Aller au contenu

JO – Barcelone’92 : Moments Magiques

Pour se venger de l’humiliation de Séoul, quatre ans plus tôt, la NBA envoya à Barcelone la Dream Team. Ce fut un triomphe sportif et aussi une formidable opération de marketing. Toutes les stars étaient là, Michael Jordan, Larry Bird, Charles Barkley et Magic Johnson qui avait abandonné la compétit

Pour se venger de l’humiliation de Séoul, quatre ans plus tôt, la NBA envoya à Barcelone la Dream Team. Ce fut un triomphe sportif et aussi une formidable opération de marketing. Toutes les stars étaient là, Michael Jordan, Larry Bird, Charles Barkley et Magic Johnson qui avait abandonné la compétition quelques mois plus tôt à cause de sa séropositivité.

Ceci est le 7e chapitre d’une rétrospective sur les évènements, équipes et joueurs qui ont marqué l’Histoire des JO. A lire aussi :

JO Berlin’36 : Le régisseur, l’inventeur et le dictateur.

Helsinki’52, Melbourne’56, Rome’60 : Interview Jean-Paul Beugnot.

Mexico’68 : Spencer Haywood, un prodige de 20 ans

Munich’72 : Trois secondes, une éternité

Los Angeles’84 : Bobby Knight, le Général

Séoul’88 : La fin d’une ère

[arm_restrict_content plan= »registered, » type= »show »]
25 octobre 1991. Les Lakers sont à Salt Lake City pour un match de pré-saison contre les Jazz. Il y a quelques jours, ils sont revenus de Paris où ils ont gagné avec difficulté le Tournoi Mc Donald. Le téléphone sonne dans la chambre de Earvin « Magic » Johnson. C’est Michael Mellman, le médecin l’équipe, au bout de fil.

Magic a souscrit il y a peu une assurance-vie et il a subi un test sanguin pour l’avaliser. Le toubib lui demande de regagner au plus vite Los Angeles. « Je viens d’être informé que le résultat de ton examen médical pour les assurances n’est pas bon. »

Dans son autobiographie, Ma Vie, le meneur des Lakers raconte qu’il ne s’est pas fait prier et que le lendemain, il était dans le cabinet du docteur Mellman, en compagnie de son agent et ami Len Rosen. Il se souvient que Mickey Mellman était pâle, qu’il avait les traits tirés ce jour-là, qu’il avait visiblement quelque chose de grave à lui annoncer. « Il ouvre un tiroir et saisit une grande enveloppe. Il en sort une plus petite enveloppe, et me regarde droit dans les yeux :

– Earvin j’ai reçu les résultats des tests pour ton assurance-vie. Ils disent que ton test HIV est positif… C’est le virus du sida.

Il m’explique ce que cela signifie. Lon et moi nous regardons sans piper mot. Je n’en crois pas mes oreilles. Mickey continue de parler et je peux voir que lui aussi préférerait ne pas y croire. Je sais qu’au fond de lui, il est triste pour moi (…) Il me parle de l’AZT et des médicaments qui empêchent le virus de se multiplier dans le sang. Il veut que je commence à suivre le traitement immédiatement. »

Magic est sonné. Il dîne avec son agent, parle d’arrêter le basket, envisage de devenir propriétaire d’une franchise NBA, de commenter des matches sur NBC, et sait qu’il lui faut avertir maintenant sa femme, Cookie, qui lui a donné récemment un fils. « J’ai un problème. Je suis séropositif. J’ai le sida. Cookie se met à pleurer. Elle pense que je vais mourir. Je la rassure, je lui parle pendant des heures. Elle ne me demande pas comment j’ai attrapé le virus. Ce n’est pas important. Elle a fait table rase du passé. Elle ne pense qu’à demain. A l’avenir. Le mien. Le sien. Celui du bébé. »

Le 7 novembre, trois cents journalistes sont agglutinés dans la salle de presse du Forum. Les grands networks américains donnent la conférence de presse en direct. Magic, 32 ans, le plus fabuleux meneur de jeu que la planète ait porté, a choisi de rendre publique sa maladie. « Parce que je suis infecté par le virus HIV, je quitte aujourd’hui même les Lakers. » Tout le monde est incrédule. Le sida est une maladie mortelle qui fait des ravages partout dans le monde, notamment dans la communauté noire américaine. Magic continue de sourire et parle d’avenir. « Soyons tout de suite clair : je n’ai pas le sida mais le virus HIV. J’ai l’intention d’aller de l’avant, j’ai un plan pour vivre longtemps, et je vais continuer à vous embêter comme je l’ai toujours fait. La vie continue et je vais être un homme heureux. »

Magic vs Larry

Earvin « Magic » Johnson est né le 14 août 1959 à Lansing, Michigan. Il mesure 2,05 m pour plus de 100 kg. Des mensurations démesurées pour un meneur de jeu. Uniques mêmes. Magic possède des mains en pieuvre. Des yeux qui peuvent voir partout en même temps, à gauche, à droite, devant, derrière. C’est un artiste. Sa spécialité, sa griffe : la passe décisive en aveugle suite à une longue chevauchée. The no look pass.

La légende a commencé à la fin des années des soixante-dix dans le Michigan et s’est propagée dans tout le pays car Magic a eu directement à en découdre avec un rival aussi prestigieux que lui, Larry Bird. Bird est un bouseux de l’Indiana, moche, introverti, à la peau laiteuse. Magic est un beau gosse black, aime le strass, et il adore partager ses émotions. Ils se sont retrouvés en 1979 en finale universitaire. Michigan State contre Indiana State. NBC a su vendre l’affrontement : 45 millions de foyers américains suivent le match en direct, un record. Bird est le College Player of the Year, mais il s’englue dans la 1-3-1 des Spartans de Michigan State. C’est Magic qui se couvre de gloire.

La rivalité scénique – car dans la vie les deux hommes vont s’apprécier dès qu’ils vont se connaître – va s’amplifier en NBA car, comme par enchantement, Bird rejoint les Boston Celtics et Magic les Lakers. Deux maillots qui leur vont comme un gant. C’est côte Est contre côte Ouest, gris contre doré, sueurs contre parfum, cols bleus contre paillettes. La décennie quatre-vingts sera illuminée par les rendez-vous entre Magic et Bird.

Magic coupe des lauriers et fauche le blé. Il est cinq fois champion NBA, trois fois MVP et devient millionnaire. Son sourire fait des ravages et il se goinfre de sexe. Le statut de star NBA lui permet tous les excès. « Après chaque match, quand le bus nous ramenait à l’hôtel, nous étions attendus dans le hall par quarante ou cinquante femmes qui brûlaient de nous rencontrer. La plupart d’entre elles étaient belles, et quelques-unes sublimes. » Des Noires, des Blanches, des blondes, des Hispaniques, des Asiatiques, des secrétaires, des avocates, des sottes, des futées. Tout ce qu’il faut sur un plateau.

Alors, dès que Magic apprend qu’il porte en lui le fléau mortel, il devient pédagogue et tient à ce que son malheur serve aux autres. « Je veux que chacun comprenne que j’ai le virus HIV, je veux que tout le monde pratique le safe sex, qu’ils mettent des préservatifs, » dit-il au Arsenio Hall Show. « Quand les médecins m’ont parlé du sida, ils m’ont dit qu’il y avait un million de personnes aux USA qui ont le virus et qui ne le savent même pas. Voilà pourquoi hier, je suis allé devant le public, pour dire « je l’ai », je veux éduquer le public, la communauté noire, il ne faut pas en avoir honte. »

Et voici la Dream Team

Magic va d’autant plus servir de porte-voix qu’il n’arrête pas complètement le basket. Il a l’intention de participer aux Jeux Olympiques de Barcelone. L’envie lui est venue en regardant les kids universitaires se faire dévorer par les Soviétiques à Séoul quatre ans plus tôt. « Il est temps de mettre les choses au point. Il se pourrait bien que j’aille à Barcelone pour montrer qui est vraiment le premier pays au monde en basket, » dira-t-il alors. Le Comité International Olympique et la Fédération Internationale ont levé les barrières qui empêchaient les pros américains de participer aux Jeux. La NBA a saisi la balle de vengeance au rebond. David Stern, son big boss, veut rassembler les meilleurs, tous les meilleurs. Il réalise un formidable coup de marketing en baptisant la sélection « Dream Team », équipe de rêve… La planète orange est émerveillée lorsqu’un photographe de Sports Illustrated réalise un cliché pour la postérité en réunissant, sous le maillot national, lors du All-Star Game 1991 à Charlotte, Jordan, Bird, Barkley, Erwing et Magic. Même avec le virus du sida, Magic Johnson ne peut pas manquer ça. Il s’entraîne dont comme un forcené. Et comme les fans veulent de lui au All-Star Game, il se rend à Orlando même s’il a officiellement quitté la NBA depuis trois mois. Et c’est le nouveau showtime. Magic plante 25 points, dont un trois sur trois à 3-pts, et délivre 9 passes. Il est élu MVP.

Tout le monde veut être photographié avec Magic

Les Dreamteamers sont douze rock stars. Les fans veulent les approcher, les toucher, obtenir un précieux autographe, se faire prendre en photo avec eux. Plus surprenant, leurs adversaires eux-mêmes sont heureux comme des gosses d’être face à ces joueurs qu’ils ont eu en poster dans leurs chambres. « Quand on s’est retrouvé au milieu du terrain, j’étais comme un fou de le voir, lui, Magic Johnson, en train de me serrer la main, » commente ainsi l’Argentin Marcelo Milanesio.

« Quand nous avons rencontré l’Argentine, le type qui défendait sur moi me parlait sans arrêt, » écrira Magic dans Ma Vie. « Son anglais était très approximatif, mais j’ai fini par comprendre qu’il réclamait mon maillot avec un autographe. Je ne pouvais pas lui donner celui que je portais, mais je lui ai envoyé un autre identique. Au cours du même match, un joueur argentin a eu de la chance sur un lancer-franc. La balle a heurté le cercle mais elle est retombée à l’intérieur du panier. Le gars est venu me trouver et m’a dit : C’est magique non ? »

A Barcelone, l’effervescence est pire encore. L’équipe de basket a choisi de se mettre en marge du mouvement olympique et de ne pas loger dans le village des athlètes. Elle a opté pour un hôtel du centre-ville gardé comme un palais présidentiel jour et nuit. La décision créée la polémique mais se justifie. A la moindre apparition, plusieurs centaines de personnes sont rassemblées devant l’hôtel rien que pour voir les basketteurs américains monter dans le bus. Lors de la cérémonie d’ouverture, les autres sportifs se précipitèrent sur Magic pour lui serrer la main, lui demander une dédicace ou se faire prendre en photo avec lui. Magic a délivré des milliers de sourire magiques durant cette quinzaine olympique. Le Lituanien Arturas Karnishovas, une fois retourné sur le banc, sort son instamatic et mitraille les Dreamteamers en plein match !

Les premières sorties sur le terrain de le Dream Team sont observées au microscope, mais viennent vite rengaine. Magic lance les fast breaks, Jordan fait des dunks, et personne ne résiste. Tout le monde prend des cartons. La différence moyenne avec les adversaires est très exactement de 43,7 points. Le coach Chuck Daly n’a pas besoin de prendre le moindre temps-mort durant tout le tournoi. La Dream Team est bien la meilleure équipe de tous les temps et, très probablement, tous sports confondus. En finale, la Croatie dérouille comme les autres : 117-85. Jordan est le top-scoreur et Magic le meilleur passeur. Sur le podium, Michael Jordan, icône de Nike, cache le Reebok de son survêtement avec le drapeau étoilé. Magic retient ses larmes. « Mon corps tout entier a tremblé. »

« Les médias avaient surestimé les chances des équipes de Croatie et de Lituanie, » analysera Magic. « Lorsque nous les avons rencontrées, nous étions au mieux de notre forme. D’une façon générale, le niveau de la compétition n’était pas aussi élevé que nous le pensions. Nous avions une défense extrêmement efficace… En vérité, nous aurions pu gagner des matches avec 70 ou 80 points d’avance si nous l’avions voulu. Mais les Jeux Olympiques n’ont pas été créés dans ce but. Notre objectif était de battre nos adversaires, pas de les humilier. »

Les adversaires de la Dream Team n’ont jamais joué leur chance à fond. Ils étaient comme des gosses devant le père Noël, fascinés. Cette dévotion ne leur a pas permis de produire leur meilleur jeu. Quatre ans plus tard, la Yougoslavie rentrera sur le parquet du Georgia Dome d’Atlanta avec le couteau entre les dents. Et à Sydney, les Lituaniens seront à deux doigts de renverser les idoles. « Je ne serai plus là d’ici à ce que l’on retrouve une équipe comme celle-là, » dira Magic après les Jeux de Barcelone. Y en aura-t-il d’ailleurs une autre un jour ?

x

[armelse]

[arm_restrict_content plan= »registered, » type= »show »]
25 octobre 1991. Les Lakers sont à Salt Lake City pour un match de pré-saison contre les Jazz. Il y a quelques jours, ils sont revenus de Paris où ils ont gagné avec difficulté le Tournoi Mc Donald. Le téléphone sonne dans la chambre de Earvin « Magic » Johnson. C’est Michael Mellman, le médecin l’équipe, au bout de fil.

Magic a souscrit il y a peu une assurance-vie et il a subi un test sanguin pour l’avaliser. Le toubib lui demande de regagner au plus vite Los Angeles. « Je viens d’être informé que le résultat de ton examen médical pour les assurances n’est pas bon. »

Dans son autobiographie, Ma Vie, le meneur des Lakers raconte qu’il ne s’est pas fait prier et que le lendemain, il était dans le cabinet du docteur Mellman, en compagnie de son agent et ami Len Rosen. Il se souvient que Mickey Mellman était pâle, qu’il avait les traits tirés ce jour-là, qu’il avait visiblement quelque chose de grave à lui annoncer. « Il ouvre un tiroir et saisit une grande enveloppe. Il en sort une plus petite enveloppe, et me regarde droit dans les yeux : – Earvin j’ai reçu les résultats des tests pour ton assurance-vie. Ils disent que ton test HIV est positif… C’est le virus du sida. Il m’explique ce que cela signifie. Lon et moi nous regardons sans piper mot. Je n’en crois pas mes oreilles. Mickey continue de parler et je peux voir que lui aussi préférerait ne pas y croire. Je sais qu’au fond de lui, il est triste pour moi (…) Il me parle de l’AZT et des médicaments qui empêchent le virus de se multiplier dans le sang. Il veut que je commence à suivre le traitement immédiatement. »

Magic est sonné. Il dîne avec son agent, parle d’arrêter le basket, envisage de devenir propriétaire d’une franchise NBA, de commenter des matches sur NBC, et sait qu’il lui faut avertir maintenant sa femme, Cookie, qui lui a donné récemment un fils. « J’ai un problème. Je suis séropositif. J’ai le sida. Cookie se met à pleurer. Elle pense que je vais mourir. Je la rassure, je lui parle pendant des heures. Elle ne me demande pas comment j’ai attrapé le virus. Ce n’est pas important. Elle a fait table rase du passé. Elle ne pense qu’à demain. A l’avenir. Le mien. Le sien. Celui du bébé. »

Le 7 novembre, trois cents journalistes sont agglutinés dans la salle de presse du Forum. Les grands networks américains donnent la conférence de presse en direct. Magic, 32 ans, le plus fabuleux meneur de jeu que la planète ait porté, a choisi de rendre publique sa maladie. « Parce que je suis infecté par le virus HIV, je quitte aujourd’hui même les Lakers. » Tout le monde est incrédule. Le sida est une maladie mortelle qui

[/arm_restrict_content]
[arm_restrict_content plan= »unregistered, » type= »show »][arm_setup id= »2″ hide_title= »true »][/arm_restrict_content]

Commentaires

Fil d'actualité