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Pierre Vincent et la dure loi du milieu

La scène se passe dans une brasserie située juste en face de la gare de Bourges. Elle concerne Pierre Vincent et l’auteur de ces lignes alors journaliste pour l’hebdomadaire BasketNews. Nous sommes en 2011 et le printemps a encore souri à Bourges.

La scène se passe dans une brasserie située juste en face de la gare de Bourges. Elle concerne Pierre Vincent et l’auteur de ces lignes alors journaliste pour l’hebdomadaire BasketNews. Nous sommes en 2011 et le printemps a encore souri à Bourges.

Le coach sort de huit saisons magnifiques avec les Tango : 320 victoires et 89 défaites (78,2%), quatre titres de champion de France, deux participations consécutives au Final Four de l’Euroleague. Tout ça alors que le club du Cher dispose désormais d’un budget bien inférieur aux cadors de l’Est.

Avec l’équipe de France, c’est mieux encore. Pierre Vincent a mené deux ans auparavant les Bleues au titre européen. Elles y ont mis la manière, le suspens, d’ailleurs on les surnomme désormais « Les Braqueuses ».

Il ajoutera plus tard à son palmarès cette extraordinaire médaille d’argent olympique décrochée à Londres, la plus belle d’entre toutes. Alors qu’il sort de deux saisons forcément épuisantes avec l’ASVEL, il coachera les Bleues encore une fois pour une médaille d’argent à l’Euro 2013 organisé en France. Une double casquette tout à fait originale dans le basket moderne.

A son Zénith, il fait le grand saut

Jamais coach français n’a connu un tel succès dans le basket féminin. La facilité pour Pierre Vincent aurait été de poursuivre sa route, son autoroute, avec les Tango de Bourges, les Bleues ou alors de monnayer son savoir-faire et son aura auprès de l’une des quatre puissances du continent qui lui faisaient les yeux doux. Au lieu de ça, à 47 ans, il avait décidé de plonger dans le basket professionnel masculin, un univers qu’il n’avait jamais fréquenté.

Ce jour ensoleillé de mai, Pierre Vincent fit un hommage appuyé à son président à Bourges, Pierre Fosset et laissa percevoir son optimisme :

« Nous avons une confiance réciproque. Il me laisse faire mon boulot de technicien. Et malheureusement dans le sport, quand on a fait un peu d’études, réussi dans une entreprise, on se met souvent à avoir des avis sur tout. Et c’est là qu’il y a danger car pour qu’un projet soit viable et efficace, il faut un leader. Et sur le plan technique, c’est l’entraîneur. Quand le président ou le GM porteront la responsabilité de l’échec, ils décideront. Est-ce que c’est transposable chez les garçons ? Moi, je pense que oui puisque ça se fait ailleurs. »

Deux fois coupé

Même s’il ne l’avoua pas alors officiellement, on savait que c’était un coup de fil de Tony Parker, un gamin qu’il avait eu comme junior en équipe de France et avec qui il avait gagné un titre européen à Zadar, devenu meneur d’excellence en NBA et homme fort de l’ASVEL, qui l’avait décidé à faire le grand saut. Et Villeurbanne, c’était alors quelque part l’anti-Bourges. Il avait pris ses précautions mais on lui avait fait remarquer avec ce regard caustique de journaliste qu’entre les bonnes intentions et la pratique dans un club à la stratégie à géométrie variable, agité en permanence par de très fortes turbulences, il pouvait y avoir un énorme décalage… Par sadisme ou plutôt par provocation, on lui avait récité la liste des coaches de renom passés par l’ASVEL depuis l’an 2000 et remerciés en cours de route. Certains étaient des pointures européennes, des coaches de sélections nationales masculines, comme Boscia Tanjevic, Erman Kunter et Vincent Collet.

Pierre Vincent avait répondu par une pirouette teintée d’humour :

« On m’a dit récemment que je serai un vrai coach quand je me serai fait virer au moins une fois. Pour l’instant, ça n’est pas arrivé, donc ça veut dire que je ne suis pas un grand coach. »

Depuis Pierre Vincent a vu en 2014 son contrat brutalement interrompu à l’ASVEL par décision de son « ami » Tony Parker. Il a eu confirmation hier qu’il était écarté du coaching à Orléans. Les deux fois son contrat initial avait pourtant été prolongé. Pas sûr que ces deux épreuves soient bénéfiques pour le lustre de sa carrière mais du moins est-il désormais doublement vacciné contre la dure la loi du milieu.

PS : Hier et suite à la mise à l’écart de Pierre Vincent, le vice-président Nicolas Raimbault, qui apportait une caution sportive au club a donné sa démission. Vous pouvez retrouver son interview ici et ici.

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