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François Gomez (coach Tarbes): « Il a fallu se battre pour ne pas se faire acheter Marine Fauthoux »

Après nous avoir parlé de ses ambitions avec l’équipe de Suède au championnat d’Europe, François Gomez revient sur la saison de Tarbes dont il est le coach en Ligue Féminine.

Après nous avoir parlé de ses ambitions avec l’équipe de Suède au championnat d’Europe, François Gomez revient sur la saison de Tarbes dont il est le coach en Ligue Féminine.

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L’équipe, le club, l’entourage ont-t-ils bien digéré le fait de faire une finale de playoffs l’année dernière alors que c’était en décalage avec les moyens financiers?

Ça ce n’est pas simple. Je m’étais permis de reprendre une phrase de (Bozidar) Maljkovic quand il avait gagné l’Euroleague avec Limoges. Il avait dit « les grandes victoires sont le cimetière des petites équipes ». L’histoire a prouvé qu’il avait raison ; Limoges a beaucoup souffert après son titre européen. J’ai tenté d’expliquer dans la foulée que Tarbes ne faisait pas partie du gratin français et que ça n’allait pas se reproduire toutes les années. Très tôt des gens m’on dit « tu as joué la finale cette année, l’an prochain, tu seras champion ». C’est une logique du spectateur qui ne connaît pas le contexte. Il a fallu user de pédagogie pour expliquer que notre place ce n’était pas celle-là, que le sport réservait de bonnes et de mauvaises surprises et que là c’était une bonne surprise. Peut-être qu’avec la même équipe on aurait pu rééditer des choses mais ça restait un peu exceptionnel. Il ne faut pas rêver et savoir où est sa place. En plus cette année, on était sur trois tableaux, Eurocup, Coupe de France et championnat. Au bout du bout, les gens sont assez contents des résultats de l’équipe du TGB qui in-extremis s’est qualifiée pour les playoffs pour se faire éliminer par Lyon ce que personne ne va nous reprocher. Dans le même genre, quand on est allé perdre de cinq points à Lyon, des gens ont dit qu’au retour on allait gagner. J’ai usé de pédagogie en disant, je ne crois pas. L’histoire m’a donné raison. Aujourd’hui, il y a une hiérarchie bien établie dans le basket français et pour la renverser, il faut comme l’an dernier une part de chance, plein de petites choses. Renverser des montagnes, on ne peut pas le faire tous les ans. On s’est fait éliminer en demi-finale de la Coupe de France par Charleville, un match que l’on aurait pu gagner quelques semaines plus tard. On fait deux tours de coupe d’Europe et on se fait éliminer par Lyon. Donc les gens comprennent mieux à la fin de cette saison que l’on a fait un truc exceptionnel la saison dernière. Il a fallu toute une année pour faire passer le message.

Lorsque vous êtes allés en finale l’année dernière, l’équipe de cette année était déjà construite. Vous n’aviez pas pu recruter en tant que vice-champion de France ?

Non. Le recrutement est simple. Les hostilités commencent au mois de janvier et ce sont les gros clubs et les agents qui les lancent. Cela veut dire que les très bonnes joueuses sont très vite sollicitées et recrutées par les clubs au plus fort pouvoir économique. Quand tu n’as pas les mêmes capacités financières, tu attends un peu et tu prends ce qui reste -ce n’est plus notre cas car on s’est engagé sur un autre chemin. La présidente délégué de Lyon, Marie-Sophie Obama, a pris la parole après le match contre nous sur le podium des VIP et elle a expliqué que la logique était respectée et que ça sera comme ça à partir de maintenant car c’est comme ça dans tous les sports ; les plus riches sont les plus forts et continuent à gagner. On voit bien que les quatre équipes qui sont en demi-finales ont, je pense, les quatre plus grosses masses salariales. Heureusement, le sport laisse un peu de place au rêve et il y en a qui rêve derrière, La Roche, Landerneau, Basket Landes. Mais aujourd’hui la logique sportive est avant tout économique. Il faut vraiment le faire comprendre aux gens qui sont encore sur les valeurs d’il y a vingt ou trente ans où si on est une équipe de copines, si on travaille dur, on peut renverser des montagnes. Ce n’est pas aussi simple que ça !

Quand vous parlez de recrutement précoce, ça concerne aussi les joueuses étrangères ?

Non. J’entends toujours parlé du système pyramidale et je m’autorise à en parler car j’ai longtemps été dans la détection et la formation de jeunes joueuses. Mais la base de la pyramide est très étroite en France. Et ces joueuses, tu les retrouves 5, 6, 10 ans plus tard. Les Endy Miyem à 11 ans, les Sandrine Gruda à 13 ans, on les connaît. Pareil pour les Marine Fauthoux et les Iliana Rupert à 11-12 ans. Toutes les internationales on les connaît depuis qu’elles sont gamines. Contrairement aux garçons, la masse est très limitée. Quand tu arrives au sommet, il y a 15 ou 20 Françaises de très haut niveau, tu les répartis sur 4 clubs français et un ou deux étrangers, ce qui fait que toutes les très bonnes joueuses françaises sont signées très tôt parce qu’il n’y en a pas beaucoup. Et tout ce qui est rare est cher. Pour les étrangères, je pense à Mlle (Kariata) Diaby qui a fait une saison exceptionnelle à Landerneau, elle a été recrutée très vite parce que des pivots comme elle, il n’y en a pas beaucoup. Il y aura Isabelle Yacoubou à Bourges, Helena Ciak à Lyon et donc Diaby à Villeneuve d’Ascq. Quelques joueuses étrangères sont sollicitées de plus en plus tôt. Ana Dabovic et Marissa Coleman à Bourges alors qu’on est en avril. A Lyon, ils gardent (Michelle) Plouffe, (Julie) Allemand et (Alysha) Clark. C’est de plus en plus tôt contrairement à ce qui se passe chez les garçons où rien n’est commencé. Nous, à l’exception d’une seule joueuse, l’équipe est faite alors qu’on est un club de deuxième rang économique.

« Laure Résimont est annoncée comme un énorme potentiel »

Vous avez recruté Laure Résimont, une nouvelle Belge dans le championnat de France. Il y en a de plus en plus au fil des années ?

Elles ont terminé quatrièmes du dernier championnat du monde. Le basket belge travaille depuis dix ans sur la formation avec un système très particulier. Résimont était dans un club qui s’appelle Sainte-Catherine-Wavre contre qui on a joué cette année en Eurocup et qui a dans son effectif dix joueuses dont neuf Belges qui ont moins de vingt ans. Ce sont toutes les bonnes joueuses de la génération et cette équipe de club est entraîné par le sélectionneur des U20. Ils font de l’excellent travail. Laure Résimont est annoncée comme un énorme potentiel. Le championnat de France est très attractif, c’est l’un des plus beaux championnat du continent européen. Pour une Belge, il y a la langue, il y a aussi la loi française qui est à l’avantage des joueuses. Les gens sont payés et il y a des clubs qui sont très stables en terme d’économie. Il y a des coaches, tu sais que tu vas être entraînée. Il y a un niveau de championnat intéressant. On revoit d’ailleurs nos bonnes joueuses françaises revenir dans l’Hexagone et de bonnes joueuses étrangères vont venir surtout si les budgets continuent d’augmenter.

Même si elle est vice-championne du monde en U17, Marine Fauthoux est une véritable révélation. Comment la jugez-vous ?

Les dirigeants m’ont demandé si je n’étais pas fou quand je l’ai signé surtout avec le statut statut que je voulais lui donner mais quelques convictions, un peu d’expérience, quelques compétences, me faisaient penser qu’elle allait réussir, qu’elle était en capacité d’aller très vite. On m’a parlé de ses carences physiques mais pour tout le reste, elle est d’une très grande maturité. Le fait de s’entraîner un peu et de jouer beaucoup a fait qu’elle a évolué. On -je mets dedans son père, moi- est agréablement surpris de la vitesse à laquelle elle s’est appropriée les choses. J’avais la conviction -peut-être pas aussi vite la première année- mais au bout des deux ans qu’elle le ferait. On n’était pas nombreux à le penser car à la sortie du Centre Fédéral, elle n’avait pas 50 000 propositions, juste deux ou trois. Aujourd’hui, je peux dire que le téléphone sonne et qu’il a fallu se battre pour ne pas se la faire acheter. Des clubs plus importants l’auraient bien vu dans leur effectif dès la saison prochaine. Elle avait deux ans de contrat chez nous et on ne souhaitait pas gagner de l’argent sur son dos et le projet du TGB est construit en grande partie autour de gens comme elle.

Vous pensez pouvoir la retrouver face à votre équipe de Suède dans quelques semaines ?

C’est ce que je lui ai souhaité (rire). Après la concurrence est très importante. Stratégiquement, Valérie Garnier ouvre les portes à de jeunes joueuses. J’entends dans les commentaires qu’il faut gagner une médaille mais que c’est aussi un bon moyen de préparer l’équipe pour les futurs Jeux Olympiques. Les gens parlent déjà de ceux de Paris. Mesdemoiselles Fauthoux et Rupert ont de fortes chances d’y être. De là à être en Lettonie et en Serbie cet été, il y a quand même une grosse marche à gravir.

On en oublie presque que Tima Pouye vient tout juste d’avoir 20 ans ?

(Rires). Oui. Pour être tout à fait honnête, notre choix de recrutement a deux axes. Evidemment, les contraintes économiques. Si on peut avoir de forts potentiels qui ne sont pas encore très chères -quand elles seront très chères, on ne pourra plus les garder-, on le fait car on est en capacité de contractualiser des jeunes de la nouvelle génération. La deuxième raison c’est la culture du coach, qui a été formateur très longtemps et qui a gardé un peu ce côté d’accompagnateur des jeunes vers le haut niveau. Le TGB se veut être un tremplin pour les jeunes joueuses. On avait commencé avec Aby Gaye, qui est arrivée à 21 ans et qui nous quitte pour aller à Basket Landes. C’est son choix. Elle n’est pas convoquée en équipe de France. Je le comprends. On a continué avec Tima et on continue avec Marine Fauthoux et d’autres joueuses la saison prochaine. C’est bien entendu d’abord les joueuses françaises qui sont intéressées par notre projet mais ça peut être demain des étrangères et le TGB se construit une véritable identité de club formateur et compétiteur, bien sûr, car on joue pour gagner. On est sur la ligne directrice de donner du temps de jeu et des responsabilités aux jeunes.

C’est aussi une saison faite pour une bonne partie sans Adja Konteh, une joueuse de base, pour cause de maternité. Elle sera là à la rentrée ?

L’équipe avait construite autour de Aby Gaye, Adja Konteh et Tima Pouye. Aby a mis beaucoup de temps à revenir de sa blessure et Adja nous a annoncés qu’elle allait avoir un bébé. C’est la vie, c’est une bonne nouvelle pour elle mais en même temps elle a plombé un peu l’équipe et notre saison et le début de saison prochaine puisqu’elle est censé accoucher fin juillet. Les retours à haut niveau après une maternité ne se font pas en quatre ou six semaines. Elle sera toujours tarbaise la saison prochaine puisqu’elle est sous contrat mais on risque de ne pas l’avoir à son niveau avant la phase retour. On l’attend avec impatience mais on a plutôt construit l’équipe autour d’autres joueuses. C’est une joueuse qui était leader à Tarbes et qui nous a manqués cette saison.

Il n’y a pas de joker médical en cas de maternité…

(Rires). C’est terrible ! Elle est inapte à son travail mais la sécu n’en tient pas compte. Elle est considérée en arrêt dans les délais normaux d’une maternité. On l’a payée plein pot. On a pris quelqu’un mais tardivement et de toutes façons, ça avait bouleversé tous les plans. Sans vouloir lui mettre la responsabilité sur le dos, ça nous a plombés. Cette saison a été très perturbée sur le cas d’Aby et d’Adja.

De part son physique et ses aptitudes, Aby Gaye devait être l’héritière de Isabelle Yacoubou. Or, elle a disparu des radars de l’équipe de France, elle n’est pas dans la liste des 19 pré-sélectionnées pour l’Euro ?

Pour reprendre son histoire : elle sort du Centre Fédéral, elle va à Toulouse puis Villeneuve d’Ascq. Elle arrive chez nous à 21 ans, elle cherche un statut, du temps de jeu, du travail, ce qu’on lui propose et c’est vrai que l’an passé, elle fait une très bonne saison tirée par le haut par les (Ana) Suarez, les (Angie) Bjorklund. Il était convenu avec Aby qu’elle prenne ce leadership, malheureusement déjà elle ne peut pas partir avec l’équipe de France car elle se fait opérer fin juin. Elle passe tout l’été entre Cap Breton et l’INSEP pour se réparer. Elle reprend à l’Open sans entraînement, pas du tout dans le coup, pas en confiance. Pendant deux ou trois mois, ses performances sont bien en deça de ses capacités. Derrière c’est l’effet boule de neige : une équipe qui ne tourne pas bien, une place de leader qu’elle ne prend pas. C’est un échec. Deux jours avant que la liste des internationales sorte, je lui ai demandé si elle avait des nouvelles et elle m’a dit que non. Elle sentait bien ce qui allait arriver. C’est à la fois de la déception et de la frustration. C’est un échec pour elle cette saison et pour moi car il y a deux ans on avait convenu qu’elle vienne à Tarbes et qu’ensuite elle rejoindrait une grosse cylindrée française ou étrangère et qu’elle serait installée en équipe de France en étant LE pivot français. Et au bout du bout, rien du tout. Elle part à Basket Landes qui n’est pas une grosse cylindrée française mais une équipe à peu près dans notre catégorie et elle n’est pas appelée en équipe de France. Elle doit être déçue et moi aussi, on a échoué et les responsabilités, on se les partage.

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L’équipe, le club, l’entourage ont-t-ils bien digéré le fait de faire une finale de playoffs l’année dernière alors que c’était en décalage avec les moyens financiers?

Ça ce n’est pas simple. Je m’étais permis de reprendre une phrase de (Bozidar) Maljkovic quand il avait gagné l’Euroleague avec Limoges. Il avait dit « les grandes victoires sont le cimetière des petites équipes ». L’histoire a prouvé qu’il avait raison ; Limoges a beaucoup souffert après son titre européen. J’ai tenté d’expliquer dans la foulée que Tarbes ne faisait pas partie du gratin français et que ça n’allait pas se reproduire toutes les années. Très tôt des gens m’on dit « tu as joué la finale cette année, l’an prochain, tu seras champion ». C’est une logique du spectateur qui ne connaît pas le contexte. Il a fallu user de pédagogie pour expliquer que notre place ce n’était pas celle-là, que le sport réservait de bonnes et de mauvaises surprises et que là c’était une bonne surprise. Peut-être qu’avec la même équipe on aurait pu rééditer des choses mais ça restait un peu exceptionnel. Il ne faut pas rêver et savoir où est sa place. En plus cette année, on était sur trois tableaux, Eurocup, Coupe de France et championnat. Au bout du bout, les gens sont assez contents des résultats de l’équipe du TGB qui in-extremis s’est qualifiée pour les playoffs pour se faire éliminer par Lyon ce que personne ne va nous reprocher. Dans le même genre, quand on est allé perdre de cinq points à Lyon, des gens ont dit qu’au retour on allait gagner. J’ai usé de pédagogie en disant, je ne crois pas. L’histoire m’a donné raison. Aujourd’hui, il y a une hiérarchie bien établie dans le basket français et pour la renverser, il faut comme l’an dernier une part de chance, plein de petites choses. Renverser des montagnes, on ne peut pas le faire tous les ans.

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