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[REDIFF] Vincent Pourchot, le géant de 2,22m boudé par la France

Comment le plus grand basketteur français de tous les temps s’est-il retrouvé au chômage puis en Nationale 2 avant de rebondir au CEP Lorient en N1? La première partie nous emmène aussi au pays des géants.

Comment le plus grand basketteur français de tous les temps s’est-il retrouvé au chômage puis en Nationale 2 avant de rebondir au CEP Lorient en N1?

La première partie nous emmène aussi au pays des géants.

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Décembre 2011. Un match lambda du championnat espoir entre Pau et Nancy va sortir de l’anonymat par la grâce d’un géant de 2,22m et de 19 ans, Vincent Pourchot. Ses chiffres ? 26 points (11/14 aux shoots, 4/6 aux lancers), 25 rebonds et 15 contres en 33 minutes sur le terrain. Résultat : 62 d’évaluation. Un record à la Wilt Chamberlain qui a provoqué un buzz dans l’univers de la balle orange. L’Echassier avait posé à l’époque avec une modeste feuille de papier où était inscrit le nombre surréaliste « 100 » marquant son record. Aucun photographe n’a permis au pivot du SLUC d’immortaliser sa performance gargantuesque.

Comment le Lorrain a-t-il vécu son exploit ?

« Je ne m’en étais pas du tout rendu compte », répond-il de sa voix douce aux Antipodes de sa stature de Golgoth. « Pour moi j’avais fait mon match. Et vu que j’enchaînais avec les pros, après le match je suis allé dans le vestiaire des pros, je me suis changé et je suis allé directement sur le terrain sans toucher à mon téléphone. On n’avait pas discuté avec le coach espoir, pas de speech. Ce qui m’a marqué à vie c’est que l’on était en train de s’échauffer avec les pros. A chaque fois que l’on faisait des étirements, Jean-Luc Monschau venait taper dans la main de ses joueurs en adressant un petit mot d’encouragement. Il vient me voir et en me taquinant, il me dit « Vincent, si un jour tu refais 62 d’évaluation, peut-être que je te ferai jouer. » 62 d’évaluation ? Sur le coup je n’ai pas forcément tilté. On finit le match pro, je rentre dans le vestiaire. Je prends mon portable et là je vois des notifications de L’Equipe qui disait, « record historique d’évaluation dans le basket français ». J’ai pris conscience de l’ampleur du truc. Après j’ai reçu plein de messages. Pau avait un effectif complet. La petite anecdote marrante c’est que leur équipe entière avait fait 59 d’évaluation. J’avais fait 62 et mon équipier Kevin Talhien avait fait 35. On avait une évaluation générale de 130 et quelque. »

A l’époque, cette performance astronomique et historique n’avait pas surpris plus que ça son actuel coach au CEP Lorient, Philippe Maucourant.

« Je suis passé par l’est de la France et peut-être ai-je un œil plus averti sur les jeunes de Lorraine. C’est plus dans le cadre de l’équipe de France et de son passage à l’INSEP que j’ai commencé à m’intéresser à ce joueur-là. Nancy c’était après et j’ai estimé que c’était normal qu’il puisse faire des cartons en espoirs. »

Plus dans les plans

Vincent Pourchot est originaire de Landovillers, un village de 365 habitants près de Metz. Lorsque vous faites 222 cm de hauteur sans chaussures avec une envergure de 2,32m, vous êtes forcément une cible des regards toute votre vie. Des quidams comme des autres joueurs, des coaches, des scouts, des journalistes et des fans. Le basket, Vincent l’a découvert à six ans au Metz BC. Il est parti adolescent à l’INSEP préparer un bac pro informatique et une carrière de basketteur professionnel.

« Il poussait tellement vite qu’il fallait être précautionneux. Au début, il dormait même avec des attelles, une vraie souffrance », a témoigné Lucien Legrand, le patron du pôle basket de l’INSEP, au Journal du Dimanche. « En classe, on a acheté des pupitres plus élevés, et trouvé un lit plus grand pour sa chambre. Des spécialistes lui montraient aussi les bonnes positions à adopter, ne serait-ce que pour s’asseoir ou dormir. Et le podologue n’arrêtait pas de le mettre en garde : ‘Si tu ne mets pas bien tes semelles, tu vas jouer avec ta vie.' »

Vincent va gagner une première médaille en bronze avec les U16 en 2008. C’est la génération Léo Westermann, Evan Fournier et Louis Labeyrie. Une deuxième en argent à Metz, chez lui et devant toute sa famille, avec l’équipe de France à l’Euro U18 en 2009. Le Lorrain est 10e homme. Une troisième médaille toujours argentée s’offre à lui trois ans plus tard avec les U20. Il est alors la doublure de Rudy Gobert et l’équipe de France est riche de Livio Jean-Charles, Hugo Invernizzi, Axel Julien, Pierre Pelos, Axel Toupane et Léo Westermann. Vincent a droit à 15 minutes contre la Macédoine, en profite pour scorer 16 points et… demeure clouer sur le banc par la suite.

Vincent n’a jamais été en relation avec des universités américaines ni eu connaissance que des scouts s’intéressaient à ses mensurations si spéciales. Il n’a eu qu’une seule touche avec l’étranger.

« Lors de ma deuxième année INSEP, on m’avait invité à aller visiter la Joventut Badalone. C’est Frédéric Weis, qui est de Lorraine comme moi, qui m’a mis en relation avec eux. Ils voulaient me prendre mais comme j’étais à l’INSEP, si je voulais partir de moi-même, il fallait rembourser les frais de formation. Ca faisait beaucoup d’argent et le club n’était pas forcément prêt à l’investir. Je n’avais pas non plus encore passé le bac et ma mère voulait absolument que je l’ai. »

Ce fut donc le SLUC Nancy. Son centre de formation. De stats ronflantes dans le championnat espoir: 16,3 points à 61,9%, 12,9 rebonds et 2,3 contres sur deux années. Et… une présence royale de 3 minutes en tout et pour tout avec les pros. Vincent n’a jamais réédité son 62 d’évaluation. C’est sans doute pour ça que Jean-Luc Monschau ne lui a jamais accordé sa confiance.

La suite : un contrat avec Lille en Pro B. Pas de chance : une blessure à la cheville lors du premier match l’éloigne du terrain quelques semaines. Pendant ce temps, le coach Abdou Ndiaye qui avait souhaité son arrivée est viré et son remplaçant Cédric Binauld n’en veut pas. Il ne lui donnera que des poussières de temps de jeu.

C’est à Charleville la saison suivante, toujours en Pro B, qu’il va avoir de véritables responsabilités. Le coach Cédric Heitz croit en lui. Avec 15’ de temps de jeu moyen, il fournit 7,4 points, 4,2 rebonds pour 10,4 d’évaluation. Très bien à 22 ans. Seulement ce sera le pic de sa carrière jusqu’ici.

« J’étais le meilleur joueur à l’évaluation/minute. J’avais fait des choses positives. Je pense que j’étais prêt à jouer en Pro B, il fallait simplement qu’il y ait quelqu’un qui sache m’intégrer à l’effectif pour m’utiliser correctement. »

Cédric Heitz est parti et Vincent s’est retrouvé le bec dans l’eau. Charleville, qui possédait le plus petit budget de la division, voulait faire des économies. Aussi incroyable que cela puisse paraître, le géant va se retrouver à 24 ans au chômage.

« Avec Charleville, je n’étais plus forcément dans les plans. Tout le monde ne pensait pas forcément pouvoir me faire jouer car les gens pensaient qu’il n’y avait que Cédric qui pouvait m’utiliser correctement. J’avais eu des propositions que je n’ai pas accepté car ma priorité c’était Charleville et c’est au dernier moment que l’on m’a dit « Vincent, on ne veut plus de toi. » Je me suis retrouvé au chômage jusqu’au mois de décembre. Je me suis remis en question en me disant qu’il fallait que je joue coûte que coûte. Peu importe où ça sera, je signerai. Et c’est là que j’ai signé à Besançon en Nationale 2. »

Le chômage, la N2… Si le basket français qui dépense sans compter pour de la main d’œuvre étrangère et qui s’est longtemps plaint de manquer de big men s’était alors regardé dans le miroir en sachant qu’il laissait de côté un pivot de 2,22m certes pas tonique mais pas manchot non plus, il aurait eu honte.

Pas d’amertume

C’est donc Nicolas Faure et Besançon qui font appel à ses services. Vincent a-t-il connu le spleen alors qu’il s’est retrouvé en inactivité forcée ?

« Non. Je n’ai jamais douté car je sais que dans une carrière il y a des moments positifs et négatifs. C’est sûr que c’était un moment pas facile à gérer mais je savais qu’un jour ou l’autre je trouverai un pied à terre et j’ai eu la chance que Besançon me fasse une proposition. Je n’ai jamais eu de regrets après y compris de signer en Nationale 2 car tous les coaches qui m’ont fait appeler ont respecté leurs engagements. Ce sont les circonstances qui ont fait qu’il y a eu des changements entre le coach qui s’est fait virer et puis moi l’été je me suis blessé tout seul en marchant. J’ai été arrêté un mois à Lille et pendant ce temps-là le coach a fait que de perdre et il s’est fait virer. Quand j’ai signé à Charleville, je devais jouer en Nationale 1 et au final ils ont eu une wild card et ils ont fini en Pro B. Je suis tombé au bon endroit au bon moment, » déclare t-il à l’encontre d’idées reçues.

Aucune trace de rancune chez Vincent Pourchot, l’anti starlette :

« La N2 m’ a fait du bien pour remettre les pieds sur terre. Il n’y avait que trois entraînements par semaine, je n’étais pas autant entouré par un préparateur physique, un kiné. On est dans le monde du travail. Les gens font du basket par passion et ne sont pas payés. Cette signature à Besançon m’a fait grandir et prendre conscience de beaucoup de choses. »

A lire demain : Vincent Pourchot, le rebond au CEP Lorient

L’infiniment grand

Le basketteur le plus grand de tous les temps est le Lybien Suleiman Ali Nashnush, qui au début des années soixante a été de façon fugace international. Il a même fait l’acteur dans le film de Federico Fellini, Satyricon. Taille : 2,45m. Soit 8 pieds en mesure anglo-saxonne.

Le plus grand « vrai » professionnel répertorié est le Russe Alexandre Sizonenko. Il a joué pour le Spartak Leningrad (1976-78) et le Stroitel Kuybyshev (1979-86) et compte aussi 12 sélections en équipe nationale. Il est décédé dans un hôpital de son gigantisme après une fin de vie cauchemardesque. Taille : 2,39m.

On connait le plus grand joueur de NBA et de LNB de tous les temps puisqu’il s’agit de Gheorghe Muresan, vu trois fois à Pau. Taille : 2,31m avec chaussures, 2,295m sans.

Le plus grand Français de tous les temps ? Il n’est pas facile de faire le tri entre les légendes et la réalité. Peut-être s’agit-il de Georges Kieffer né comme Vincent Pourchot à Metz, en 1912. Il était connu sous le nom de géant d’Obermodern, un village d’Alsace. Un titre très honorifique et invérifiable de « plus grand homme du monde » lui avait été attribué à la foire de Paris en 1937. Taille : 2,42m.

Le plus grand Français de ce XXIe siècle ? Peut-être Vincent Pourchot qui est en tous les cas le plus grand basketteur français de tous les temps. L’ancienne internationale Rose-Marie Scheffler (2,02m) étant la plus grande basketteuse. Vincent toise le Franco-Sénégalais de Strasbourg Youssoupha Fall d’un petit centimètre. Les deux géants se connaissent bien.

« De loin, ça ne se voit pas mais à chaque fois que je suis à côté de lui, il voit bien que je suis plus grand ! », sourit Vincent. « On a le même agent (NDLR : Comsport), on s’est déjà retrouvé l’un contre l’autre à l’époque où on était en espoir, on s’est entraîné ensemble pendant un mois aux Etats-Unis. C’est incroyable ce qu’il fait. On n’a pas les mêmes qualités physiques et basket. J’ai de meilleures mains, je suis peut-être un peu plus adroit que lui, mais il a de meilleures qualités athlétiques que moi. »

Les géants comme les nains ont longtemps été des attractions de foires. Notre époque n’y échappe pas. Vincent Pourchot a participé, il y a un an à Paris, à un rassemblement d’une dizaine de personne de très, très grandes tailles, hommes et femmes et de toutes nationalités. C’est de cette rencontre que provient la photo où l’on voit un homme dépasser Vincent d’une tête !

Contrairement à Gheorge Muresan qui était issu d’une famille de gens à « taille normale » et qui devait son gigantisme à un dysfonctionnement de l’hypophyse, glande endocrine située à la base du cerveau, Vincent Pourchot n’est pas isolé au sein de la sienne.

« Ma mère mesure près d’1,80m. Mon père 1,95m. J’ai des cousines qui font 2m dont l’une a été à l’INSEP avec moi pendant un an. Elle a arrêté le basket. Ma tante a joué à son époque en équipe de France jeune », dit-il.

Pour reprendre la formule d’un confrère, le Lorrain de Bretagne s’assume de haut en bas. Il est fier de son corps qui est devenu bien proportionné -on en reparlera dans le deuxième chapitre. Sa mère a témoigné que jamais son fils ne s’est plaint des moqueries à l’école. Pourtant, il doit souvent faire face à la bêtise humaine.

« On ne le regarde plus comme quelqu’un qui fait 2,22 mais comme Vincent Pourchot », témoigne son coach Philippe Maucourant. « Mais ce qui nous dérange c’est le regard des gens. Quand on voyage, il a droit à des réflexions stupides. « T’es grand ! Tu fais du basket ? » On en souffre plus que lui car il est habitué depuis qu’il a quinze ans à faire des photos sur les aires d’autoroute. Il a une carapace et c’est nous qui pouvons réagir plus désagréablement que lui ne le fait. »

Vincent confirme qu’il est blindé face aux remarques désobligeantes.

« Ma taille, c’est ma fierté. Je n’ai aucun problème avec ça. Forcément quand je sors j’attire l’attention. Les gens que je connais dont mes coéquipiers me disent que ça doit être relou de vivre ça au quotidien. Je leur réponds que je prends ça avec le sourire. Ça m’a forgé un caractère. Je sais cerner les gens, je sais quand ils exagèrent. Je suis capable de répondre quand ça ne me plaît pas. Il y en a qui font des remarques incroyables. On se demande comment on peut dire des choses comme ça. J’ai une mentalité plutôt costaud sur ça. Et puis quand on me voit en général on ne fait pas trop les malins. Je commence à être un peu costaud », glisse-t-il dans un sourire de sa voix douce d’où transpire une énorme gentillesse.

[armelse]

Décembre 2011. Un match lambda du championnat espoir entre Pau et Nancy va sortir de l’anonymat par la grâce d’un géant de 2,22m et de 19 ans, Vincent Pourchot. Ses chiffres ? 26 points (11/14 aux shoots, 4/6 aux lancers), 26 rebonds et 15 contres en 33 minutes sur le terrain. Résultat : 62 d’évaluation. Un record à la Wilt Chamberlain qui a provoqué un buzz dans l’univers de la balle orange. L’Echassier avait posé à l’époque avec une modeste feuille de papier où était inscrit le nombre surréaliste « 100 » marquant son record. Aucun photographe n’a permis au pivot du SLUC d’immortaliser sa performance gargantuesque.

Comment le Lorrain a-t-il vécu son exploit ?

« Je ne m’en étais pas du tout rendu compte », répond-il de sa voix douce aux Antipodes de sa stature de Golgoth. « Pour moi j’avais fait mon match. Et vu que j’enchaînais avec les pros, après le match je suis allé dans le vestiaire des pros, je me suis changé et je suis allé directement sur le terrain sans toucher à mon téléphone. On n’avait pas discuté avec le coach espoir, pas de speech. Ce qui m’a marqué à vie c’est que l’on était en train de s’échauffer avec les pros. A chaque fois que l’on faisait des étirements, Jean-Luc Monschau venait taper dans la main de ses joueurs en adressant un petit mot d’encouragement. Il vient me voir et en me taquinant, il me dit « Vincent, si un jour tu refais 62 d’évaluation, peut-être que je te ferai jouer. » 62 d’évaluation ? Sur le coup je n’ai pas forcément tilté. On finit le match pro, je rentre dans le vestiaire. Je prends mon portable et là je vois des notifications de L’Equipe qui disait, « record historique d’évaluation dans le basket français ». Là j’ai pris conscience de l’ampleur du truc. Après j’ai reçu plein de messages. Pau avait un effectif complet. La petite anecdote marrante c’est que

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Photos: CEP Lorient et FIBA

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