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Radiographie de la Ligue Féminine: Une joueuse gagne désormais autant qu’un joueur de Pro B !

Sportivement et financièrement, la Ligue Féminine de Basket et ses 12 clubs sont sur une pente ascendante. Au point que les joueuses sont aujourd’hui autant payées que les joueurs de Pro B. Voici pourquoi.

Sportivement et financièrement, la Ligue Féminine de Basket et ses 12 clubs sont sur une pente ascendante. Au point que les joueuses sont aujourd’hui autant payées que les joueurs de Pro B. Voici pourquoi.

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« Le niveau est monté d’un cran cette année, c’est impressionnant. Il y a de gros effectifs partout, il n’y a pas de petits. Il y a des années où l’on pouvait presque faire l’impasse sur certaines équipes alors que cette année il n’y a pas une contre qui on peut se relâcher. Et les grosses sont vraiment très grosses. Je ne sais pas si j’ai connu une saison où il y a eu autant de grosses équipes, une telle homogénéité. Cette année, on ne peut pas dire qui va être champion de France. Ça démontre qu’il y a une grosse concurrence. »

C’est une experte qui porte ce jugement. Avant d’être la coach de Basket Landes, Cathy Melain a passé douze saisons comme joueuse en Ligue Féminine. La double championne d’Europe, trois fois vainqueur de l’Euroleague, reflète le sentiment général.

La LFB est sportivement et financièrement en bonne santé et ses décideurs ont pu faire part à l’auditoire, vendredi lors de la conférence de presse d’avant-saison, d’une kyrielle de chiffres impressionnants pour du basket féminin en Europe. 37 officiels, arbitres, table de marque, statisticiens, et 100 bénévoles, ainsi que les services de la FFBB et de la LFB ont été réquisitionnés pour le 14e Open à Coubertin qui réunit les douze équipes du championnat et qui s’est associé à la MAIF, une société d’assurance mutuelle. Chaque année, c’est un total de 6 000 spectateurs qui investissent la salle du XVIe arrondissement parisien, même si les gradins apparaissent parfois clairsemés du fait que les supporters ne sont souvent attentifs qu’à leur équipe favorite. En marge des matches, l’Open est aussi propice pour certains au business comme l’explique ce reportage de France 3 Nouvelle Aquitaine à propos de Basket Landes.

Durant les trois jours de l’Open, la Ligue Féminine a été fière de communiquer sur trois chiffres phare : 54 internationales dont 19 ayant participé cet été à la Coupe du monde en Espagne garnissent ses rangs plus trois Américaines ayant remporté le titre WNBA 2018 avec le Seattle Storm : Alyssa Clark (Lyon) -membre du 5 majeur avec 7,4 points et 3,5 rebonds-, Kaleena Mosqueda-Lewis (Charleville) et Samantha Whitcomb, laquelle en tant que naturalisée a pu en sus gagner une médaille d’argent avec l’Australie quelques jours plus tard à la Coupe du monde. Avec les retours en France d’Helena Ciak (ex-Koursk) et Endy Miyem (ex-Schio), ce sont 9 internationales françaises sur 12 qui sont intégrées au championnat national.

Pour compléter le tableau, il faut savoir que les racines françaises sont spécialement solides puisque 51 des 81 joueuses listées ont remporté au moins une médaille européenne dans les compétitions de jeune. Une étude qui exclue les double nationalités comme KB Sharp (Bourges) ou Mame Marie Sy Diop (Villeneuve d’Ascq). Et si, par exemple, la meneuse de La Roche/Yon, Caroline Hériaud, n’a pas de médaille de 5×5 autour du cou, elle a été plusieurs semaines cet été en tête du ranking mondial 3×3.

Un autre record a été battu récemment, c’est celui du nombre de spectateurs pour la finale de la Ligue 2 entre Landerneau et Angers : 7 620 en trois matches dont 3 500 pour celui joué dans le Maine-et-Loire. A rendre jalouses certaines équipes d’Euroleague.

« Le visuel de l’Open a été créé en discutant avec les capitaines et les clubs. » Irène Ottenhof

La directrice de la Ligue Féminine, Irène Ottenhof insiste sur le fait que l’instance travaille main dans la main avec ses clubs.

« Le visuel de l’Open a été créé en discutant avec les capitaines et les clubs. C’est une vraie réussite collective. Un gros chantier a été fait sur les tenues des joueuses et plus particulièrement dans la volonté de mettre en valeur les sponsors des clubs. Un travail de longue haleine, de deux ans, en collaboration entre la LFB et les clubs. »

Une autre coopération, sous l’égide fédérale, entre employeurs -les clubs- et employés -les joueuses et coachs- est en passe de mettre sur pied une convention collective.

« Si on aboutit à la rédaction du texte, le basket féminin sera le premier sport collectif féminin à se doter d’un accord sectoriel. »

Même si le basket féminin est très loin de l’éclairage médiatique du basket masculin -Jeep Elite et aussi Euroleague, Eurocup et Champions League sans parler de la NBA et de la NCAA-, il peut se targuer d’avoir été diffusé vingt fois par SFR/RMC Sport, en comprenant les matches de l’équipe de France, plus la couverture effectuée par le groupe Canal+ à l’occasion de la Coupe du monde en Espagne. A l’avenir, tous les matches de LFB, soit environ 150, seront diffusés sur LFBTV grâce au système KeeMotion. Les fans du premier cercle ne peuvent qu’être ravis.

« Nos contenus de basket féminin, nos reportages, pastilles vidéos ont représenté 634 000 vues en cumulé », précise Irène Ottenhof.

Autre nouveauté notable en 2018 : la Ligue Féminine a co-organisé avec la Ligue Nationale de Basket la Soirée des Trophées, en acceptant de calquer son règlement avec celui des hommes en élisant une MVP sans distinction de nationalité, en l’occurrence la Canadienne Nayo Raincock-Ekunwe de Nantes-Rezé. Pareille association est rare dans le sport mondial, celle entre la NBA et la WNBA ayant valeur d’exemple. L’opération va être reconduite le 20 mai 2019.

« Une équipe de haut de tableau peut être en difficulté voir perdre contre une équipe de bas de tableau, ce qui est beaucoup, beaucoup plus rare en Russie ou en Italie où il y a un gap de niveau très important. » Endy Miyem

Le niveau sportif de la Ligue Féminine a-t-il déjà atteint un tel niveau ?

« Je n’ai pas connu l’époque où l’USVO et Bourges dominaient l’Euroleague. A priori ces années-là c’est ce qui se faisait de mieux en Europe », rappelle l’entraîneur de Bourges Olivier Lafargue, qui était au Stade Montois lorsque son club et Valenciennes s’étaient retrouvés en finale de l’Euroleague à Messine. « Actuellement ce qui se fait de mieux en Europe ce n’est malheureusement pas en France pour l’instant. Est-ce que ce sont les plus gros rosters depuis sept-huit ans ? C’est possible. Mais avoir des rosters, c’est bien, mais ce qui est important, c’est ce que l’on en fait. Je pense que chacun travaille pour avoir du beau basket et ce soir (Match des Champions face à Charleville) c’était plutôt un bon match. »

Son collègue de Charleville-Mézières, Romuald Yernaux complète la vision d’ensemble :

« Il n’y a pas de petites équipes. Il y a de gros effectifs et des équipes qui sont moins pléthoriques mais tout autant problématiques avec de vrais numéros 5. Tactiquement, ça va être très intéressant pour les coaches. Je pense que les matches à l’extérieur vont être durs à aller chercher. C’est un championnat qui sera plus serré peut-être que par le passé. »

Intéressant aussi de connaître l’avis de Endy Miyem, qui vient de passer une saison en Russie, à Koursk, et deux autres en Italie, à Schio :

« Je n’ai fait qu’un match pour l’instant mais en en parlant avec les filles, ce qui en ressort ici c’est que le championnat est beaucoup plus dense. Une équipe de haut de tableau peut être en difficulté voir perdre contre une équipe de bas de tableau, ce qui est beaucoup, beaucoup plus rare en Russie ou en Italie où il y a un gap de niveau très important. »

De fait, Famila Wüber Schio n’a perdu que six matches de saison régulière au cours des deux dernières saisons.

La capitaine des Bleues a donc rejoint les Gazelles de Lattes-Montpellier où figurent cinq internationales françaises ayant participé à la Coupe du monde (les meneuses Romane Bernies et Alix Duchet, l’ailière Diandra Tchatchouang et les intérieures Helena Ciak et Endy Miyem), plus une ancienne internationale de fraîche date (Marielle Amant), une championne WNBA, médaillée d’argent à la Coupe du monde (Samantha Whitcomb), une autre américaine (Taylor Wurtz) et une internationale slovène (Tina Trebec). Une véritable Dream Team, voire un épouvantail. Un retour en force au premier plan pour le double champion de France (2014 et 2016) qui s’est contenté de la septième place en 2018.

Comme Olivier Lafargue, son collègue de Bourges, adjoint comme lui de Valérie Garnier en équipe de France, Rachid Méziane a récupéré ses internationales juste quelques jours avant l’Open mais il les avait en fait déjà sous la main durant la campagne estivale des Bleues.

« Oui, c’est plus facile car je connais les joueuses et on n’est pas sur un terrain inconnu mais j’ai à cœur de ne pas faire d’amalgame entre la fonction que j’occupe en équipe de France et celle au sein du BLMA. Evidemment, le fait qu’elles soient en équipe de France, ça aide d’avoir une meilleure connexion entre elles aussi avec leur équipe de club. J’ai eu la chance aussi de rencontrer à Tenerife Samantha Whitcomb qui était avec l’équipe australienne et c’est un entretien qui a permis de ne pas partir à zéro. »

Outre Lattes-Montpellier, Bourges, qui a dominé Charleville (75-67) samedi lors du Match des Champions remportant ainsi pour la quatrième fois ce trophée en cinq ans d’existence, voit une autre armée se lever pour le concurrencer, celle du Lyon ASVEL féminin du président Tony Parker. Car si ses internationales françaises sont disons de deuxième niveau (Marième Badiane, Paoline Salagnac et Ingrid Tanqueray), l’équipe lyonnaise peut se prévaloir de la meneuse titulaire de Belgique, qui a fait des éclats à la Coupe du monde (Julie Allemand), d’une internationale canadienne excellente avec Tarbes (Michelle Plouffe) et d’une internationale brésilienne qui a précédemment montré tout son savoir-faire à Bourges et Charleville (Clarissa Dos Santos).

« Plus forte que l’année dernière ? Sur le papier, oui. Maintenant il va falloir le prouver sur le terrain », commente Ingrid Tanqueray, qui revit après une saison quasi blanche à cause d’une blessure ligamentaire au genou. « Quand je vais sur le terrain, ça me donne envie et je suis vraiment heureuse d’être là. »

On ne l’a pas oublié : avec Alysha Clark (1,81m, 31 ans), qui jusque-là à passer l’hiver beaucoup de temps en Israël puis en Turquie et en Pologne, l’ASVEL a déniché une perle.

« Ce n’est pas une surprise. Ça fait cinq ans que je suis sur elle. Je la connais par cœur. Je sais que c’est une joueuse complète, qui peut défendre, prendre des rebonds, qui fait des passes, qui peut scorer. Elle a besoin d’un collectif. Ce n’est pas une fille qui va prendre la balle et jouer toute seule. Il faut construire un collectif autour d’elle et pas pour elle, » détaille le coach Valérie Demory.

Lattes-Montpellier et l’ASVEL sont engagés cette saison en Eurocup et les deux équipes peuvent ambitionner d’y faire leur place au soleil et parallèlement de gagner leur billet pour l’Euroleague de 2019-2020.

« On ne va pas se mentir, on ne cherche pas le top 4, mais c’est une compétition qui peut nous apporter un peu plus d’expérience, d’intensité. » Amel Bouderra

En attendant, l’édition 2018-19 concerne Bourges, Charleville et Villeneuve d’Ascq. Des trois, c’est forcément le club du Cher qui est le mieux armé pour viser les quarts-de-finale. Il y a dans l’effectif des joueuses talentueuses et aux dires du président Pierre Fosset une bonne alchimie.

« On sait que quand tu es à Bourges, il faut que tu sois performant en championnat et en Euroleague, » rappelle Olivier Lafargue. « On va commencer la saison en se connaissant, ce qui est mieux par rapport à l’an dernier où il a fallu que l’on créé notre identité, notre groupe. Ceci dit, on n’a plus Ayayi, Tchatchouang et Palau. Il y a Lisa (Berkani) qui arrive et qui va apprendre à connaître ce qu’on lui demande, pareil pour Iliana (Rupert) qui n’était pas là ce soir (NDLR : face à Charleville). Avant de croire que l’on va être encore plus ambitieux en Euroleague, il va falloir que l’on avance dans notre équipe et savoir ce que l’on fait de notre basket. J’ai bon espoir que l’on soit prêt plus tôt que l’année dernière mais on sait que l’Euroleague c’est très costaud et cette année on sait que l’on en aura aussi des matches costauds en championnat. »

Bourges est inscrit en Euroleague sans discontinué depuis la saison 1995-96 ; un record d’Europe. A l’opposé, les Flammes Carolos de Charleville-Mézières vont la découvrir dans quelques jours.

« Il y a forcément de l’excitation car c’est quelque chose que l’on voulait », apprécie Amel Bouderra, qui était déjà la meneuse du club en Nationale 1. « On ne va pas se mentir, on ne cherche pas le top 4, mais c’est une compétition qui peut nous apporter un peu plus d’expérience, d’intensité. Des choses que l’on peut apprendre pour les reproduire ensuite en championnat le week-end. On joue l’Euroleague, on joue le championnat français avec aussi des grosses équipes. On est content d’avoir un championnat aussi intense dès le début. Ça va nous mettre dans le bain tout de suite. »

Le message du coach Romuald Yernaux est similaire :

« C’est une expérience supplémentaire dans celle du club pour le sportif mais aussi pour tout ce qui est administratif. On prend ça avec beaucoup d’humilité. On sait que l’on va être dans le dur, qu’il va falloir jouer beaucoup à l’énergie. Il faut être à la fois ambitieux et raisonnable. Peu importe que l’on gagne ou perdre des matches, il faut que ça renforce l’équipe. Et peut-être que comme ça dans la deuxième partie de saison, ça nous permettra de jouer sur un niveau de dureté qui soit supérieur à ce que l’on a connu sur les années passées. On le prend comme un outil pour pouvoir progresser. Beaucoup de joueuses et moi-même qui allons découvrir. Il faut accepter de relever le niveau de difficulté pour pouvoir apprendre tous ensemble, amener l’équipe à rester sous pression quelque soit le résultat. On a une équipe valeureuse, capable d’embêter des équipes qui certes au départ sont talentueuses mais le talent n’amène pas tout. »
« Moi je suis là pour gagner des matches, je ne suis pas là pour tenir une mi-temps. » Emmanuel Coeuret

Le titre national ne devrait pas échapper à Bourges, Lattes-Montpellier, Lyon ou Charleville avec Villeneuve comme outsider. Les autres vont avoir l’ambition de résister à ces seigneurs. C’est le cas de Nantes-Rezé qui a fait bonne figure face à Lattes-Montpellier avant de céder au retour des vestiaires, 69-85.

« On a tout fait pour rendre ce match accessible », analysait le coach Emmanuel Coeuret. « On a bien commencé en première mi-temps et on a tout cassé en cinq minutes. Tout le monde va dire « oui, mais Montpellier… vous ne jouez pas dans la même cour… » On ne sait pas dans quelle cour on joue pour l’instant. Peut-être que notre équipe, elle est moins forte mais sur la première mi-temps, ce n’était pas flagrant. Montpellier est bon à prendre actuellement, davantage que dans quatre semaines. Et on a tout cassé en cinq minutes ! Moi je suis là pour gagner des matches, je ne suis pas là pour tenir une mi-temps. Il faut être ambitieux et ce que je retiens c’est que l’on a été audacieux et ambitieux en première mi-temps et ça s’est arrêté. Je sais pourquoi ça s’est arrêté. Elles sont sympas… et mon erreur a été d’être un peu trop positif à la mi-temps. Et après c’est parti à vau-l’-eau. On dirait un poulet sans tête dans une basse-cour. Il faut que l’on soit ambitieux et là je ne suis pas spécialement très content. C’est Montpellier, mais Montpellier sur un premier match et ils ont dû jouer trois matches (de préparation). »

Plus inquiétante a été la première sortie du finaliste 2018, Tarbes, qui s’est fait hacher menu par Lyon (40-68). Et c’est le sentiment du coach du TGB, François Gomez.

« On repart avec un groupe d’inexpérimenté, très jeune, en apprentissage. Aby Gaye a beaucoup souffert aujourd’hui mais elle est jeune, elle a 23 ans. J’ai des meneuses de 17 (Marine Fauthoux) et 19 ans (Tima Pouye) donc on n’est pas du tout dans le même contexte et la même catégorie. On n’a plus des joueuses d’expérience que l’on avait l’an dernier sur le poste 1 ou Michelle Plouffe qu’évidemment on ne voit pas mais qui a une ligne de stats comme d’habitude magnifique. Je ne vais pas les culpabiliser, elles sont là pour apprendre. Je sais à quoi je me suis engagé avec ces deux jeunes joueuses. Peut-être qu’à court terme c’est compliqué mais j’ai confiance à moyen terme avec ces deux filles. J’espère qu’un jour je participerai à l’éclosion de jeunes talents. C’est la place du club du TGB. On n’est pas malheureusement dans la possibilité d’avoir Mlle Clark, Mlle Dos Santos ou de garder Mlle Plouffe. Moi je souhaite avoir de futures internationales A. Il faut être réaliste : il y a des équipes construites pour gagner le titre et d’autres pour travailler. A nous de prouver que l’on est plutôt fait pour aller titiller les gros. »

Car de fait, s’il y a des gros, comme ils disent, il n’y a pas une équipe vouée d’office à la relégation. Si bien que chacun peut aspirer jouer les playoffs (8 places) mais devra tout autant avoir un œil dans le rétro et éviter les playdowns (4 derniers de la saison régulière).

1,8M€ de budget en moyenne contre 400 000 il y a vingt ans

Si la Ligue Féminine est aussi dense, c’est que le budget moyen est passé à 1,8m€. Une progression de 17% sur les quatre dernières saisons, sachant qu’il était de 400 000 euros il y a vingt ans, à la création de la LFB. Le partenariat privé a augmenté de 42% en quatre ans.

Tout ça fait que les joueuses de Ligue Féminine gagnent aujourd’hui en moyenne davantage que leurs homologues de la Pro B masculine : 4 800€ en brut contre 4 700€. Un fait INIMAGINABLE il y a vingt ans et qui démontre que même s’il n’y a pas globalement une parité absolue, la basketteuse de haut niveau n’est plus une laissée pour compte. On observe en revanche, que les coaches de LFB -11 hommes et Cathy Melain- sont encore en retrait vis-à-vis de leurs collègues de Pro B (4 700 contre 5 100€).

« Il y a un travail qui a été mené entre la fédération et les clubs de Ligue féminine avec la constitution d’un fond de réserves. C’était lors de la saison 2013-14, » commente Irène Ottenhof. « Ce travail qui n’a pas été simple au départ parce qu’il a fallu que la fédération oblige les clubs à consolider leur situation financière jusqu’à 10% de leurs ressources propres. Donc potentiellement une et pour certains deux joueuses en moins à signer. Après les clubs ont compris l’intérêt général de cela. Il y avait des clubs qui explosaient en plein vol de championnat. Sur le plan médiatique, mettre la clé sous la porte en plein championnat, c’est catastrophique. Les clubs de ligue féminine ont réussi à se constituer ce fond de réserve, ce qui permet de se prémunir au cas où un partenaire pour x raison se retire. Dans ce cas, il n’y a pas péril en la demeure, le club peut continuer à tourner. On savait qu’avec la réforme territorial, l’agent public allait se raréfier. Les clubs ont travaillé d’arrache-pied pour inverser la tendance. Il y a un peu plus de trois ans, on avait globalement 40% de partenariats privés et 60% d’argent public. Non seulement ça s’est inversé mais le gap s’est élargi. Le partenariat privé a explosé. »

Un bon exemple est celui de Basket Landes. Lorsque le club a accédé à la Ligue Féminine, il y a dix ans, son budget était de 600 000€ avec plus de 80% de financement par les subventions publiques. Le club compte aujourd’hui près de 400 partenaires et son budget a fait un bond de 1 million. Les Landais ont l’intention d’atteindre les 2 millions d’ici 2022 et de participer eux-aussi à l’Euroleague. La soirée au O’Fam de Levallois-Perret en marge de l’Open fait partie de la stratégie de développement (voir la vidéo ci-dessus).

Une moyenne de spectateurs stationnaire mais beaucoup moins de gratuité

En Europe, les matches de basket féminin se jouent souvent devant des gradins vides. Ce n’est pas le cas en France. L’équipe nationale attire même souvent les foules. D’apparence, avec 1 600 spectateurs en moyenne, la Ligue Féminine est dans un état stationnaire. Seulement le profil des spectateurs n’est plus le même.

« Les affluences sont quasi similaires depuis quatre ans », fait remarquer Irène Ottenhof. « Il y a une époque où il y avait beaucoup de gratuit, il fallait du monde dans la salle, et en plus les affluences avaient un peu diminué. Il y a eu alors un travail d’éducation qui a été fait par les clubs et non seulement les personnes reviennent à la salle mais elles acceptent de payer. Il n’y a donc pas de grosses augmentations sur l’affluence mais une augmentation sur les tarifs.  Les gratuits sont devenus très faibles. Ils existent notamment sur des opérations comme celles menées à Gerland (NDLR : pour des matches de gala de l’ASVEL avec un record de 6 152 spectateurs pour la venue de Bourges en février 2017). Le gratuit est fait pour attirer une nouvelle cible. Si le spectacle sportif et la structure du club séduisent ces nouvelles personnes, elles vont revenir. Tous les clubs n’ont pas la même stratégie autour de ça. »

Contrairement à la Jeep Elite, qui subit de plein fouet la concurrence de la NBA et des clubs d’Euroleague au financement souvent artificiel, la Ligue Féminine peut marcher main dans la main avec l’équipe nationale. L’une fournit l’essentiel des joueuses, l’autre assure sa promotion par le biais de ses brillants résultats sur la durée. Et après le demi-échec de la Coupe du monde -davantage dans la manière en quart-de-finale face à la Belgique que dans le résultat sec, une cinquième place étant très honorable-, le président fédéral, Jean-Pierre Siutat, ne lésine pas sur le prochain challenge :

« Notre ambition l’année prochaine, c’est d’aller chercher le titre. D’être champion d’Europe ne qualifie plus directement pour les Jeux Olympiques, ça passera automatiquement par des tournois qualificatifs. Alors il s’agira de se faire plaisir, de gagner un titre uniquement pour gagner un titre. »

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« Le niveau est monté d’un cran cette année, c’est impressionnant. Il y a de gros effectifs partout, il n’y a pas de petits. Il y a des années où l’on pouvait presque faire l’impasse sur certaines équipes alors que cette année il n’y a pas une contre qui on peut se relâcher. Et les grosses sont vraiment très grosses. Je ne sais pas si j’ai connu une saison où il y a eu autant de grosses équipes, une telle homogénéité. Cette année, on ne peut pas dire qui va être champion de France. Ça démontre qu’il y a une grosse concurrence. »

C’est une experte qui porte ce jugement. Avant d’être la coach de Basket Landes, Cathy Melain a passé douze saisons comme joueuse en Ligue Féminine. La double championne d’Europe, trois fois vainqueur de l’Euroleague, reflète le sentiment général.

La LFB est sportivement et financièrement en bonne santé et ses décideurs ont pu faire part à l’auditoire, vendredi lors de la conférence de presse d’avant-saison, d’une kyrielle de chiffres impressionnants pour du basket féminin en Europe. 37 officiels, arbitres, table de marque, statisticiens, et 100 bénévoles, ainsi que les services de la FFBB et de la LFB ont été réquisitionnés pour le 14e Open à Coubertin qui réunit les douze équipes du championnat et qui s’est associé à la MAIF, une société d’assurance mutuelle. Chaque année, c’est un total de 6 000 spectateurs qui investissent la salle du XVIe arrondissement parisien, même si les gradins apparaissent parfois clairsemés du fait que les supporters ne sont souvent attentifs qu’à leur équipe favorite. En marge des matches, l’Open est aussi propice pour certains au business comme l’explique ce reportage de France 3 Nouvelle Aquitaine à propos de Basket Landes.

Durant les trois jours de l’Open, la Ligue Féminine a été fière de communiquer sur trois chiffres phare : 54 internationales dont 14 ayant participé cet été à la Coupe du monde en Espagne garnissent ses rangs plus trois Américaines ayant remporté le titre WNBA 2018 avec le Seattle Storm : Alyssa Clark (Lyon) -membre du 5 majeur avec 7,4 points et 3,5 rebonds-, Kaleena Mosqueda-Lewis (Charleville) et Samantha Whitcomb, laquelle en tant que naturalisée a pu en sus gagner une médaille d’argent avec l’Australie quelques jours plus tard à la Coupe du monde. Avec les retours en France d’Helena Ciak (ex-Koursk) et Endy Miyem (ex-Schio), ce sont 9 internationales françaises sur 12 qui sont intégrées au championnat national.

Pour compléter le tableau, il faut savoir que les racines françaises sont spécialement solides puisque 51 des 81 joueuses listées ont remporté au moins une médaille européenne dans les compétitions de jeune. Une étude qui exclue les double nationalités comme KB Sharp (Bourges) ou Mame Marie Sy Diop (Villeneuve d’Ascq). Et si, par exemple, la meneuse de La Roche/Yon, Caroline Hériaud, n’a pas de médaille de 5×5 autour du cou, elle a été plusieurs semaines cet été en tête du ranking mondial 3×3.

Un autre record a été battu récemment, c’est celui du nombre de spectateurs pour la finale de la Ligue 2 entre Landerneau et Angers : 7 620 en trois matches dont 3 500 pour celui joué dans le Maine-et-Loire. A rendre jalouses certaines équipes d’Euroleague.

La directrice de la Ligue Féminine, Irène Ottenhof insiste sur le fait que l’instance travaille main dans la main avec ses clubs.

« Le visuel de l’Open a été créé en discutant avec les capitaines et les clubs.

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Demain : Interview de Pierre Fosset, président du Tango Bourges Basket

Photos, de haut en bas: Alexia Plagnard (Basket Landes), Endy Miyem (Lattes-Montpellier), Amel Bouderra (Charleville), Shaqwedia Wallace (Nantes), Mame Marie Sy Diop (Villeneuve d’ascq) et Alexia Chartereau (FFBB).

Photos FFBB Bellenger/Lecoq sauf Amel Bouderra, FIBA.

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