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Quand Wilt Chamberlain et les Harlem Globetrotters se sont retrouvés à Moscou

Wilt Chamberlain, âgé de 23 ans, et les Harlem Globetrotters se rendirent en 1959 à Moscou, capitale d’un pays, l’Union Soviétique, qui était à cette époque fermée à double tour. Ce fut un triomphe.

Wilt Chamberlain, âgé de 23 ans, et les Harlem Globetrotters se rendirent en 1959 à Moscou, capitale d’un pays, l’Union Soviétique, qui était à cette époque fermée à double tour. Ce fut un triomphe.

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On vous a déjà conté l’improbable venue de Wilt Chamberlain avec les Harlem Globetrotters dans un petit village de l’Orne, Courgeoust, dans le plus complet anonymat, alors qu’il était déjà le MVP de la NBA. L’Echassier avait fait partie auparavant de la troupe à temps plein alors qu’il sortait de l’université de Kansas et qu’il n’avait pas encore le droit règlementairement de jouer en NBA.

A cette époque, les Globies étaient toujours des basketteurs de première classe, tout en étant des amuseurs publics. « Lorsque je suis arrivé dans l’équipe en 1954, il y avait cinq joueurs noirs dans toute la NBA. Nous, c’était toute l’équipe. Tous les meilleurs basketteurs étaient réunis au même endroit », rappela Meadowlark Lemon, l’une des étoiles des Globettroters.

Un peu plus tôt, la troupe de Abe Saperstein avait battu un record d’affluence dans le stade olympique de Berlin avec la réunion de 75 000 personnes. Le héros des Jeux Olympiques de Berlin en 1936, Jesse Owens, était arrivé dans le stade à bord d’un hélicoptère de l’armée qui s’était posé au milieu de la pelouse. L’exhibition avait été organisée pour concurrencer le troisième festival mondial de la jeunesse qui se tenait alors à Berlin-Est et qui regroupa des centaines de milliers de jeunes communistes. Pour le haut-commissaire américain en République Fédérale d’Allemagne, John McCloy, le show constitua « une belle publicité pour la démocratie américaine. » Pour lui, il prouvait que la minorité noire avait la possibilité de s’élever sur l’échelle sociale malgré la ségrégation raciale qui sévissait alors dans le pays. Wilt Chamberlain a d’ailleurs toujours pris soin de remercier son employeur d’avoir donné des perspectives d’avenir à ses frères de couleur lorsque les portes de la NBA leur demeuraient totalement fermées. « Bien sûr que Abe s’est servi de nous pour devenir riche, mais nous nous sommes servis des Globies pour faire de l’argent. Pas autant qu’Abe, naturellement, mais pour beaucoup d’entre nous davantage qu’on aurait pu en avoir ailleurs. »

Photo: Abe Saperstein et Wilt Chamberlain

Neuf matches en sept jours

Abe Saperstein avait depuis plusieurs années l’ambition d’emmener les Globies au-delà du rideau de fer, en URSS. Nous étions en pleine guerre froide et le tyran Joseph Staline était décédé depuis seulement six ans. Et puis, Saperstein reçut une invitation du directeur du stade Lénine, Vasily Napastinikov, prêt à accueillir la troupe pour neuf matches du 6 au 12 juillet 1959. Les Globettroters avaient alors l’habitude de jouer deux fois dans la même journée dans des lieux différents. « C’est quelque chose dont je rêvais depuis sept ans, » déclara Saperstein lors d’une conférence de presse tenue à Paris. Il ajouta que Wilt Chamberlain serait du voyage, quand bien même il venait de signer son premier contrat avec les Philadelphia Warriors. « J’ai volontiers saisi cette offre. C’était un voyage incroyable, tout simplement incroyable, incompréhensible pour l’esprit, » commenta plus tard L’Echassier. Le département d’Etat américain donna son feu vert, à la condition que les joueurs évitent sur-place les sujets qui fâchent.

Direction Moscou. « Tout a bien commencé. En partant, le temps était agréable et une belle journée brillait. L’humeur de tous les gars était tout simplement géniale. Mais dès que nous avons atterri à Moscou, tout a changé. Il a fait froid, très froid. Et je ne parle pas de la météo, mais de la Russie », s’est souvenu Meadowlark Lemon. Les Globetrotters furent conduits dans un hôtel et furent présentés à des officiers du KGB et plusieurs gardes en uniforme étaient constamment en service autour du bâtiment de l’hôtel. « Dès que quelqu’un dans la rue se tournait vers nous pour converser, deux personnes apparaissaient de nulle part et nous sauvaient des « fauteurs de troubles ». Probablement, voulaient-ils qu’ils ne nous gâchent pas l’impression que l’on pouvait avoir du pays, mais après quelques jours, on a commencé à avoir l’impression d’être surveillés. »

Parfois, les quidams soviétiques parvenaient tout de même à s’approcher des joueurs. Selon Meadowlark Lemon, des centaines d’yeux étaient toujours fixés sur eux et de jeunes garçons venaient toucher leur peau pour vérifier s’il restait ensuite de la peinture noire sur leurs doigts. Ils n’avaient jamais vu d’hommes noirs en vrai de leur vie. Pour chaque déplacement, la troupe était entourée d’une cohorte de voitures et a découvert la salle décrite par Saperstein comme « une arèna soviétique typique, sombre et minable. »

Les Globies ont joué à guichets fermés en Union Soviétique et environ 135 000 spectateurs ont assisté à l’ensemble de leurs matches. Ceux-ci étaient agrémentés d’attractions diverses et variées : un cycliste… qui reçut davantage d’applaudissements que les basketteurs, un danseur de flamenco sur patins à roulettes et encore une rencontre de tennis de table. Les Américains ont été surpris lorsqu’on leur demanda de faire un essai devant des officiels soviétiques silencieux ! Pour leurs matches, ils étaient accompagnés de leurs adversaires conciliants habituels, une équipe composée de Chinois de San Francisco. « Nous espérions jouer au moins une fois contre l’équipe locale. Cependant, ce ne fut pas le cas. On nous a donnés une centaine de prétextes différents, à cause desquels il était impossible d’organiser une rencontre », révéla Chamberlain.

Le premier match devant 14 000 personnes a constitué pour eux un choc car le public sembla complètement indifférent à leur prestation. En fait, il y avait eu maldonne, les Soviétiques croyant assister à un match enragé et pas à un show où le comique prenait le pas sur le sérieux. Heureusement, le public s’est ensuite déridé grâce à quelques stratagèmes du promoteur américain. L’un de ses joueurs s’est mis à courir seul sur le terrain de façon burlesque, et l’ensemble des joueurs appliquèrent des combinaisons de football américain. Le speaker donna également un coup de pouce en annonçant à la salle que les Globetrotters n’étaient pas seulement une équipe de basketteurs professionnels mais aussi des comédiens. La glace de méfiance se brisait, même les arbitres ont commencé à prendre part au spectacle, et à partir du troisième match, les spectateurs ont accueilli la troupe avec une standing ovation. « Il y a eu beaucoup de rires dans le public causés par les sauts comiques et les mouvements trompeurs du comédien du basket-ball M. Lemon. Les tirs de K. Wilson depuis de longues distances sont extrêmement précis. Les gens de Harlem montrent des tours de maître et des techniques habiles », pouvait-on lire dans le journal La Pravda, qui a ajouté : « Après chaque représentation, les basketteurs ont fait un tour du stade et ont serré la main de tout le monde. Des dizaines de milliers de poignées de main en quelques jours seulement. »

Photo : Abe Saperstein, le manager Eddie Gottlieb et Nikita Khrouchtchev

Le match Wilt Chamberlain vs Nikita Khrouchtchev à la vodka

La surprise du chef est venue lorsque les Globetrotters visitaient la Place Rouge. Une cohorte de berlines noires s’est arrêtée et un petit homme rondouillard est venu à leur rencontre. C’était Nikita Khrouchtchev, le Premier Secrétaire du Comité Central du Parti Communiste. L’homme le plus puissant du pays. Il s’écria : « ah ! basket-ball » et vint serrer la main des joueurs et bavarder avec eux quelques minutes, ne rechignant pas à se faire prendre en photos. « Le basket-ball est très intéressant, très intéressant, » s’exclama t-il par le truchement d’un interprête.

Plus tard, l’équipe a été invitée à un banquet. Les joueurs ont été décorés chacun de l’ordre de Lénine et reçu une somme de 10 000 dollars mais en roubles, utiles uniquement sur le territoire soviétique, si bien qu’ils ont acheté du caviar et des fourrures à profusion. La dernière partie de la soirée a été particulièrement mémorable. Selon la tradition russe, les Globies ont été invités à boire de la vodka. Certains d’entre-eux ont refusé, d’autres ont tenté l’expérience. L’assistance a encouragé Wilt Chamberlain à multiplier les canons et celui-ci a avoué qu’à ce moment-là son esprit de compétiteur a pris le dessus. Spa-si-bo ! Le géant a déclaré que la seule personne qui était aussi fraîche que lui le lendemain matin était Khrouchtchev.

Quant à Abe Saperstein, 1,60m, il était heureux d’avoir fait connaissance avec le Premier secrétaire, un homme de sa taille. C’était surtout pour lui un triomphe car les Harlem Globetrotters méritaient plus que jamais leur réputation d’ambassadeurs de la bonne volonté. Le dernier soir de la tournée, Vasili Napastnikov, le directeur du Palais des sports, déclara : « Votre équipe a fait plus pour aider les relations russo-américaines que toute autre organisation sportive venue à Moscou. Nous vous invitons à revenir dès que possible. »

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On vous a déjà conté l’improbable venue de Wilt Chamberlain avec les Harlem Globetrotters dans un petit village de l’Orne, Courgeoust, dans le plus complet anonymat, alors qu’il était déjà le MVP de la NBA. L’Echassier avait déjà fait partie auparavant de la troupe à temps plein alors qu’il sortait de l’université de Kansas et qu’il n’avait pas encore le droit règlementairement de jouer en NBA.

A cette époque, les Globies étaient toujours des basketteurs de première classe, tout en étant des amuseurs publics. « Lorsque je suis arrivé dans l’équipe en 1954, il y avait cinq joueurs noirs dans toute la NBA. Nous, c’était toute l’équipe. Tous les meilleurs basketteurs étaient réunis au même endroit », rappela Meadowlark Lemon, l’une des étoiles des Globettroters.

Un peu plus tôt, la troupe de Abe Saperstein avait battu un record d’affluences dans le stade olympique de Berlin avec la réunion de 75 000 personnes. Le héros des Jeux Olympiques de Berlin en 1936, Jesse Owens était arrivé dans le stade à bord d’un hélicoptère de l’armée qui s’était posé au milieu de la pelouse. L’exhibition avait été organisée pour concurrencer le troisième festival mondial de la jeunesse qui se tenait alors à Berlin-Est et qui regroupa des centaines de milliers de jeunes communistes. Pour le haut-commissaire américain en République Fédérale d’Allemagne, John McCloy, le show constitua « une belle publicité pour la démocratie américaine. » Pour lui, il prouvait que la minorité noire avait la possibilité de s’élever sur l’échelle sociale malgré la ségrégation raciale qui sévissait alors dans le pays. Wilt Chamberlain a d’ailleurs toujours pris soin de remercier son employeur d’avoir donné des perspectives d’avenir à ses frères de couleur lorsque les portes de la NBA leur demeuraient totalement fermées. « Bien sûr que Abe s’est servi de nous pour devenir riche, mais

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