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Le Mans inside – Le coach Elric Delord : « Je voulais être entraîneur, mais il y a tellement peu de places qu’il fallait un plan B »

Arrivé au Mans comme assistant de Dounia Issa, en 2019, Elric Delord a été rapidement promu coach principal, et son contrat a été prolongé jusqu’en 2023. Malgré les perturbations dues au Covid-19 et à de multiples blessures, il s’est déjà fait la réputation d’un coach qui gagne.

Arrivé au Mans comme assistant de Dounia Issa, en 2019, Elric Delord a été rapidement promu coach principal, et son contrat a été prolongé jusqu’en 2023. Malgré les perturbations dues au Covid-19 et à de multiples blessures, il s’est déjà fait la réputation d’un coach qui gagne.

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Qu’est-ce qui vous a poussé à abandonner votre job au CNRS à Bordeaux pour être coach de basket ?

J’ai toujours voulu être en priorité entraîneur. J’ai arrêté mes études pendant un an pour passer mes diplômes d’entraîneur avant de les reprendre. Mon travail d’entraîneur, qui se faisait à Bègles avec les jeunes, me permettait de payer mes études. Je voulais être entraîneur, mais il y a tellement peu de places, c’est tellement fermé comme monde, qu’il fallait un plan B dans lequel je pouvais aussi m’épanouir. C’est pour ça que j’ai eu une carrière en informatique. Et puis j’ai eu l’opportunité d’arriver à l’ASVEL avec Pierre Vincent et je l’ai saisie. En fait, j’étais à cette époque assistant en Nationale 3 à Mérignac et j’ai remplacé l’entraîneur de Nationale 3 qui était malade, et il se trouve que c’était un ami d’enfance de Pierre Vincent. C’est pour ça qu’il y a eu une connexion, lorsque Pierre Vincent a cherché un assistant notamment avec des compétences informatiques, car l’idée était de développer des logiciels pour avoir des valeurs objectives sur ce qui était efficace ou pas dans le jeu. J’avais donc le bon profil pour Pierre à l’époque, et c’est comme ça que je suis arrivé à l’ASVEL.

A l’époque, il y avait beaucoup de spécialistes vidéo dans les clubs français ?

Pas tant que ça. L’idée était d’aller beaucoup plus loin, de sortir des stats que l’on ne peut pas avoir sur les sites classiques, que ce soit au niveau des stats avancées et de la rentabilité des systèmes de jeu. Comme personne ne connaît nos systèmes de jeu, c’était d’avoir notre propre rentabilité par rapport à ça, que ce soit aussi l’association des joueurs puisqu’il y a des combinaisons qui fonctionnent mieux que d’autres. C’était surtout pour avoir des valeurs objectives et pas seulement un sentiment.

Il faut visionner plusieurs fois chaque match ?

Non, non, une seule fois, mais -on appelle ça tager-, on rentre des informations sur chaque possession. Qui est sur le terrain ? Qu’est-ce qu’on joue ? Quelle était la défense adverse ? Etc. Ensuite, le logiciel prend les données que l’on rentre quand on regarde le match, et qui sort des stats là-dessus. On en fait au MSB, mais ça ne s’est pas développé tant que ça en France. En NBA, évidemment, c’est ultra utilisé, en Euroleague aussi. C’est l’idée aussi d’avoir des informations qui permettent de prendre du recul sur ce que l’on voit et que l’on pressent. On peut imaginer que je sens une association pertinente, la qualité des joueurs, offensive et défensive, mais c’est quand même bien de le valider par des chiffres. On peut se tromper car émotionnellement, on a l’impression de, mais dans les chiffres, pas tant que ça. C’est toujours cette histoire d’efficacité.

Lorsque vous êtes arrivé au MSB comme assistant, vous aviez dans la tête un jour de devenir coach principal ?

Je voulais être entraîneur principal, sauf qu’étant assistant, c’est difficile d’avoir des postes. J’avais besoin de changer d’air par rapport à l’ASVEL, de voir autre chose puisque cela faisait six ans que j’y étais et j’avais connu pas mal de choses. Dounia (Issa) prenait le poste ici (NDLR : de head coach) et j’étais venu pour l’aider au maximum.

Qu’est-ce que ça change dans la vie de tous les jours de passer de l’ombre à la lumière en tant que coach principal ?

Oui, ça change parce que dans la rue, ou quand j’emmène mon fils à l’école, les gens peuvent me reconnaître. Non, car ça reste une ville assez tranquille dans l’ensemble, et ça ne change pas ma façon ni d’être, ni de faire.

Existe-t-il la peur du couperet alors qu’un assistant va effectuer quoiqu’il arrive la durée de son contrat ?

Il existe toujours cette épée de Damoclès. On sait que c’est un métier « à risques ». On a vu Monaco se séparer de Zvezdan Mitrovic alors que c’était le meilleur entraîneur du championnat et de l’Eurocup il y a encore quelques mois. Donc, ça peut aller très vite dans un sens comme dans l’autre. La vérité, c’est que je n’étais pas prévu pour être entraîneur ici, donc je passe plus de temps à essayer de profiter, de tenter des choses. J’ai discuté l’autre jour avec un entraîneur et je lui ai dit : « pour moi, le meilleur entraîneur de l’histoire, c’est Vincent Collet et il a été viré deux fois (NDLR : à Villeurbanne et Strasbourg). Qu’est-ce qui te fait penser que tu ne seras jamais viré ? Alors, oui je me ferai virer, le plus tard possible, le moins souvent possible, mais quitte à se faire virer, autant que ce soit avec nos propres idées, notre propre façon de faire, en essayant de construire sur le court, moyen et long terme avec le club, mais avec nos idées, car ça arrivera un jour qu’on se fera virer. »

Au Mans, l’espérance de vie d’un coach est assez longue, si on exclue Dounia Issa. Alain Weisz, Vincent Collet, JD Jackson sont restés longtemps.

Oui, même Erman Kunter est resté deux ans et demi, Eric Bartecheky deux ans et il est parti de lui-même. C’est un club qui est stable, mais bon…

Certains coaches sont d’anciens internationaux, comme JD Jackson, Erman Kunter, et vous, vous avez joué en Régionale 1. Est-ce plus difficile, au moins en amont, d’avoir de la crédibilité lorsqu’on n’a pas joué à haut niveau ?

Puisque je l’ai vécu, je pense qu’à partir du moment où on a été un joueur de haut niveau, on a de la crédibilité d’entrée par rapport à quelqu’un qui ne l’a pas été. Pour autant, les joueurs ne sont pas stupides et ils se rendent vite compte si l’entraîneur sait où il va et s’il les aide à progresser ou pas. Et, en conséquence, la crédibilité augmente ou baisse à ce moment-là, que l’on ait été joueur professionnel ou pas. Il y a d’anciens grands joueurs pro qui n’ont pas réussi en tant qu’entraîneur. Il faut arriver à comprendre que ce sont deux métiers différents. L’avantage d’avoir été joueur professionnel, c’est que l’on connaît le milieu, on sait ce qui se passe derrière les portes. Ça donne un avantage là-dessus, mais encore une fois, être entraîneur, c’est un métier différent.

On constate que toutes les équipes ont des ossatures de joueurs américains, et pourtant il n’y a pas de coachs américains en Betclic Elite. N’est-ce pas compliqué au niveau de la gestion humaine d’avoir à faire avec une majorité de joueurs américains ?

Je ne pense pas. Ce qui m’intéresse personnellement, ce sont les compétences, et j’ai toujours pensé que la nationalité en n’est pas une. L’année dernière, on avait un Anglais, un Lituanien, un Canadien. Il y a aussi un rapport qualité-prix. Le vivier des joueurs américains est tellement fort que c’est forcément la loi de l’offre et de la demande. Plus il y a des joueurs d’une certaine nationalité et moins c’est cher pour une qualité équivalente dans d’autres pays. Ce qui me parait important, c’est de mettre en avant, de comprendre, les uns et les autres, tous ces gens de cultures différentes. Ça nous enrichit plus que ça complique les choses.

Vous regardez de 7 à 10 matches de basket par semaine. Vous faites des paris avec le directeur sportif Vincent Loriot pour savoir celui qui en mate le plus ?

Non (rires). Mais parfois, on échange des messages sur les matches sur sms. Après, je suis plus intéressé par les matches d’Euroleague, d’Eurocup, avec les équipes françaises mais pas que ça, forcément notre prochain adversaire, là où Vincent va élargir son champ. Il va regarder n’importe quel match de coupe d’Europe d’une équipe par moment lambda parce qu’il pense qu’il peut y avoir un joueur intéressant. J’essaie de m’enrichir tactiquement, et lui regarde plus dans la perspective de recruter.

Photo : Scott Bamforth (FIBA)

« On n’est pas obligé de gueuler pour que les messages passent »

Vous n’êtes pas un coach turbulent sur le bord de touche. Mais à l’intérieur de vous, c’est comment ?

J’essaie de maîtriser mes émotions car quand je me laisse prendre par elles, souvent je n’ai pas assez de recul, la tête froide pour faire des choix qui soient cohérents. Ils peuvent être bons ou pas bons -on ne le sait que lorsqu’ils ont été faits- mais je sais que si je me laisse déborder émotionnellement, je ne vois plus grand-chose. Ça ne m’empêche pas non plus de dire ce qu’il y a à dire, on n’est pas obligé de gueuler pour que les messages passent. C’est une légende urbaine. Lorsque je regarde les yeux dans les yeux un joueur, et que froidement je lui dis quelque chose qui ne m’a pas plu, le message passe au moins aussi fort que si je lui gueulais dessus. L’idée pour moi est d’avoir un message honnête avec le joueur, en gardant un maximum de respect possible. On peut discuter d’un point de vue, ce n’est pas parce que quelqu’un dit quelque chose qu’il a forcément raison. Je pense que c’est lorsque l’on additionne différents points de vue que l’on prend la meilleure décision. C’est pour ça que le rôle d’assistant est important.

Et vis à vis des arbitres, c’est plus positif que ceux qui éructent sur eux ou, au contraire, on se fait moins entendre ?

La vérité, c’est que quand je dis quelque chose aux arbitres, ils m’écoutent. Si on gueule en permanence, on devient un bruit de fond. Ça dépend aussi des arbitres, ce sont des êtres humains et l’impact est différent selon chacun d’eux. Je veux surtout rester moi-même. Gueuler contre les arbitres, ça veut dire quoi ? Quel est le message que l’on envoie aux jeunes, à nos joueurs ? Oui, ils peuvent faire des erreurs, mais moi aussi, on perd des ballons, on rate des tirs, on n’a pas bien joué telle action. Il faut d’abord se concentrer sur nous car on est loin d’être parfait, et c’est normal.

La saison dernière, vous aviez une équipe talentueuse, de combattants, animée par Ovie Soko, et en raison du Covid-19 et de multiples blessures, vous n’avez terminé que septième si bien que vous n’avez pas été qualifié directement pour la BCL. Il n’y a pas plus frustrant comme scénario ?

(Il soupire) Oui, il y a eu de la frustration car on peut penser que l’on aurait pu faire mieux que ça, car il y a pas mal de matches où l’on est à 5-6 pros, mais la vérité… c’est que l’on ne sait pas. Quand il y a eu toute l’équipe, il y a eu aussi des matches où on n’a pas été bons. Je pense, par exemple, au match à Gravelines où l’on prend une volée. Donc, on peut penser que, mais au final, on ne sait pas ce que cela aurait donné. Je préfère garder l’état d’esprit qui nous a permis d’arracher des victoires alors qu’on était en difficulté, juste par le nombre de joueurs qui pouvaient jouer.

Vous n’avez pas réussi à vous qualifier pour la saison régulière de BCL. Décider d’une qualification européenne alors que vous êtes juste en préparation de la saison, ça devait être un casse-tête au niveau de la montée en puissance de l’équipe ?

Il a été voté en fin de saison dernière avec le syndicat des joueurs d’avoir une pré-saison de six semaines, pour que les playoffs puissent se dérouler fin juin. Manque de bol, ça a signifié pour nous que l’on est arrivé au tournoi BCL avec 10-15 jours de préparation en moins que les équipes adverses, sans compter que Kaza (NDLR : le meneur canadien Kaza Kajami-Keane) était toujours blessé, ce qui n’était pas prévu, que Zachery Peacock n’est pas venu, donc il a fallu prendre un autre joueur, qui est arrivé début septembre, que Williams Narrace a fait la CAN et qu’il est arrivé aussi début septembre, que Scott (Bamforth) et Terry (Tarpey) ont eu une semaine, dix jours, où ils ont été blessés. Lorsqu’on cumule le tout, c’est presque normal finalement que l’on échoue. Je pense aussi que le format de la BCL n’a pas aidé du tout puisque sur les 8 têtes de série (NDLR : le MSB en faisait partie), il y en a 7 qui ont perdu en demi-finales, donc lors de leur premier match, et la 8e a perdu en finale. Clairement, de commencer en demi-finales n’a pas du tout aidé par rapport à ceux qui ont commencé en quarts. Ils étaient déjà dans la compétition alors que nous on devait y entrer.

Jusqu’à présent, votre équipe a parfois été très séduisante et à côté de ça, elle a fait des contre-performances comme une défaite à domicile contre Pau, et puis à Cholet et Orléans. Peut-on expliquer ça rationnellement ? L’absence du meneur de jeu titulaire n’est-elle pas une bonne part de l’explication sachant que votre équipe manque parfois de tenue ?

Oui. Il était prévu d’avoir Kaja, qui est un joueur majeur et qui est meneur de jeu. Ça impacte surtout dans les moments où on est en difficulté. On a aussi un effectif qui est jeune. Matthieu Gauzin, Kenny Baptiste, Deishuan Booker, c’est très jeune, Valentin Chery découvre la Betclic Elite cette année, Williams Narrace, c’est seulement sa deuxième année, ce sont des joueurs de 23-24 ans, Dante Cunningham est certes un joueur expérimenté mais il découvre l’Europe, la façon de jouer, qui est complètement différente de ce qu’il a connu ces douze dernières années. Cela explique en partie les hauts et les bas. Après, très honnêtement, pour regarder pas mal de matches de haut niveau, c’est partout pareil. Je me souviens de Milan-Bayern en quart-de-finale d’Euroleague, l’année dernière, une équipe qui a +20 à la mi-temps et qui perd le match.

Je suppose que lorsque le MSB a re-signé Kaja Kazami-Keane, personne n’imaginait qu’il en aurait pour aussi longtemps dans sa convalescence ?

Déjà, il a signé au mois de décembre de l’année dernière. Il rate les Jeux Olympiques pour passer son été sur de la rééducation. Après, il y a des choses qui se sont compliquées, ce n’est malheureusement pas une science exacte, et il y a des choses que l’on a du mal à expliquer. J’ai envie de prendre l’exemple de Sergio Ramos. Au PSG, ils ont des moyens illimités, et Sergio Ramos n’est toujours pas sur le terrain. Ça prouve bien que ce n’est pas aussi facile que ça. Il y a des choses que l’on ne peut pas anticiper. Il ne devait pas y avoir de problèmes sur sa reprise mi-août. On retarde un peu, et encore un peu. Il y a des progrès qui sont là mais qui ne sont pas suffisants. Après ça se gère au cas par cas. C’est pour ça que Taylor Rochestie est venu en début de saison. Kaza devait jouer au départ de Taylor, mais ce n’était pas toujours suffisant. On s’est dit alors qu’il nous fallait un joueur de plus car si Deishuan Booker, Matthieu Gauzin ou Scott Bamforth se blesse, on est mort. On ne savait toujours pas si Kaza allait revenir, et dans le doute, on a pris Darius (Johnson-Odom) à ce moment-là.

Dante Cunningham est l’un des joueurs venus en France avec le plus de matches en NBA au compteur et pourtant c’est l’anti-star, il est très sobre dans son jeu, qu’il a encore une certaine fraicheur, alors que souvent les anciens NBAers sur le retour sont carbo ?

Déjà, il prend énormément soin de lui. Il a pris conscience il y a longtemps que son corps est son outil. Ça lui permet cette longévité. Ensuite, son état d’esprit est irréprochable. Il a été un joueur de rôle. Ce n’était pas la superstar de son équipe, il défendait, il prenait des rebonds et il pouvait sanctionner s’il y avait une impasse sur lui en attaque, mais ce n’était pas la première option. Ça lui a permis d’être dans l’humilité. Je lui ai dit en le recrutant que le basket ici n’avait rien à voir avec ce qu’il a connu. Je lui ai demandé s’il était prêt à apprendre un nouveau basket ou pas, que s’il restait sur ce qu’il a connu, il allait se frustrer, et que ça n’allait pas aller ni pour lui, ni pour l’équipe. Ça lui a plu. Il est venu, il n’y a pas longtemps, pour me dire qu’à 34 ans, il était content d’apprendre un autre basket. C’est salutaire dans un groupe.

Il y a trois jeunes de talents au Mans, Mathieu Gauzin, Kenny Baptiste, et Hugo Meniandi. Est-ce difficile pour un coach de les insérer dans les plans d’une équipe qui se doit d’être performante de suite ?

Oui, c’est difficile car il y a une prise de risques. Il y a eu des exceptions comme Théo Maledon, Killian Hayes, Nicolas Batum ici, mais ce n’est jamais facile d’intégrer des jeunes joueurs. Il faut accepter qu’il fasse un peu plus d’erreurs que les autres, de fermer parfois les yeux, et en même temps de passer beaucoup de temps avec eux car ils sont encore en formation. On essaye de créer un environnement où l’on passe beaucoup de temps sur du travail individuel, sur de la compréhension de jeu, et il faut des leaders qui ont envie de transmettre à ces jeunes joueurs, qui aident le staff à les encadrer. Aujourd’hui, c’est plutôt satisfaisant puisque sur les équipes qui font jouer deux ou trois jeunes joueurs, nous sommes plutôt en haut de classement. Ça démontre que ce n’est pas si facile que ça quand on dit « il faut faire jouer les jeunes ». J’ai toujours dit à mes jeunes joueurs que s’ils veulent jouer, il faut être performants. Plutôt que de fuir comme d’autres ont pu le faire, ils se sont accrochés et je suis content qu’ils puissent nous aider à gagner des matches.

Lorsque, la saison dernière, vous vous êtes retrouvés en effectif très limité, Hugo Meninandi a bien assumé les minutes qui lui ont été données ?

Oui, mais cela a été un bien pour un mal car il n’a que 18 ans, et comme il a joué en pro, il peut penser que. Alors que, non, il y a encore beaucoup de travail à faire avant de. Oui, il a joué, oui, il a fait des choses intéressantes, mais on n’a pas non plus gagné beaucoup de matches pendant cette période-là. L’idée, c’est d’abord d’être performant pour gagner des matches, mais Hugo est clairement un projet du club.

Photo : Dante Cunningham, Sam Bamforth et TaShawn Thomas (FIBA)
Photo : FIBA

« Quand on débute le championnat, on devrait savoir que telle place est qualificative pour telle coupe d’Europe, pour y avoir clair »

N’y a-t-il pas un côté démotivant pour un coach de savoir que les places en Euroleague sont interdites, et encore plus de ne pas savoir à quelle place il faut se classer pour avoir une coupe d’Europe, laquelle sera l’Eurocup ou la BCL, suivant le bon vouloir de chacun ?

C’est pénible. On fait partie des rares sports où les règles du jeu changent pendant le jeu. Quand on débute le championnat, on devrait savoir que telle place est qualificative pour telle coupe d’Europe, pour y avoir clair. Cela ne nous empêche pas de vouloir gagner un maximum de matches, d’essayer d’être le plus haut possible. Là, ce n’est pas toujours facile à gérer, notamment pour les reconductions de contrat. Un joueur peut vouloir rester, mais il veut une coupe d’Europe, sinon il s’en va. Ça complique les choses grandement. Après, c’est comme ça, on fait avec.

Recruter Dante Cunningham et peut-être encore plus TaShawn Thomas, qui a été dans le 5 All-Stars de la BCL, alors que l’on ne sait pas si on fait ou pas une coupe d’Europe, ce qui est arrivé, ce n’est pas évident ?

Ce n’est pas évident… L’été, on le sait. Là, on savait que l’on avait le tour préliminaire, et j’ai été clair, en disant : « on va tout faire pour se qualifier, mais peut-être que ça ne sera pas le cas. Si tu viens, il faut que tu saches que peut-être on ne jouera pas de coupe d’Europe. » Le problème, il est plus sur des reconductions de contrat au mois de mars, par exemple.

Si on prend ce qui s’est passé l’année dernière, il faut être dans le top 6 pour faire avec une certitude une coupe d’Europe ?

Et encore, on ne sait pas. C’était, je crois, 3 équipes Eurocup et 3 BCL, il y a deux ans, et là c’est 2 et 2. Pfttt…

Des grands noms du coaching sont disparus subitement de l’univers professionnel. On pense à Greg Beugnot, Philippe Hervé, Christian Monschau, etc.

Claude Bergeaud…

Ce constat de la précarité de la fonction est-elle une source d’angoisse, sachant que le nombre de coaches étrangers a augmenté vis-à-vis d’il y a quelques années ?

C’est la vérité, il y a plus de coaches étrangers. Pour moi, ce n’est pas une source d’angoisse dans le sens que ce qui m’intéresse, c’est de progresser, d’aider mes joueurs à progresser, le club aussi. On ne m’a pas enlevé mon diplôme d’informaticien, aussi si je me retrouve sans job nulle part, je pourrai retrouver autre chose dans une autre banche. Et je ne pense pas que vivre dans la peur et dans l’angoisse ça nous aide à être plus performant, à avoir un poste, et à gagner des matches puisqu’à la fin, c’est surtout ça qui compte. Après, effectivement, il y a plus de coaches étrangers, et je pense que nous, il faut que l’on se pose aussi les bonnes questions. Pourquoi c’est le cas et pourquoi il y a peu d’entraineurs français qui vont à l’étranger. Est-ce que ça vient de nous, de notre qualité, ou juste parce que l’on est bien en France, et je ne vois pas pourquoi on partirait si on est bien ici. Ça peut aussi expliquer que des étrangers veulent venir en France.

Vous êtes sûr d’être payé, cela compte pour la retraite…

Voilà. Si on est coupé, on a la garantie du contrat, on peut avoir du chômage derrière, on n’est pas à la rue du jour au lendemain comme ça peut arriver dans d’autres pays. Je pense aussi que l’on est dans une phase où il y a un renouvellement d’entraîneurs avec des nouveaux qui sont arrivés récemment. Je pense juste que l’on est en transition.

Vous êtes passionné d’automobile, vous ne devez pas être insensible au fait de travailler dans une salle qui est à l’intérieur du circuit automobile des 24 heures du Mans ?

Oui ! En plus, je suis allé aux 24 heures cette année, dans les paddocks. C’est vrai que je suis au bon endroit, il y a des pilotes, des voitures, des courses. On a été faire un karting en début de saison avec plusieurs membres du staff. Ici, on entend souvent des voitures qui sont en train de tourner. Ça donne une atmosphère un peu spéciale qui est très agréable. Ça me plaît, ça fait partie des choses que j’apprécie vraiment ici.

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Qu’est-ce qui vous a poussé à abandonner votre job au CNRS à Bordeaux pour être coach de basket ?

J’ai toujours voulu être en priorité entraîneur. J’ai arrêté mes études pendant un an pour passer mes diplômes d’entraîneur avant de les reprendre. Mon travail d’entraîneur, qui se faisait à Bègles avec les jeunes, me permettait de payer mes études. Je voulais être entraîneur, mais il y a tellement peu de places, c’est tellement fermé comme monde, qu’il fallait un plan B dans lequel je pouvais aussi m’épanouir. C’est pour ça que j’ai eu une carrière en informatique. Et puis j’ai eu l’opportunité d’arriver à l’ASVEL avec Pierre Vincent et je l’ai saisie. En fait, j’étais à cette époque assistant en Nationale 3 à Mérignac et j’ai remplacé l’entraîneur de Nationale 3 qui était malade, et il se trouve que c’était un ami d’enfance de Pierre Vincent. C’est pour ça qu’il y a eu une connexion, lorsque Pierre Vincent a cherché un assistant notamment avec des compétences informatiques, car l’idée était de développer des logiciels pour avoir des valeurs objectives sur ce qui était efficace ou pas dans le jeu. J’avais donc le bon profil pour Pierre à l’époque, et c’est comme ça que je suis arrivé à l’ASVEL.

A l’époque, il y avait beaucoup de spécialistes vidéo dans les clubs français ?

Pas tant que ça. L’idée était d’aller beaucoup plus loin, de sortir des stats que l’on ne peut pas avoir sur les sites classiques, que ce soit au niveau des stats avancées et de la rentabilité des systèmes de jeu. Comme personne ne connaît nos systèmes de jeu, c’était d’avoir notre propre rentabilité par rapport à ça, que ce soit aussi l’association des joueurs puisqu’il y a des combinaisons qui fonctionnent mieux que d’autres. C’était surtout pour avoir des valeurs objectives et pas seulement un sentiment.

Il faut visionner plusieurs fois chaque match ?

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Photo : Elric Delord (MSB)

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