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La semaine de Limoges : William Howard, le sniper

On a rarement vu un Français avec un si bon shoot au-delà de la ligne 6,75m (8/17 après quatre matches, 37,0% de réussite la saison dernière). Déjà all-star en décembre 2016, William Howard (2,02, 23 ans) devrait être l’un des joueurs majeurs de la Pro A avec le CSP.

On a rarement vu un Français avec un si bon shoot au-delà de la ligne 6,75m (8/17 après quatre matches, 37,0% de réussite la saison dernière). Déjà all-star en décembre 2016, William Howard (2,02, 23 ans) devrait être l’un des joueurs majeurs de la Pro A avec le CSP.

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« Ma mère et mon père, ce sont deux histoires, deux chemins différents. »

William Howard est le fils d’un Américain et d’une Française.

Son père porte le même patronyme que lui mais c’est son surnom, Skip, qui était son signe distinctif. Skip, bondir en français. Tout un programme. Skip Howard, 2,06m, né en 1952, est sorti de Bowling Green à vingt-trois ans et comme beaucoup de basketteurs américains, il lui a fallu prendre ses valises et partir à l’étranger pour gagner son big Mac. Un scoreur Skip, le deuxième de la Nationale 1 (l’ancienne Pro A), en 1979-80, sous le maillot de la JA Vichy. 30,8 points en moyenne. Ce furent aussi deux belles années à Tours aux côtés de Jacques Cachemire. De fil en aiguille, et en passant par Bourg-en-Bresse, Skip s’est retrouvé à Montbrison où à l’issue de sa carrière de joueur il a coaché les filles du club.

Parmi ses joueuses, Sylvaine Grenier. Les Grenier sont des commerçants bien connus du centre-ville. C’est le grand-père jurassien d’origine, supporter des clubs de basket, de foot et de tennis qui a transmis le virus du sport à la famille.

« Son fils Henri atteignit par exemple la 28e place du classement de tennis français. Répugnant en parler lui-même, on a pu retrouver sa trace au palmarès de quelques tournois, y compris internationaux. Sa fille Catherine, joueuse de première série, choisit, elle, le professorat tennistique, qu’elle pratiqua longtemps avant de passer à autre chose, » indique Le Progrès.

C’est ainsi que Skip et Sylvaine tombèrent amoureux, se marièrent et de leur union sont nés Kathleen –qui joua sous le maillot du BCMF jusqu’en Nationale- et William trois ans plus tard.

Will a reçu et reçoit toujours les conseils avisés de ses parents pour ce qui est du basket comme des autres éléments de la vie.

« J’ai vu jouer mon père juste un peu en fin de carrière à Montbrison. Je n’ai plus trop de souvenirs », raconte Will à propos de Skip. « L’été on allait faire des shoots ensemble. Au début, je faisais un peu le malin, je gagnais, et après il commençait à faire ses séries, il ne ratait plus rien. Moi je commençais à rater et lui il commençait à me chambrer. On regardait aussi beaucoup de matches ensemble. Lorsqu’il me parlait quand j’étais jeune, je ne l’écoutais pas forcément. C’est plus en grandissant, en me frottant à des gars plus vieux, plus forts, que je me suis rendu compte qu’il fallait avoir la gnaque. »

Ses expériences américaines

Il est tentant de faire un parallèle avec trois autres basketteurs célèbres, Tony Parker, Edwin Jackson et Kilian Hayes, fils respectivement de Tony Sr, Skeeter et Deron. Encore que la culture américaine du néo-Limougeaud n’est pas si prononcée que ça. Son père ne lui a pas appris l’anglais dès sa naissance et il n’a découvert les Etats-Unis qu’à l’âge de quatorze ans.

« Pour moi, il est à 90% français », estime son coach au CSP et au HTV, Kyle Milling, à même de juger étant lui-même américain et français. « C’est le mec de Montbrison, de la campagne et c’est une force. C’est un mec bien dans sa tête, éduqué. Oui, il est très gentil, pas timide car s’il ne parle pas devant le groupe il fait ses blagues. Il est calme, réservé. Il montre son caractère de temps en temps et je pense que s’il en fait preuve encore plus souvent il pourra viser encore plus haut. »

La découverte de ses racines américaines a constitué un choc dans le sens que lors d’un stage sur-place il a pu être confronté à la mentalité particulière des basketteurs américains du même âge.

« Ce qui m’avait marqué c’est qu’il y avait des gars qui n’étaient pas forcément talentueux mais ils étaient toujours à 110%. Les mecs, ils y allaient ! Ça courait, ça sautait de tous les côtés. »

A l’époque, William Howard était pensionnaire au Centre Fédéral et un des tout meilleurs Français de sa classe d’âge. Il leur était tout de même supérieur, non ?

« Basketment parlant, oui, mais dans l’intensité des courses je sentais que je n’étais pas comme eux. Eux c’était d’abord le physique et moi j’étais plus dans la retenue. Eux c’était limite un sport individuel. Dès qu’ils avaient le ballon c’était battre le joueur qui défendait sur eux. »

Un peu plus tard, Will a voulu enrichir son expérience américaine et il a fait une saison dans une Prep School du Maryland. Cela lui a permis d’apprendre l’anglais qu’il maîtrise depuis qu’il fréquente les joueurs américains dans le basket professionnel français. Il avait l’université de Washington dans le viseur mais pour cela il lui fallait intégrer comme étape un Junior College. Il a abandonné le projet. Frustré ?

« Un peu mais les cours ce n’était pas trop mon truc. Laissez tomber l’école, ça m’arrangeait bien d’un côté », dit-il en se marrant.

Sa dernière expérience aux States remonte à l’été dernier. Il a participé à une Summer League avec les Memphis Grizzlies. Quoique le mot « participer » est un peu excessif. Il a passé en tout et pour tout une minute et quarante secondes sur le terrain !

« Ils m’avaient suivi durant la saison. Je ne sais pas pourquoi ils m’ont amené pour faire ça », se demande t-il. « Ils ont pris le billet d’avion, la chambre d’hôtel pendant neuf jours. On était trois ou quatre à ne pas trop jouer. J’ai vite compris qu’ils ont fait jouer les mecs qu’ils avaient sous contrat, ceux qui avaient déjà fait une saison et ceux qu’ils avaient drafté cette année. C’était un peu long… En plus l’échauffement est rapide. En vingt minutes c’est bouclé, les mecs faisaient trois ou quatre alllers-retours. Deux jours matches, un jour repos, trois jours matches, trois jours de repos. Les jours de repos il y avait entraînement. Après les trois premiers matches, j’ai dit à mon agent que je voulais repartir. « Zéro minute en trois matches, ils perdent de l’argent ! C’est strictement inutile que je reste ». Il y a eu deux ou trois autres matches. Je suis donc rentré 1’40. Le jour de repos, je suis resté dans ma chambre. »

David Fizdale, le head coach des Grizzlies, était présent aux matches et aux entraînements mais c’est celui de l’équipe de D-League qui gérait l’équipe de Summer League. Will est rentré en France sans la moindre explication. C’est ça aussi l’Amérique.

Denain et le HTV l’ont lancé

Revenons à son parcours français. Du classique. Des débuts Montbrisson, forcément. Et puis une année en minimes France à Roanne. Trois ans à l’INSEP. Et après la Prep School aux Etats-Unis, il a passé deux saisons au BCM Gravelines.

Will a porté le maillot bleu dans toutes les catégories mais pas dans des promotions hyper performantes : deux fois 7e, une fois 9e. En juniors, il fut ainsi le 4e scoreur français (8,6 points) derrière Mam Jaiteh, Livio Jean-Charles et Hugo Invernizzi.

C’est finalement plutôt avec les espoirs du BCM que son nom est apparu dans les journaux et sites spécialisés. A son palmarès deux Trophée Coupe de France, un titre de champion de France, et un Trophée du Futur avec un oscar de MVP en bonus. Will était de la même génération que Mathieu Wojciechowski et Jimmy Djimrabaye. Seulement, il n’a pas tiré de bénéfices direct de ses productions puisqu’il n’a été appelé que pour 6 minuscules minutes avec les pros en deux saisons. Par comparaison, au même moment, son camarade de promo chez les Bleus, Hugo Invernizzi, était dans le cinq majeur du Havre pour 23′ de temps de jeu et 6,5 points en moyenne.

« Ils ne m’ont pas fait confiance et comme j’étais un jeune joueur, je ne savais pas trop ce que je devais faire. A l’époque j’avais l’impression que c’était trop élevé, de ne pas être épaulé. Le coach disait, « tu joues », c’est tout. Tu te débrouilles. »

C’est à l’ASC Denain Voltaire, en Pro B, avec le coach Jean-Christophe Prat, Yakuba Ouattara et Jerry Boutsiele qu’il va enfin être immergé chez les pros. Il a 21 ans.

« Pour me lancer c’était idéal car le coach nous protégeait beaucoup. Même si on n’était pas dans un bon jour, on jouait quand même 15 minutes et dans un bon jour 20-25. C’était bien qu’il nous laisse sur le terrain même quand on n’était pas en confiance. La deuxième partie de saison était plus compliquée. On était onze joueurs avec un match par semaine. Les temps de jeu était bien réparti. Si bien qu’au début je jouais 20 minutes et si à la fin je ratais un ou deux tirs, c’était dur. Soit je ne rejouais plus, soit les ballons étaient chers. »

Mais le vrai lancement, c’est à Hyères-Toulon avec Kyle Milling qu’il s’est produit. Il est passé en une saison de 6,9 à 12,9 points et aussi de 8,2 à 14,5 à l’évaluation.

« Je me suis remis dans le jeu, on va dire. Pour me convaincre, le coach m’a dit, « si tu es dans un bon jour, si tu fais ce que je te dis, tu vas jouer vingt-cinq minutes. Je te donnerai plus de responsabilités qu’à Denain où tout était partagé ». J’étais plus chaud pour aller à Denain car je connaissais, c’était plus rassurant, mais j’en ai parlé à mes parents et ils m’ont dit : « non, vas à Toulon ». Je ne regrette pas le choix même si la décision a été difficile. Le coach m’avait dit, « j’ai besoin que tu sois là tous les week-ends » alors qu’à Denain, si je ratais mon match, c’était moins grave puisque les responsabilités étaient plus réparties. »

L’une des explications de la montée surprise du HTV en Pro A, c’est William Howard. Et de la bonne tenue de l’équipe varoise la saison dernière parmi l’élite, c’est toujours Will. Il s’est fendu au final de 9,6 points et 11,7 d’évaluation et il a été récompensé par une sélection au All-Star Game de Bercy où il ne s’est pas laissé impressionner shootant 12 fois pour marquer 10 points.

« Je regarde plus l’éval », répond t-il quand on lui demande s’il est sensible à son classement dans les marqueurs français. « Au début j’étais bien, dans le top 5, et puis j’ai chuté. Pour moi toucher des ballons, la défense, les interceptions, c’est important, j’aime bien aussi prendre des rebonds. C’est pour ça que je préfère regarder l’évaluation que les points. »

Le HTV devenait un peu trop étroit pour un tel talent. Will a reçu trois propositions et il a choisi de suivre son coach, Kyle Milling, au CSP.

« Ce qu’il m’a apporté, c’est la confiance. Il y a un truc qu’il m’a dit lorsque je suis arrivé à Toulon « je m’en fous que tu rates un, deux, trois tirs. Continue à shooter, tu es un shooteur. » Tu es là pour shooter, si tu rates ce n’est pas grave. Je t’ai pris pour ta qualité de shoot. Si tu refuses un tir ouvert, je te sors. Parce que si tu refuses un tir ouvert, tu me sers à rien vu que t’es un shooteur. »

Kyle Milling se souvient parfaitement de son injonction.

« C’était notre première année ensemble. Il voulait toujours faire l’extra passe. J’ai gueulé sur lui. Derrière il a planté un trois-points. Et voilà. ».

Limoges… Ses bannières, Beaublanc, sa passion exacerbée. Will reconnaît que c’est rassurant pour lui de toujours avoir le même coach à ses côtés.

« Mon agent m’a dit que Limoges c’est un club qui peut me faire passer un cap. L’environnement peut être dur car les supporters sont vraiment exigeants. C’est le seul club dans le basket en France où il y a des ultras. Ça ressemble un peu à un club de foot », commente celui qui est lui-même fan de l’AS Saint-Etienne et qui connaît donc bien les relations entre les deux camps. « Il y a eu un entraînement ouvert au public avec 1 200 personnes. Ça fait plus que beaucoup de matches à Toulon ! C’est bien de voir ça. Déjà à Denain on avait fait une belle saison et le public était content car c’est une ville basket. Et là Limoges c’est le calibre au-dessus. C’est plus motivant de jouer devant des gens qui veulent nous pousser que dans une salle vide. Ce qu’ils attendent de nous, c’est qu’on se batte, que l’on fasse honneur à leurs couleurs, que l’on gagne des matches. Et moi ce dont j’ai envie, c’est de gagner. »

L’exigeant public limougeaud a découvert d’emblée que le jeune homme n’a pas froid aux yeux. Il a pris sept shoots à trois-points, en a converti quatre et mis 15 points lors de la large victoire sur Chalon (90-65) pour sa première apparition à Beaublanc. Son geste de tir est élégant et Will aime par-dessus tout armer derrière l’arc mais, comme le souligne son coach, Will n’est pas unidimensionnel.

« Avec sa taille, ses qualités athlétiques, son shoot et aussi son QI basket qui est très élevé, il n’y a pas beaucoup de joueurs JFL comme ça en France qui sont complet comme lui. Ce n’est pas le joueur le plus rapide en défense mais c’est celui qui touche le plus de ballons, il sent le basket. Son avenir c’est plus que Limoges, un jour. »

« Notre force ça va être notre défense »

Quatre questions en bonus à Will Howard.

Quel est votre plan de carrière ?

« J’ai signé deux ans. Je veux progresser. J’aimerais découvrir le plus haut niveau européen et pourquoi pas la NBA. Il y a plusieurs façons d’y arriver. Comme Yakuba (Ouattara) cet été avec un two ways contract. C’est vrai que la NBA prend des joueurs jeunes ou après elle va chercher des joueurs en Europe, qui sont performants en Euroleague. Pour moi, je pense que ça sera comme ça. Tant que je peux avancer, découvrir des choses, aller vers le haut niveau… »

Dans quels domaines voulez-vous faire des progrès ?

« Prendre plus de rebonds, être plus adroit à trois-points. Je vais essayer aussi de plus alterner, de plus attaquer le cercle. Je suis dans un rôle de shooteur et je laisse le jeu venir à moi. Les créateurs, ce sont plus les meneurs et arrières. J’essaye de créer de l’espace pour que l’aide reste sur moi et qu’il y ait des passes faciles aux intérieurs par exemple. »

Etes-vous candidat de l’équipe de France pour les qualifications à la Coupe du Monde ?

« Je ne me prends pas la tête avec ça. Je me dis que si ça doit arriver, ça sera du bonus. Comme la Coupe d’Europe qui a été en plus à Limoges. Ça passera par de bonnes performances avec Limoges si je veux y arriver. Il faut d’abord que je me concentre sur ma saison au CSP. Si ça arrive, ça sera avec plaisir. »

Quel est votre regard sur le CSP 2017-18 ?

« On a vraiment un bon potentiel. On va embêter pas mal d’équipes. On a encore du boulot. Notre force ça va être notre défense. Si on arrive à bien défendre et développer du jeu rapide, je crois qu’on fera une belle saison car avec les dix joueurs l’intensité défensive peut rester pendant 40 minutes. »

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« Ma mère et mon père, ce sont deux histoires, deux chemins différents. »

William Howard est le fils d’un Américain et d’une Française.

Son père porte le même patronyme que lui mais c’est son surnom, Skip, qui était son signe distinctif. Skip, bondir en français. Tout un programme. Skip Howard, 2,06m, né en 1952, est sorti de Bowling Green à vingt-trois ans et comme beaucoup de basketteurs américains, il lui a fallu prendre ses valises et partir à l’étranger pour gagner son big Mac. Un scoreur Skip, le deuxième de la Nationale 1 (l’ancienne Pro A), en 1979-80, sous le maillot de la JA Vichy. 30,8 points en moyenne. Ce furent aussi deux belles années à Tours aux côtés de Jacques Cachemire. De fil en aiguille, et en passant par Bourg-en-Bresse, Skip s’est retrouvé à Montbrison où à l’issue de sa carrière de joueur il a coaché les filles du club.

Parmi ses joueuses, Sylvaine Grenier. Les Grenier sont des commerçants bien connus du centre-ville. C’est le grand-père jurassien d’origine, supporter des clubs de basket, de foot et de tennis qui a transmis le virus du sport à la famille.

« Son fils Henri atteignit par exemple la 28e place du classement de tennis français. Répugnant en parler lui-même, on a pu retrouver sa trace au palmarès de quelques tournois, y compris internationaux. Sa fille Catherine, joueuse de première série, choisit, elle, le professorat tennistique, qu’elle pratiqua longtemps avant de passer à autre chose, » indique Le Progrès.

C’est ainsi que Skip et Sylvaine tombèrent amoureux, se marièrent et de leur union sont nés Kathleen –qui joua sous le maillot du BCMF jusqu’en Nationale- et Will trois ans plus tard.

Will a reçu et reçoit toujours les conseils avisés de ses parents pour ce qui est du basket comme des autres éléments de la vie.

« J’ai vu jouer mon père juste un peu en fin de carrière à Montbrison. Je n’ai plus trop de souvenirs », raconte Will à propos de Skip. « L’été on allait faire des shoots ensemble. Au début, je faisais un peu le malin, je gagnais, et après il commençait à faire ses séries, il ne ratait plus rien. Moi je commençais à rater et lui il commençait à me chambrer. On regardait aussi beaucoup de matches ensemble. Lorsqu’il me parlait quand j’étais jeune, je ne l’écoutais pas forcément. C’est plus en grandissant, en me frottant à des gars plus vieux, plus forts, que je me suis rendu compte qu’il fallait avoir la gnaque. »

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Photos: Philippe Pécher (CSP) et LNB

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