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Interview: Régis Bardera, arbitre et préparateur mental des Bleues

Régis Bardera, 45 ans, est une figure de la Jeep Elite puisqu’il y arbitre depuis 18 ans. Il a aussi officié à l’international et depuis quelque temps se consacre au 3×3. Il est parallèlement préparateur mental au sein de l’équipe de France féminine. Ce sont les expériences dans ces domaines qu’il n

Régis Bardera, 45 ans, est une figure de la Jeep Elite puisqu’il y arbitre depuis 18 ans. Il a aussi officié à l’international et depuis quelque temps se consacre au 3×3. Il est parallèlement préparateur mental au sein de l’équipe de France féminine.

Ce sont les expériences dans ces domaines qu’il nous raconte ici.

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Vous dites que vous avez un père qui vous a abandonné enfant et qui ne respectait pas la loi et que c’est pour ça que l’arbitrage vous convenait ?

J’ai été abandonné à l’âge de cinq ans par mon père et avec ma maman on s’est retrouvés seuls. Elle m’a transmis une leçon de courage comme quoi dans la vie il faut batailler pour réussir, pour réaliser ses rêves. J’ai commencé le basket quand j’avais dix ans car j’avais une voisine qui y jouait. Je trouvais ce sport passionnant, je n’étais pas un shooteur, un grand joueur mais j’aimais faire des passes pour les autres, je me régalais de défendre ensemble. Dès l’âge de 12-14 ans, j’ai ressenti l’envie d’arbitrer. J’avais la force de prendre des décisions rapidement, je n’avais pas peur d’assumer de suite les erreurs. J’aimais la notion de diriger. Au fur et à mesure de gravir des échelons, j’ai réfléchi au pourquoi je suis devenu arbitre. Une activité où on a des règles, où l’on fait respecter la loi. J’avais eu un père qui ne respectait pas du tout la loi et moi j’ai choisi une activité où il fallait être le plus proche de la loi. Dans ma façon d’être, je suis très sensible à la notion d’honnêteté et au respect des règles, que ce soit dans la vie de tous les jours, le code de la route. Cela m’a permis d’être très tôt sensible dans mon activité d’arbitre à la gestion des personnalités. On a les fautes, les fautes techniques pour sanctionner les joueurs mais j’ai toujours préféré l’humain (…) Et d’être au milieu avec un sifflet ça m’a permis de prendre confiance en moi, de diriger à ma façon et j’ai travaillé tous les jours. J’ai assisté à des camps, à des stages, je suis allé à l’encontre de coaches de première division pour les questionner pour apprendre ce qui se fait au plus haut niveau. Tous les jours c’est chercher pour apprendre et apprendre sur moi. Pourquoi je suis là ? Dès que quelqu’un me parle de basket, Chantal Julien (NDLR : responsable des arbitres français de haut niveau), un coach, un joueur, j’écoute car il y a toujours quelque chose à retenir même et surtout à 45 ans. C’est essentiel de ne pas penser détenir la vérité. En trente ans d’arbitrage, j’ai toujours évolué.

Quand on est arbitre international, arbitre t-on de la même façon un joueur suivant sa nationalité, son origine ?

Lorsque j’ai commencé à voyager, j’ai arbitré des joueurs plus ou moins connu et la première chose que j’ai tenu à faire, c’est au maximum d’avoir une connaissance du joueur et de sa personnalité. Et éventuellement de connaître un ou deux mots dans sa langue pour qu’il y ait un premier lien de confiance. « Bonjour ». « Au revoir ». « Merci ». « Comment allez-vous ? » « Bon match ! » Afin de créer un climat essentiel entre un joueur, un coach et un arbitre. Et encore plus au niveau international où au début les joueurs, les joueuses et les coaches ne vous connaissent pas. Avoir des informations sur eux à travers les vidéos ou ce que je peux lire. La deuxième étape, c’est toujours de dissocier la personne et le joueur. Qu’il soit Français, Américain, Serbe, Espagnol ou Italien, il n’y avait pas de différence. La seule difficulté que j’ai pu rencontrer c’est la barrière de la langue. D’où l’intérêt d’être le plus performant possible en anglais. La règle numéro 1, c’est d’être le plus respectueux et le plus poli possible. La politesse est universelle.

On voit sur les photos que vous affichez souvent un sourire ?

Oui car je suis très heureux d’être sur un terrain de basket… et je suis souriant dans la vie de tous les jours. Pour moi, le sourire et le regard sont l’un des moyens de communication les plus puissants au monde. Hier soir, j’étais à Strasbourg et on m’a demandé « commente allez-vous ? » « Comment voulez-vous que je n’aille pas bien ? Je suis en pleine santé, je fais une activité que j’aime, je suis à un super niveau, je ressens du respect, je me donne les moyens d’être le plus performant possible. » Mettre ma tenue d’arbitre ne change pas l’homme que je suis. Je fais en sorte d’être le plus proche possible de ce que je suis dans ma vie de tous les jours. J’essaie d’être le plus compétent possible et pour ça je travaille tous les jours depuis que j’ai 16 ans. C’est un travail personnel, technique, physique, de communication. Oui, souriant, même s’il y a des moments où on ne peut pas l’être. Mais sourire ça permet tellement d’apaiser, de rapprocher, de comprendre. Je suis aussi capable de fermer mon visage quand c’est nécessaire. Mon sourire se ferme quand je sens qu’il y a un manque de respect à mon égard. Je dis souvent aux joueurs : « vous pouvez me contester, ne pas être d’accord avec ma décision, marché, faute… Sur la partie technique, vous êtes bien meilleurs que moi, les coaches et les joueurs, mais par contre sur la forme, l’attitude, je suis irréprochable, toujours poli, respectueux. » Je dis aux coaches, « sur le fond vous avez probablement raison mais sur la forme, il y a moyen de faire autrement. »

A partir de quand vous estimez qu’un coach va trop loin ?

Avec mes années d’expérience, dix-sept, dix-huit ans que je suis en Pro A, je ressens énormément de respect à mon égard et je ne peux pas dire qu’il y a eu des coaches irrespectueux. L’expérience de gérer ses émotions, l’approche vis-à-vis des coaches, le fait qu’ils vous connaissent, ça aide. Un coach m’a dit, « quand tu arrives sur le terrain, déjà on a confiance. On sait que 80% des décisions vont être correctes. » La priorité de l’arbitre c’est de juger le plus juste possible. Je ne donne aucune opportunité d’être irrespectueux envers moi. Lorsque c’est arrivé c’est que j’ai entendu des propos qui touchaient mes valeurs. Où on a pu imaginer un manque d’honnêteté. Ça me blesse. Une erreur que j’ai pu faire peut être liée à un mauvais placement, une absence de courage à un moment donné quand j’étais un peu plus jeune. Par contre, elle n’est jamais liée à ce que je suis. Je suis profondément honnête, juste. Ce que je peux trouver irrespectueux c’est  lorsqu’on vous tourne le dos. On vous parle et on s’éloigne. Ça m’était arrivé quand j’étais jeune arbitre avec un coach un peu connu. Je n’avais pas su quoi faire…

Avez-vous des discussions avec les coaches en dehors du terrain ? Certains vous appellent-ils ?

Non. La règle, c’est de ne pas avoir de contacts directs avec les coaches. C’est Chantal (Julien) qui est notre interlocutrice avec eux. Par contre c’est arrivé de se rencontrer dans des stages, des colloques, en début de saison, on peut se croiser dans les couloirs. A force on se connaît. Ça nous est arrivé d’échanger. Comme je suis allé plusieurs fois en équipe de France garçons, j’ai pu échanger avec les coaches qui étaient présents.

« Je me souviens une fois d’avoir été abattu à la fin d’un entraînement et c’est Rony Turiaf qui est venu me réconforter, me remotiver. C’est quelqu’un de très humain. Boris Diaw a été un vrai gentlemen, Tony Parker très respectueux »

Vous avez eu des contacts avec les supporters, à Nanterre ?

Un soir, après un match de Nanterre, il y avait des supporters dans un restaurant. Très sympa, très aimable. Un couple qui dirigeait le club de supporters m’a sollicité pour venir les rencontrer un soir. C’est ce que j’ai fait, il y a deux ans. J’ai partagé mon expérience, ma relation avec les coaches. Pascal Donnadieu et Franck Le Goff (NDLR : son adjoint) avaient fait un passage. Comment je gérais les personnalités, comment je vivais de l’intérieur mon activité. On a passé deux heures et demies super chouette.

Aujourd’hui les relations entre le public et les arbitres sont extrêmement apaisées si l’on compare avec les décennies précédentes ?

Oui. Je ressens dans toutes les salles de France du respect de la part de tous les spectateurs. On ne sent pas d’insécurité. C’est très bien organisé.

Cela vous est arrivé d’avoir de l’insécurité à l’étranger ?

Non. Ce sont des faits rares qui arrivent malheureusement mais moi j’en n’ai jamais vécu. Je présume que dans les championnats régionaux ça ne doit pas être tout le temps facile pour les jeunes arbitres.

Il existe beaucoup de codes de bonne conduite dans le basket entre les joueurs et les arbitres. Comme le fait de lever la main quand il y a faute et aussi les joueurs viennent vous saluer avant l’entre-deux ?

A deux minutes du début du match, on a l’opportunité de saluer les coaches pour se souhaiter un bon match. J’ai toujours le souvenir des joueurs qui viennent nous saluer. On fait partie du jeu. Ça me semble normal comme de se saluer à la fin des matches au milieu du terrain par les coaches et l’ensemble des joueurs.

Vous avez arbitré des entraînements de l’équipe de France de 2009 à 2014 pour réhabituer les joueurs aux règles internationales. Cela leur prend du temps à chaque fois ?

Quand Vincent est arrivé en équipe de France, il a été souhaité qu’un arbitre soit présent en préparation surtout pour permettre aux coaches de se concentrer sur les entraînements. On a ponctuellement travaillé avec des joueurs NBA sur quelques règles. A l’époque, c’était par exemple l’utilisation de l’avant-bras et forcément la règle du marché. Les joueurs étaient en capacité de très vite s’adapter, ils retrouvent très vite les règles internationales et sur les compétitions nos internationaux n’ont jamais été en délicatesse par rapport à la règle. C’est pourquoi mon travail était surtout axé sur les phases de jeu, les joueurs avaient besoin d’un arbitre pour pouvoir évoluer dans les meilleures conditions. Ça allait très vite et très haut, ça poussait, c’était physique. C’était pour moi hyper enrichissant de côtoyer tous ces grands joueurs et le staff. Au début, j’étais seul, la première année je suis parti les six semaines avec eux, et après on est venu à deux. Je me souviens une fois d’avoir été abattu à la fin d’un entraînement et c’est Rony Turiaf qui est venu me réconforter, me remotiver. C’est quelqu’un de très humain. Boris Diaw a été un vrai gentlemen, Tony Parker très respectueux. Je ne peux même pas décrire ce que j’ai vécu, c’était grandiose. Et comme par hasard, c’est ensuite que j’ai commencé à arbitrer le plus loin en playoffs, quelques finales. Ça m’a énormément aidé à améliorer ma compétence. La vitesse…

La vitesse, c’est être placé au cœur de l’action ?

La première fois que j’ai arbitré l’équipe de France en amical, c’était encore Claude Bergeaud le coach. C’était à l’Alpe d’Huez et il y avait Michael Pietrus. Je me souviens d’avoir dit à la sortie du match à Claude Bergeaud, « il va trop vite ! » (sourire). La vitesse d’exécution de Tony (Parker) fait qu’il a fallu du temps pour s’adapter. Je suis d’une nature discrète et en équipe de France, il faut être discret. Il y a une notion de confidentialité. Ça m’a touché car on savait que l’on pouvait me faire confiance. Chaque fois que je partais à l’étranger, je représentais ma fédération, mon président, les dirigeants qui nous dirigent, mon pays et je me devais d’être exemplaire en terme de comportement et de relation à l’autre.

« Je me suis dit « tu ne parles pas anglais donc tu vas partir en stage en Angleterre. » Je suis parti dans un camp d’arbitre puis dans une famille, j’ai embauché une prof d’anglais pendant un mois »

Vous avez arbitré la Coupe du monde 3×3 à Nantes. L’arbitrage y est-il différent qu’en 5×5 ?

Il y a sept ou huit ans, Nicolas Maestre était sur le 3×3 et il n’a pas pu se rendre disponible pour un compet à Lausanne, une étape de la World Cup. On m’a appelé un mois et demi avant alors que je ne connaissais pas du tout le 3×3. On ne dit jamais non ! J’ai regardé des vidéos, je me suis entraîné et j’ai vécu un truc génialissime. Je l’ai fait chaque année, j’ai passé la licence 3×3 jusqu’au jour où on m’a désigné pour la Coupe du monde à Nantes. Un super niveau de jeu avec un quart-de-finale Serbie-USA qui était un très grand match.

C’est différent d’arbitrer le 3×3 ?

Oui et sur plusieurs choses. Une qui est essentielle c’est qu’en 3×3 on a encore moins droit à l’erreur car elle a vraiment une incidence car on va très vite en 21 points. Ça demande de retarder au maximum son coup de sifflet et c’est ce que j’aime. Il faut faire la différence entre laissez jouer et laissez faire comme au 5×5. Il faut aussi être exigeant sur la technique basket, c’est loin d’être un combat de rues. C’est physique mais ça ne doit pas être agressif, violent. Ce qui est différent aussi c’est dans la relation aux joueurs. Il y a moins de contestations car les joueurs ont moins le temps de contester ! Avec des attaques en douze secondes, à chaque panier ça repart. Quand je fais une erreur en 5×5, je me dis que ça me sert pour le quart-temps suivant mais je m’interdit d’en faire une dans les cinq dernières minutes. En 3×3, il n’y a pas de money time. Une erreur a d’entrée un gros impact. La fédé met beaucoup l’accent sur le 3×3 et ça développe beaucoup de joueurs, de joueuses. C’est fun, hyper athlétique, c’est très spectaculaire, c’est passionnant avec des équipes pros. On est trois en France à arbitrer au niveau international. L’année dernière, j’étais aux Jeux Méditerranéen. Je me suis retiré du 5×5 international l’année dernière et je continue sur le 3×3.

Ça peut vous amener jusqu’aux Jeux Olympiques de Tokyo ?

Je ne fonctionne pas comme ça… Quand j’étais à Alès, j’avais 16 ans, j’allais plusieurs fois par semaine voir les entraînements de l’équipe Pro A de Montpellier. Le coach était Sylvain Lauthié. J’étais avec mon copain Nico Maestre et je voulais juste arbitrer les espoirs. Et après, si je pouvais arbitrer la NM1, et puis la Pro B, et puis la Pro A. Et puis à l’international. La question c’est, que dois-je mettre en œuvre pour y arriver ? En 2001, j’ai été pré-sélectionné pour être arbitre international. Je me suis dit « tu ne parles pas anglais donc tu vas partir en stage en Angleterre. » Je suis parti dans un camp d’arbitre puis dans une famille, j’ai embauché une prof d’anglais pendant un mois. Tous les matins et tous les soirs en me brossant les dents, je me disais « que dois-tu faire aujourd’hui pour te rapprocher de ton rêve ? » C’était l’anglais, la partie technique, tout. En 2004, avec David Chambon on est partis à Las Palmas pour un clinic, et pendant les trois mois qui ont précédé on se parlait anglais. On s’est interdit de se parler français. Mon objectif chaque saison c’est d’arbitrer le plus loin possible puisque c’est ainsi que l’on se rapproche des meilleurs matches. J’ai arbitré hier à Strasbourg, j’ai quinze jours de repos et je vais faire le nécessaire pour être en forme le 11 à Orléans puis pour le match de Pro A qui suit, et faire partie des arbitres sélectionnés pour les playoffs. Etc. Chaque fois qu’il m’est arrivé un truc de chouette dans ma carrière d’arbitre, je me suis dit que je le méritais. Et quand je n’y arrive pas, c’est que je n’ai pas le niveau. C’était le cas quand je ne faisais pas les playoffs ou les finales. Je n’ai pas fait de championnat du monde ou de JO, c’est que je n’avais pas le niveau. Oui, quand j’étais jeune arbitre, j’avais envie d’arbitrer Pau-Limoges ou les leaders du championnat. Et quand j’y suis arrivé, j’ai estimé que je le méritais car je me donne tous les jours les moyens d’y arriver. Donc les JO en 3×3, je n’y pense pas. Je pense aux 2, 3 compets de l’année prochaine en me disant, que vais-je faire pour être le meilleur possible ? Je fais ça pas à pas, ça ne m’empêche pas d’être ambitieux. Et quand ça ne se passe pas très bien, l’utiliser comme une bonne expérience pour le futur. Chaque jour se demander, qu’est-ce que j’ai appris sur moi ? Hier soir à Strasbourg, avec David Chambon, qui a été arbitre en Euroleague, qui a fait une carrière internationale monstrueuse, on s’est assis et on s’est demandé, « qu’est-ce qu’on a fait de bien et qu’est-ce que l’on peut améliorer pour le prochain match ? » Un réflexe permanent.

Vous êtes en fait votre propre coach mental ?

C’est une bonne remarque. J’ai travaillé sur moi durant beaucoup d’années. C’est ce que j’ai raconté, ça m’a aidé sur mon histoire de vie. Ça laisse forcément des traces et pour prendre de la distance sur cette violence-là que l’on vit quand on est gamin. Il y a quatre ans je suis parti chez Denis Troch, un préparateur mental connu dans le milieu (NDLR : ancien joueur et entraîneur notamment du PSG et qui en 2010, a créé l’entreprise H-Cort Performance spécialisée dans l’entraînement, le management et la préparation mentale). L’année de formation m’a permis de faire un gros travail d’introspection, ça a complété mon travail personnel. On a tendance à regarder ce qui ne fonctionne pas au lieu de regarder d’abord ce qui a fonctionné. Il faut faire le contraire et après voir ce que l’on peut améliorer. Hier soir encore j’ai utilisé une méthode pour vite switcher d’une émotion à une autre. J’ai aussi autour de moi des gens beaucoup plus compétents que moi et quand j’ai des difficultés, je partage avec eux.

Coach mental est votre profession depuis quatre ans ?

Je suis toujours salarié du Conseil départemental et j’ai cette activité en parallèle que je pratique auprès de managers, je fais beaucoup de conférences dans le milieu de l’entreprise. J’accompagne aussi quelques start-ups. Je travaille avec des arbitres de rugby, un club professionnel de hand et l’équipe de France féminine de basket. Cette formation m’a permis de comprendre que toutes les portes que je veux ouvrir, je les ouvre. C’est précieux. Prendre conscience en quoi on est unique, croire en soi et s’appuyer sur ses forces.

La finalité du coach mental, c’est de donner confiance aux gens ?

C’est ce que disent Denis Troch et Christian Target, qui sont des référents dans notre pratique : la préparation mentale permet de tirer la quintessence de la préparation physique et de la préparation technique, d’être le plus aligné possible entre le cerveau, le cœur et le corps. Elle permet de transformer une émotion négative en émotion positive. Elle permet d’impliquer tous les jours à l’entraînement un geste le plus juste et le plus régulièrement possible. Elle permet d’apprendre à se connaître, à communiquer, à valoriser ce que l’on fait. Elle aide à trouver ses propres solutions. Avoir une préparation mentale permet forcément d’avoir à vos côtés une personne qui vous écoute. Alors forcément ça joue sur la confiance. La gestion d’émotion est un gros travail. J’aime travailler sur la seconde de doute. Tout athlète comme tout chef d’entreprise à un moment donné a un doute. Comment arriver à le surmonter, à carrément la supprimer ? Ce que j’aime aussi dans la préparation mentale c’est comment réussir à découvrir l’autre, comprendre ce dont il a besoin. Dans une équipe, arriver à faire une place de plus, un encouragement de plus, mettre un lancer-franc de plus, c’est déjà une belle étape.

De plus en plus de sportifs ont des préparateurs mentaux ?

Oui. Beaucoup d’équipes sont accompagnées par des préparateurs mentaux. Il faut intégrer un travail quotidien. Je travaille avec un joueur de hand qui a un travail au quotidien depuis septembre, avant et après les entraînements, avant de se coucher, avant et après les matches. Je dis toujours dans les conférences que je suis latin, je suis du sud, j’ai toujours envie de créer du lien, de partager comme lorsque j’arbitre. J’essaye d’utiliser le moins possible la règle pour privilégier l’humain et c’est ce qui m’a permis d’arriver au plus haut niveau. J’en suis très fier.

Qu’est-ce qui vous a amené à devenir le préparateur mental de l’équipe de France féminine ?

J’ai rencontré Valérie Garnier et elle avait le souhait de se rapprocher de la préparation mentale. On a travaillé sur un projet que l’on a présenté à la fédération qui a été validé. Je suis intervenu lors de la première fenêtre internationale à Brest puis durant la préparation à la Coupe du monde et j’y ai assisté. Il y avait différents travaux collectifs et individuels. Je n’ai pas du tout de contacts avec les joueuses en dehors des fenêtres internationales.

Le mental des basketteuses est-il différent de celui des basketteurs ?

Le mental, en fait, c’est quelque chose que tout le monde a. Par contre, ça ne s’achète pas. Il faut le travailler tous les jours, le développer. Il faut répéter les choses les plus justes possible et parvenir à retenir des aspects positifs. C’est ça qui permet d’avoir un mental dans les moments cruciaux. Je ne vois donc pas de différence entre un homme, une femme, un joueur, une joueuse. C’est vous seul qui décidé ce que vous voulez réaliser et pour ça il faut travailler au quotidien avec au départ un travail d’introspection. Qui je suis ? De quoi je me nourris ? Quels sont mes besoins, mes valeurs ? Vers quoi je veux aller ? Qu’est-ce que je mets en œuvre pour y arriver ? Je travaille beaucoup sur la visualisation mentale, être prêt à appréhender les situations qui peuvent arriver, avoir une réponse, une solution.

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Vous dites que vous avez un père qui vous a abandonné enfant et qui ne respectait pas la loi et que c’est pour ça que l’arbitrage vous convenait ?

J’ai été abandonné à l’âge de cinq ans par mon père et avec ma maman on s’est retrouvés seuls. Elle m’a transmis une leçon de courage comme quoi dans la vie il faut batailler pour réussir, pour réaliser ses rêves. J’ai commencé le basket quand j’avais dix ans car j’avais une voisine qui y jouait. Je trouvais ce sport passionnant, je n’étais pas un shooteur, un grand joueur mais j’aimais faire des passes pour les autres, je me régalais de défendre ensemble. Dès l’âge de 12-14 ans, j’ai ressenti l’envie d’arbitrer. J’avais la force de prendre des décisions rapidement, je n’avais pas peur d’assumer de suite les erreurs. J’aimais la notion de diriger. Au fur et à mesure de gravir des échelons, j’ai réfléchi au pourquoi je suis devenu arbitre. Une activité où on a des règles, où l’on fait respecter la loi. J’avais eu un père qui ne respectait pas du tout la loi et moi j’ai choisi une activité où il fallait être le plus proche de la loi. Dans ma façon d’être, je suis très sensible à la notion d’honnêteté et au respect des règles, que ce soit dans la vie de tous les jours, le code de la route. Cela m’a permis d’être très tôt sensible dans mon activité d’arbitre à la gestion des personnalités. On a les fautes, les fautes techniques pour sanctionner les joueurs mais j’ai toujours préféré l’humain (…) Et d’être au milieu avec un sifflet ça m’a permis de prendre confiance en moi, de diriger à ma façon et j’ai travaillé tous les jours. J’ai assisté à des camps, à des stages, je suis allé à l’encontre de coaches de première division pour les questionner pour apprendre ce qui se fait au plus haut niveau. Tous les jours c’est chercher pour apprendre et apprendre sur moi. Pourquoi je suis là ? Dès que quelqu’un me parle de basket, Chantal Julien (NDLR : responsable des arbitres français de haut niveau), un coach, un joueur, j’écoute car il y a toujours quelque chose à retenir même et surtout à 45 ans. C’est essentiel de ne pas penser détenir la vérité. En trente ans d’arbitrage, j’ai toujours évolué.

Quand on est arbitre international, arbitre t-on de la même façon un joueur suivant sa nationalité, son origine ?

Lorsque j’ai commencé à voyager, j’ai arbitré des joueurs plus ou moins connu et la première chose que j’ai tenu à faire, c’est au maximum d’avoir une connaissance du joueur et de sa personnalité. Et éventuellement de connaître un ou deux mots dans sa langue pour qu’il y ait un premier lien de confiance. « Bonjour ». « Au revoir ». « Merci ». « Comment allez-vous ? » « Bon match ! » Afin de créer un climat essentiel entre un joueur, un coach et un arbitre.

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Photos: FIBA et FFBB

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