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Interview Frédéric Sarre (Bourg) : « Ça nous intéresse de ne pas sélectionner des joueurs qu’à travers leurs tailles »

Pour avoir coaché notamment Limoges et Pau, Frédéric Sarre, 57 ans, est une figure du basket français. Après trois saisons comme entraîneur à la JL Bourg, il en est devenu le directeur du développement sportif. Une fonction charnière qui l’a amené dans la première partie de l’interview à nous parler

Pour avoir coaché notamment Limoges et Pau, Frédéric Sarre, 57 ans, est une figure du basket français. Après trois saisons comme entraîneur à la JL Bourg, il en est devenu le directeur du développement sportif. Une fonction charnière qui l’a amené dans la première partie de l’interview à nous parler du retour de son équipe en Jeep Elite, du recrutement, des problèmes de santé de celui qui pourrait être sacré MVP de la saison, l’Américain Zachery Peacock. Nous abordons maintenant la formation de la JL avec son école de meneurs.

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Les U17 ont gagné la Coupe de France. C’est un signe que le travail du centre de formation porte ses fruits ?

Depuis que l’on bénéficie d’un nouvel outil qui est Ekinox, on a un fonctionnement au niveau du centre de formation beaucoup plus performant pour entraîner collectivement, suivre individuellement. Il y a donc à Ekinox la salle qui est fabuleuse pour les soirs de match mais aussi notre salle d’entraînement, on est chez nous. Ça permet de mettre en place pas mal de travail et on a également des préparateurs physiques que ce soit pour les U18 et les U21 qui nous permettent de bien développer les gamins au niveau physique, athlétique, motricité, etc. Oui, on souhaite continuer à développer notre centre de formation, à avoir des performances. Aujourd’hui celles-ci sont davantage liées au travail collectif que font les coachs, que ce soit Jean-Luc Tissot pour les U21 et Pierrot Murtin pour les U18 et les U17. Ce que l’on souhaite à terme c’est d’avoir non seulement la capacité de développer du collectif mais aussi des joueurs à titre individuel. Bien évidemment, il y a Thibault Desseignet qui est sorti de cette filière Ecole des Meneurs/U21. On a le petit Hugo Benitez (1,85m) qui est devenu MVP des U17, qui est aussi un meneur de jeu. On a aussi Théo Rey (1,91m) qui est en équipe de France U18. On commence à bénéficier de tout le travail que l’on a mis en place et on espère que l’on va pouvoir de plus en plus recruter des joueurs avec une forte potentialité.

Quelles sont les spécificités de votre école des meneurs ?

Elle va chez nous des U9 au U21. Au sein du club associatif, la JL Amateur, il y a une partie du travail au sein de l’école des meneurs. Evidemment pour les U9 et les U11, ils sont tous meneurs car on ne connaît pas leurs tailles futures. Et petit à petit on fait des sélections pour amener à développer des joueurs dans la motricité, la mobilité, la reconnaissance, le jeu. On ne sait pas s’ils feront 2,00m ou 2,10m mais on est sûr qu’ils développent d’autres qualités. Notre volonté c’est de former des joueurs qui dégagent d’autres valeurs que le physique. Donc les valeurs de leadership, de connaissances de basket, de gestion. Ça nous intéresse de ne pas sélectionner des joueurs qu’à travers leurs tailles.

Recrutez-vous des joueurs pour cette école de meneurs ?

Oui. On commence à être sollicité par des joueurs parce qu’ils veulent participer à notre centre de formation quand ils sortent de U15, qu’ils sont meneurs de jeu et qu’ils veulent participer à notre école de meneurs.

« On fait venir des gens de l’extérieur comme Laurent Sciarra et Antoine Rigaudeau qui sont venus participer à des stages »

Comment se fait la sélection par catégories ?

C’est en fait une école de meneurs/arrières. En U9, ce sont tous les gamins. On a une petite sélection qui se fait au niveau du club amateur et en U15, on en a plus que cinq ou six et en U21, on a le même nombre. On fait donc des séances spécifiques pour les développer et on fait venir des gens de l’extérieur comme Laurent Sciarra et Antoine Rigaudeau qui sont venus participer à des stages. En fin de compte, c’est comme s’il y avait une option dans une formation, il y a une école de meneurs en plus pour eux. Chaque semaine il y a au moins un entraînement qui est dédié uniquement au développement des postes meneurs/arrières.

Il y a un bon exemple d’un géant qui a débuté comme meneur de jeu, c’est Arvidas Sabonis (2,20m), qui a pu ainsi développer en jeune des qualités extraordinaires de mobilité, de dextérité, de lecture du jeu, de tir à trois-points ?

Je pense que le plus jeune possible on peut développer de la motricité, de l’habilité, quitte après à donner des spécialisations à cause de la morphologie, la croissance des gens les amènent à jouer à d’autres postes. Si demain on a un gamin qui fait deux mètres et qui peut jouer meneur car il a toutes les qualités techniques, mentales, de leadership, c’est un avantage. Mais on ne veut pas non plus empêcher un gamin de se développer sous prétexte qu’il ne fait que 1,75m. Il faut leur donner leur chance d’être des joueurs de haut niveau. Certains Américains qui viennent en France pour jouer meneur ne font pas 1,90m.

Quand on voit Lucas Bourhis de Gravelines, on se dit qu’il a un profil de M. Tout-le-Monde et pourtant quand il est entré en jeu face à Nanterre, il s’est très bien débrouillé ?

Bien sûr. C’est un très bon joueur et il faut que l’on continue de donner leur chance à ces gens-là d’atteindre le meilleur niveau possible et ne pas ne pas les sélectionner au départ parce qu’ils font 1,90m. Ce qui compte c’est le leadership, la connaissance, la capacité à gérer les rythmes ou à être scoreur. Il n’y a pas qu’un seul style de meneur de jeu, il y en a plein.

« Si le potentiel de Thibault Desseignet est d’être meneur de jeu de Pro B, on en sera complètement satisfait »

Thibault Desseignet est le symbole de la formation de la JL, mais son temps de jeu reste faible ?

Il est venu chez nous de Roanne parce qu’on avait l’école des meneurs. Tout dépend du profil du joueur. Je pense que Thibault Desseignet a un style de meneur de jeu qui a besoin d’avoir du temps de jeu pour s’exprimer. C’est un garçon qui a la possibilité de conduire une équipe, de maîtriser les rythmes, d’être un relais du coach sur le terrain et d’avoir une capacité de scorer. Ce n’est pas un joueur dont les qualités essentielles sont l’explosivité, la dureté défensive et les qualités athlétiques qui lui auraient peut-être permis d’être plus vite dans une équipe de Pro A ou de Pro B où va mettre un Ricain devant et que le remplaçant qui est JFL, on ne lui demande pas de scorer mais de mettre de la pression, de changer de rythme, de permettre au joueur américain de souffler deux minutes, d’éviter la troisième faute en première mi-temps. Si le potentiel de Thibault Desseignet est d’être meneur de jeu de Pro B, on en sera complètement satisfait. Si à terme, il est encore jeune, il peut être deuxième meneur de Pro A, on en sera complètement satisfait de notre école. Et si c’est chez nous ça sera parfait.

Le plus célèbre meneur bressan c’est Antoine Diot. Il allie taille (1,93m), technique et leadership. C’est possible d’en former d’autres comme lui, il faut beaucoup d’ingrédients ?

Bien sûr. La taille n’est pas une qualité essentielle. Antoine est grand mais ce n’est pas non plus un géant mais il a plein de qualités qui lui permettent d’évoluer à ce niveau-là. Il a grandi à Bourg-en-Bresse mais il est parti très vite d’ici pour intégrer l’INSEP puis Le Mans, Paris, Strasbourg et puis maintenant Valence. On espère dans notre école de meneur trouver à un moment ou à un autre un joueur de ce niveau-là et de l’amener directement dans notre équipe ou en tous les cas de grossir les rangs d’une équipe professionnelle. Et c’est pour cela que l’on propose chaque année un contrat à Antoine…

(Rires). Il répond à toutes les caractéristiques dont on a besoin ! A l’usure, on l’aura. Je plaisante. Quand on fait le scouting chez les jeunes et que l’on voit des meneurs de jeu qui nous intéressent, on cherche surtout à les accueillir en U18 pour le centre de formation. On est très vite en concurrence avec les grosses équipes et aussi avec l’INSEP. Si on ne peut pas recruter ces joueurs-là, on cherche à avoir des jeunes qui n’ont peut-être pas tous les éléments immédiats pour être repérés par l’INSEP ou les gros clubs. Sauf qu’on ne veut pas non plus en prendre dix parce qu’on n’aurait pas les moyens de les développer. Donc on en prend un ou deux chaque saison pour mettre en place un emploi du temps et des minutes de jeu qui leur permettent de vraiment s’exprimer. Car plus tu vas mettre de personnes en concurrence et moins tu vas développer les gens. Parfois il vaut mieux en avoir que un ou deux et mettre tout en place pour qu’ils puissent se développer. Par exemple, cette année on va chercher un gamin qui fait 1,62m qui sort des 15 et qui vient de Toulouges et qui démontre d’ores et déjà des qualités qui nous paraissent très intéressantes pour être un meneur de jeu.

« Peut-être que si on avait un jeu plus proche de l’Espagne, on aurait une expression plus facile de la part de meneurs-arrières français »

Les Espagnols, qui sont d’une moyenne de taille à peu près égale aux Français*, arrivent depuis de nombreuses générations à sortir des meneurs de jeu de très haut niveau ?

On a des arrières de très bon niveau mais le problème c’est qu’en Espagne, il les gardent. Nous, ils s’expatrient en NBA, en Euroleague ou dans des équipes très rémunératrices. Il y a un paquet de meneurs-arrières qui remonteraient le niveau s’ils étaient dans notre championnat : De Colo, Causeur, Beaubois, Westermann, Ntilikina, Albicy, Antoine, Parker… Sans parler de Fournier qui est un arrière-shooteur car je ne parle pas que des meneurs. Aujourd’hui, dans le basket, il n’y a pratiquement plus de purs meneurs comme il y a vingt ou vingt-cinq ans où il y avait un meneur, un arrière-ailier, un ailier, un poste 4 qui ne sortait pas à trois-points et un gros cinq. Le basket a évolué avec des arrières, un ailier extérieur, un ailier-fort qui est un intérieur qui peut tirer à trois-points et un pivot. Et donc nous, ce qui nous intéresse c’est de développer des joueurs susceptibles de jouer arrières-meneurs. Les joueurs dont j’ai parlé seraient à Strasbourg, Villeurbanne ou Le Mans, dans les gros clubs, ça changerait le décor de la LNB. Mais on est incapable de rivaliser sur les contrats proposés. Comme actuellement on ne peut pas avoir les meilleurs, il faut que l’on monte ce niveau-là pour qu’il y en ait de plus en plus. Et il n’y a pas de raisons qu’on ne le fasse pas puisqu’en Espagne, ils ne sont pas plus grands que nous et que l’on a une masse de joueurs importante avec des tailles moyennes ou moyennes + et qui sont aptes à jouer arrières-meneurs. Si on va un peu plus loin dans la réflexion, on peut s’interroger sur le style de jeu développé dans les différents championnats espagnols et français. Les caractéristiques de jeu sont complètement différentes et peut-être que si on avait un jeu plus proche de l’Espagne, on aurait une expression plus facile de la part de meneurs-arrières français. Leur développement du jeu en Espagne est un peu moins flashy, explosif, dense dans les qualités athlétiques. Il faut le reconnaître, on a un championnat depuis quelques années dont les caractéristiques sont essentiellement liées à l’explosivité et à la vitesse.

Il y a une vraie continuité dans le style de jeu espagnol de génération en génération, en équipe A comme dans les équipes de jeunes ?

On commence juste dans le championnat de France à avoir des joueurs français ou étrangers qui font 2,10m, ce qui n’était pas le cas il y a quelques saisons. Ce ne sont pas forcément des joueurs explosifs mais ils sont grands et longs. Alors qu’en Espagne on a ce profil-là depuis des années. En Allemagne, ils ont plein de gros binbins, qui ne sont pas explosifs mais avec un basket un peu différent. Quand on regarde les profils des équipes qui vont loin dans les coupes d’Europe, elles sont assez proches dans leur constitution alors qu’en LNB, on n’a pas du tout ces profils-là. On commence tout juste.

On n’en a pas pour des raisons philosophiques ou à cause du coût ?

Déjà parce que ce profil de joueur coûte très cher sur le marché européen et aussi une équipe a tenté ça il y a quelques saisons en faisant venir Curtis Borchardt (NDLR : 2,13m, saison 2009-10) à 500 ou 600 000 dollars. Il avait eu des performances de top niveau que ce soit dans le championnat espagnol qu’en coupe d’Europe et en France, il ne pouvait pas jouer parce qu’il avait à faire à un mec de 2,03m qui allait comme une bombe et donc il n’a pas pu s’exprimer. Les seuls matchs où il a pu le faire avec Villeurbanne au niveau auquel tout le monde l’attendait, c’est en coupe d’Europe.

Mate Skelin (ex-Pau et Le Mans) était dans le même registre, peu à l’aise en Pro A et rentable en Euroleague ?

Bien sûr. Et j’en reviens à ce que je disais précédemment : pour gagner le championnat de France, les équipes sont aujourd’hui organisées avec des joueurs vifs, explosifs, physiques, et ça leur permet aussi d’aller chercher une place en coupe d’Europe. Il faudrait donc avoir un budget qui permette d’avoir une équipe profilée pour jouer la Jeep Elite et d’autre part l’Eurocup ou la Champions League ou éventuellement l’Euroleague.

*Les Espagnols nés entre 1976 et 1980 affichent une moyenne de 1,75m sous la toise. La taille des Français nés à la fin des années 70 est de 1,76-77m.

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Les U17 ont gagné la Coupe de France. C’est un signe que le travail du centre de formation porte ses fruits ?

Depuis que l’on bénéficie d’un nouvel outil qui est Ekinox, on a un fonctionnement au niveau du centre de formation beaucoup plus performant pour entraîner collectivement, suivre individuellement. Il y a donc à Ekinox la salle qui est fabuleuse pour les soirs de match mais aussi notre salle d’entraînement, on est chez nous. Ça permet de mettre en place pas mal de travail et on a également des préparateurs physiques que ce soit pour les U18 et les U21 qui nous permettent de bien développer les gamins au niveau physique, athlétique, motricité, etc. Oui, on souhaite continuer à développer notre centre de formation, à avoir des performances. Aujourd’hui celles-ci sont davantage liées au travail collectif que font les coachs, que ce soit Jean-Luc Tissot pour les U21 et Pierrot Murtin pour les U18 et les U17. Ce que l’on souhaite à terme c’est d’avoir non seulement la capacité de développer du collectif mais aussi des joueurs à titre individuel. Bien évidemment, il y a Thibault Desseignet qui est sorti de cette filière Ecole des Meneurs/U21. On a le petit Hugo Benitez (1,85m) qui est devenu MVP des U17, qui est aussi un meneur de jeu. On a aussi Théo Rey (1,91m) qui est en équipe de France U18. On commence à bénéficier de tout le travail que l’on a mis en place et on espère que l’on va pouvoir de plus en plus recruter des joueurs avec une forte potentialité.

Quelles sont les spécificités de votre école des meneurs ?

Elle va chez nous des U9 au U21. Au sein du club associatif, la JL Amateur, il y a une partie du travail au sein de l’école des meneurs. Evidemment pour les U9 et les U11, ils sont tous meneurs car on ne connaît pas leurs tailles futures.

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Photo: JL Bourg

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