était au Real de Madrid et qui a été prêté en 3e division en Espagne. Pareil pour un autre qui est à Valencia car il y a cette notion de partenariat. C’est une vraie culture en Espagne avec les Sénégalais. Valencia a un camp tous les étés en plein cœur de l’Angleterre où ils voient une centaine de gars. Ils savent qu’ils peuvent récupérer de vrais potentiels pour quedalle. Il y a une équipe du Royaume Uni (NDLR : Myerscough College) qui joue en EYBL, une ligue qui réunit des écoles, des centres de formation, de plusieurs pays européens, et elle a gagné cette année (NDLR : 14 victoires pour 1 défaite). Parmi les cinq meilleurs joueurs, il y a un Anglais. Il a 18 ans, il joue en Nationale 1, soit en deuxième division en Angleterre et il tourne à 19 points par match contre des séniors. Il va partir en Espagne.

L’équipe nationale de Grande-Bretagne :

C’est très athlétique, pas mal du tout. J’étais lors de leur victoire sur les Allemands (NDLR : 81-73. Ainsi l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne et le Monténégro sont à égalité avec une victoire dans le Groupe G des qualifications à l’Euro 2021). Beaucoup de joueurs refusent de venir car c’est le bordel pour les entraînements, mais ils ont un gros potentiel. Pour les deux matches contre l’Allemagne et le Monténégro, ils avaient un entraîneur par intérim (NDLR : Marc Steutel) qui est prof universitaire à Newcastle. Beaucoup de joueurs sont en NCCA, la moitié je crois dans l’équipe des U21. Ils ont un problème stratégique, c’est dû aux entraîneurs. Ils ont aussi un programme qui est très basé sur les Etats-Unis comme du temps de la CBA quand tout le monde jouait à un contre cinq. Les plus vieux font un peu ce qu’ils veulent. Ils n’ont pas la culture européenne du jeu de passes, sans ballon. Comme ils n’ont pas d’argent, ça pose aussi des problèmes. Quand je devais prendre les U20, je voulais commencer la préparation début juin pour une compétition en juillet et ils m’ont dit : « non, début juillet. » En gros, il y avait 5 entraînements et 3 matches et on faisait le championnat d’Europe.

« Mon équipe a été construite avec 80 000 euros net mensuels, mes 12 joueurs. Il y a des équipes en N2 française qui ont plus d’argent »

Salaires, salles, logements :

Il y a des manques d’infrastructures pour l’entraînement. Quand il y a un évènement à l’Emirates Arena, je n’ai pas ma salle d’entraînement. Je dois anticiper et demander à d’autres centres de loisirs et sportifs s’ils sont libres. Je fais comme ça cinq ou six terrains différents. Mon fils joue à Trélazé et la salle municipale est mieux que celle où j’entraîne. J’arrive sur des terrains où parfois le panier est de travers et les filets déchirés. Je passe moi-même le balai pour pas que ça glisse. J’étais tout seul, il n’y avait pas d’argent pour un assistant. Il y avait un préparateur physique mais de 24 ans, c’est un étudiant qui passe une thèse avec l’université de San Francisco Berkeley, un truc monumental. Tous mes joueurs avaient un cuissard avec des capteurs à tous les entraînements et il faisait une analyse sur les effets de l’entraînement sur les fibres musculaires, en fonction du type de joueurs -meneur, extérieur, intérieur-, et du type d’entraînement que je faisais. Il était le seul au monde à faire ça depuis deux ans et en plus je ne le payais pas ! C’est tout. La kiné, je ne la voyais que les jours de match. C’est comme pour l’équipe nationale, il n’y a pas d’argent (…) Il y a des équipes, Leicester, Newcastle et Londres et London City avant qu’ils arrêtent, où il y avait des contrats à 6 000, 8 000 livres (6 800 et 9 100 euros). (Justin) Robinson qui a joué en Pro B (Saint-Quentin) gagne trois fois plus à Londres. Il m’a dit qu’il était là avec sa famille, c’est Londres, il s’entraîne de temps en temps. Nous, on était l’avant-dernière masse salariale comme Manchester et Cheshire. Worcester n’a plus d’argent. Bristol a de l’argent mais n’en met pas dans les salaires. Plymouth a maintenant plus d’argent car c’est un club de première division turque qui a racheté en février. Mon équipe a été construite avec 80 000 euros net mensuels, mes 12 joueurs. Il y a des équipes en N2 française qui ont plus d’argent. Le salaire moyen est de 950 livres par mois (1 086 euros). Et j’en ai qui joue pour zéro. J’avais un Ricain qui jouait pour 600 livres à 17 points par match. Sur les 12 clubs à l’origine, 7 ont des salaires comme les miens. Les autres ont beaucoup d’argent mais Londres et chère. Il y a aussi la difficulté des logements. A Cheshire et Manchester, les joueurs étrangers logent tous dans la même maison. Nous, ce n’était pas le cas, il y avait plus d’argent dans les logements et il y avait deux joueurs par duplex et une voiture pour les deux. Les joueurs étaient contents car dans les autres clubs ce n’est pas comme ça. En fait, si on n’avait pas de gros salaires, on dépensait un peu d’argent sur les choses annexes. Glasgow n’a pas d’argent mais c’est une structure professionnelle un peu comme en France. J’ai formé des entraîneurs. J’ai pris des étudiants basketteurs comme en NCAA et il y a plein de clubs qui font ça. A Londres, tu n’es pas toujours payé ; la preuve à London City, ils ont mis la clé sous la porte. Les deux frères Lavrinovic (NDLR : Darjuš et Kšyštof, 40 ans) jouaient là-bas. Ils les ont pris pour le buzz car il y avait la guerre entre les deux clubs de Londres et beaucoup de Lituaniens et ainsi la salle était remplie. Ils ne s’entraînaient pas, ils repartaient au pays en semaine pour revenir le vendredi et jouer le samedi (…) Il n’y a pas d’équipes britanniques dans les coupes d’Europe. Même pour jouer en FIBA Cup, il faut mettre un billet et personne n’est capable de le faire.

Les liens avec la NBA :

Nick Nurse a été champion de BBL (NDLR : avec Birmingham en 1996 et Manchester en 2000) avant d’être champion NBA avec Toronto. Le GM de Toronto (NDLR : Masai Ujiri) est un ancien joueur et champion de BBL. Deux assistants de Toronto viennent aussi de la BBL. Il y a aussi (Alton) Byrd qui est vice-président des opérations commerciales aux Brooklyn Nets qui est un ancien de la BBL. Il y a Pops Mensah-Bonsu en G-League (NDLR : general manager de Capital City Go-do). Il y a plein de connexions comme ça entre d’un côté la Grande-Bretagne et la BBL et la NBA. Robert Archibald, un Ecossais qui est décédé cette année, a joué en NBA. Un Ecossais !

Photo: Le teaser des finales de playoffs prévues le 17 mai à l’O2 de Londres mais qui ont été annulées.
« On se pose même la question si la ligue va continuer d’exister »

Un sport d’évènementiel :

Ils prennent le basket comme un évènementiel. C’est pour ça qu’il y a du monde aux finales. Il y a une image marquante : pour un match de championnat, les coaches même des grandes équipes sont en survêtement et quand ils vont en finale, tu les vois tous en costard-cravate. Ils s’en fichent des matches, ce qui compte ce sont les finales car c’est de l’évènementiel. C’est pour ça que l’O2 est pleine. A l’échelle de Glasgow, mon propriétaire ne parle que d’évènements. C’est le sport en Ecosse le plus populaire pour les familles. Comme ça joue beaucoup en jeunes, les gamins viennent aux matches. Je ne vois pas une famille venir en France à quatre ou cinq et payer 80 euros. La salle de Manchester est pleine à craquer alors qu’ils n’ont pas gagné un match de la saison. En terme de réseaux sociaux, c’est de la folie. C’est géré par des gamins qui sont par exemple dans des études de community manager, les clubs les récupèrent et tu as l’impression que ce sont des pros car ils balancent plus de choses que les clubs professionnels en France (…) La finale à l’O2 aréna c’est la moitié du budget de la ligue. Ils ont déjà dépensé 250 000 livres pour la location de la salle. La salle peut faire en configuration maximum 23 000 personnes ; je ne sais pas quelle configuration ils avaient choisi mais au moins 10 000. Ils font trois finales : la Cup, c’était blindé comme tous les ans, soit 6 ou 8 000 personnes, ils font le Trophée qui est à Glasgow, le 16 mars, c’était un peu vide peut-être 600 personnes dans un salle de 6 000 car il y avait déjà des mesures en Ecosse contre le coronavirus, ils n’ont même pas joué le match de foot Rangers contre Celtics !, ils ont donc déjà perdu de l’argent. Et donc ils ne peuvent pas en plus faire la finale des playoffs à l’O2. C’est pour cela qu’ils n’ont pas arrêté le championnat, ils l’ont simplement suspendu, ils espèrent faire un jour la finale mais ils ne la feront jamais car ils parlent de ne pas faire d’événementiel avec du public en Angleterre avant janvier 2021. Donc on se pose même la question de savoir si la ligue va continuer d’exister.

La suite de sa carrière :

Contractuellement, je suis sous contrat. Mais mon propriétaire m’a signifié qu’il ne pourra pas financièrement l’honorer puisqu’il ne sait même pas si l’année prochaine il y aura toujours la BBL et encore moins s’il y aura Glasgow. Donc en gros, si je trouve quelque chose il serait content comme ça je ne réclamerais pas d’argent (sourire). Si ce n’est pas le cas, il faudra que j’y retourne, qu’il paye, ça sera un peu chaud. Apparemment, il n’y aura pas de matches avant novembre-décembre et sans public, uniquement pour la télé, avec une reprise avec les fans en janvier si tout va bien. J’aimerais bien trouver autre chose pour sécuriser la famille. Il y a un président de Nationale 1 qui a dit à mon agent, « la BBL c’est nul ! ». « OK. Vous avez regardé un match ? » « Non ». Les gens ne se rendent pas compte. Les deux équipes qui jouent le plus à l’européenne, c’est la mienne et Worcester. On a les mêmes principes avec leur coach de jeu de passes et sans ballon. Ce n’était pas un hasard si on était les deux meilleures défenses. C’est ce que j’ai appris ici avec par exemple Jacques Monclar et Greg Beugnot quand j’étais leur assistant (NDLR : au Paris Basket Racing et à Chalon). C’est pour ça que l’on n’avait pas les meilleurs joueurs mais la meilleure équipe. Là-bas, ce qui est impressionnant c’est qu’à l’entraînement, ils font tout à fond. Ils sprintent. Un bon coach de Pro B m’a dit qu’il n’y a plus de passion chez les jeunes joueurs français. Gareth Murray m’a dit que lorsqu’il était à Chalon il avait trouvé les Français fainéants. Là-bas c’est tout l’inverse. Les vieux, les jeunes, tout le monde est passionné. Le mec qui ne joue pas, il te dit « merci coach ! » J’avais un Français cette année à Glasgow, Maxime Djo Ebala, que j’avais eu auparavant à Angers. Je l’avais prévu qu’il allait être surpris et il m’a dit, « c’est incroyable, les mecs sont à fond dès l’échauffement. » En fait c’est une culture du sport.

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Le niveau de la BBL et des jeunes :

La BBL c’est un championnat que je suis depuis à peu près 15 ans. Je suis un malade de scouting. J’ai Synergie et quand je n’entraîne pas, je regarde tous les jours une dizaine de matches. C’est un championnat qui a vraiment progressé. Pour moi, le top 4 -et on pourrait mettre Newcastle dedans sauf qu’ils ont plein de blessés- a un niveau Pro B. Les JFL français sont meilleurs que les britanniques mais comme on a droit à 5 étrangers ça favorise le niveau de jeu. Il y a aussi beaucoup de double nationalités avec tous les Américains et Canadiens qui ont un grand-père en Angleterre plus des Américains qui ont un passeport italien par exemple et qui jouent comme Bosman. Des Nigérians aussi. Il y a un Australien qui a joué en première division australienne qui joue à Plymouth qui a un passeport anglais. Par ailleurs, je ne comprends pas pourquoi les centres de formation français ne vont pas chercher de jeunes Anglais. Les Espagnols le font. Il y a beaucoup de jeunes joueurs anglais qui sont en Espagne. Il y en a encore plus qui partent aux Etats-Unis car c’est un pays qui est proche de l’Angleterre. Beaucoup de ces jeunes jouent à 18 ans dans la première division anglaise et écossaise. J’ai mis le plus jeune joueur de la BBL sur le terrain, il a 16 ans. J’en avais de 16, 17, 18 et 20. Ma moyenne d’âge était de 24 ans en considérant que Gareth Murray, qui est un ami et que j’ai coaché en France, a 34 ans. Il y a beaucoup de jeunes qui peuvent jouer. Ça varie suivant la mentalité des coaches comme en France. Moi j’aime bien les découvrir donc je les fais jouer. J’ai failli signer comme coach des U20 ans de l’équipe de Grande-Bretagne. Ça ne s’est pas fait car mon propriétaire a refusé de me libérer. Il y a donc un vrai potentiel mais il n’y a pas de formation d’entraîneurs. Tu peux être entraîneur en première division après un week-end ! Mais dès qu’ils vont en Espagne et qu’ils ont une formation de qualité comme on peut en avoir en France ces jeunes progressent. Il y en a un qui était au Real de Madrid  partir en Espagne.

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